Citations de Alphonse Karr

74 Citations

Avec de l'imagination et des obstacles, on peut toujours adorer une femme; il n'est pas aussi facile de l'aimer. On n'adore la plupart des femmes que faute de les pouvoir aimer.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 19/12/2020

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Le bonheur est une chose si fragile, il y en a si peu de réservé à l'homme, que ce qu'il en peut avoir lui semble toujours pris sur la part des autres; qu'il se cache comme un voleur pour en jouir, et n'ose être heureux que tout bas.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 19/12/2020

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Le bonheur, comme le soleil, assainit l'air que l'on respire et réjouit l'âme même des simples spectateurs.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 19/12/2020

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La vie se partage en deux moitiés, l'une pleine d'espérances qui ne doivent point se réaliser; l'autre, livrée aux regrets de bonheurs dont nous n'avons pas joui; car ce qui nous semblait si beau dans l'avenir, ce qui, lorsque nous l'avons atteint, ne nous a donné que désappointement et dégoût, reprend sa magie dans le passé. L'espérance et le souvenir ont le même charme et le même prestige: c'est l'éloignement.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 19/12/2020

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L'amour est la plus terrible et la plus honnête des passions; c'est la seule qui ne puisse s'occuper de son bonheur sans y comprendre le bonheur d'un autre.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Je sens bien mieux la présence de Dieu sous le soleil, qui est son regard, devant les sublimes magnificences de la nature, qui sont son ouvrage, que dans une église, ouvrage des hommes, où il y a toujours un peu de mauvais goût et de mesquinerie.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Je vois bien que l'homme perfectionne tout autour de lui, mais je ne vois pas qu'il se perfectionne lui-même. Or un bossu qui perfectionnerait sans cesse la coupe des habits, et qui ne voudrait ou ne pourrait pas s'occuper de se redresser lui-même, n'en serait pas beaucoup moins bossu pour cela; il arriverait à avoir une bosse congrûment vêtue, une bosse bien mise, mais il aurait toujours une bosse.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Voltaire disait: « C'est à la Bastille que j'ai fait mes meilleurs vers sur la liberté. » C'est aux exilés qu'il faut demander ce que c'est que la patrie. C'est aux amants malheureux qu'il faut demander ce que c'est que l'amour. C'est dans l'hiver que le poète s'enivre du parfum des roses absentes, des roses qu'il regrette et qu'il espère.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Les hommes n'admirent volontiers que les choses qu'ils ne comprennent pas et les hommes qui leur font du mal.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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L'égalité ne consiste pas à être tous la même chose, mais à arriver à la même supériorité et à trouver les mêmes droits, chacun dans sa profession. Le bon laboureur est l'égal d'un grand poète et d'un grand homme d'État. - Mais un poète médiocre et un brouillon ou un parvenu sans talents ne sont pas du tout les égaux d'un bon laboureur.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Cela n'a jamais déshonoré personne, d'être heureux, cela peut tout au plus faire haïr; mais on ne peut être heureux à moins: c'est à prendre ou à laisser. Cela accompagne si régulièrement le bonheur, comme le coassement des grenouilles une belle soirée d'été, qu'il semble que la haine fasse partie du bonheur, et qu'elle avertisse les gens distraits qu'ils sont heureux.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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La Vérité est nue, dit-on, parce qu'elle ne permet pas à tout le monde de la vêtir, parce que chaque siècle ne produit qu'un très petit nombre de ces esprits qui savent la parer sans la voiler, l'habiller sans la déguiser, et qu'elle ne veut pas accepter les modes.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Assez et trop longtemps les hommes ont surtout accordé leur admiration et élevé des statues à ceux qui leur faisaient du mal, - aux fléaux que la Providence a mis de temps en temps sur la terre, comme elle met des brochets dans les étangs et des reginus dans la mer pour empêcher la trop grande multiplication. Je veux parler des conquérants, des Tamerlans, de ces hommes dont la gloire consistait en ceci: - Avoir fait tuer énormément de leurs compatriotes, mais avoir fait tuer encore plus d'hommes d'un autre pays.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Un voyage prouve moins de désirs pour ce que l'on va voir que d'ennui de ce que l'on quitte.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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La liberté ressemble à ces beaux cactus, qui, dit-on, ne fleurissent que tous les cent ans, mais qui, en réalité, sont souvent plusieurs années sans étaler au soleil leur splendide corolle de pourpre.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Si j'aime les peintres et les sculpteurs, - ce n'est pas pour ce qu'ils font; - c'est à cause de ce qu'ils aiment, de ce qu'ils admirent, de ce qu'ils regardent infatigablement comme moi; - c'est parce qu'ils sont de ceux que Dieu met dans le secret de la nature et auxquels il donne gratis entrée au spectacle de ces splendeurs.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Les fanatiques appellent souvent athée, non un homme qui nie l'existence d'un Dieu; mais celui qui refuse de croire au Dieu qu'ils ont inventé, auquel ils prêtent leurs petites passions et leur grande méchanceté, et dont ils font leur pourvoyeur. Je crois au Dieu qui a fait les hommes et non au Dieu que les hommes ont fait.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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On est plus riche en mangeant du pain, du fromage de chèvre et des fruits et en buvant de l'eau, le tout acquis avec peu de travail et point du tout de soucis, qu'en mangeant des faisans truffés et buvant du château-yquem qui coûte une bataille, un travail fiévreux, et des nuits sans sommeil.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Il en est presque toujours de même des affaires et de la politique. On parle et on agit en rond; beaucoup de mouvement et peu de chemin.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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La vie est comme une de ces grandes danses en rond qu'exécutent les enfants dans les jardins publics et où ils se tiennent tous par la main. Celui qui veut sortir du rond réunit les mains de ses deux voisins de droite et de gauche, en retirant les siennes, et le rond continue sans qu'on ait rompu la mesure un seul instant.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Les vieillards sont des amis qui s'en vont, il faut au moins les reconduire poliment.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Les bonheurs durables sont ceux entre lesquels et nous il y a beaucoup de chemin à faire, - ceux qui reculent à mesure que nous avançons.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Pour que les choses qui nous paraissent belles et riantes ne changent pas d'aspect, il faut ne pas pénétrer, ne pas entrer au milieu d'elles; - il faut rester en face, et le plus souvent les voir d'un peu loin.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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L'air renfrogné, la mauvaise humeur et la morgue ne composent pas la sagesse et n'en sont pas toujours une enseigne très sûre. La sagesse est la santé de l'esprit et du coeur; elle doit rendre heureux et gai.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Je connais un homme qui a passé toute sa vie à chercher un ami. - Tout le monde veut avoir un ami, mais personne ne s'occupe d'en être un. Entre deux amis, comme entre deux amants, il y en a un qui aime et l'autre qui est aimé.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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L'ennemi de l'homme, c'est l'homme lui-même. C'est lui-même qui a imaginé de placer son malheur dans des choses inévitables, et son bonheur dans des choses impossibles. Pour nous tous, le bonheur sur la terre, c'est ce que nous n'avons pas ou ce que nous n'avons plus.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Il me parait prouvé, après tant de siècles et de discours envolés, et tant d'hectares de papier noirci, que l'homme ne peut changer et ne changera pas, - et qu'alors, pour ne pas l'humilier, il faut que ce soit la sagesse qui change; - il faut lui faire une sagesse possible et des vertus à sa taille.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 15/12/2020

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Le faible de M. Lauter était une grande prétention à la force et au stoïcisme. Cette prétention n'était nullement justifiée, et n'avait pour prétexte que l'admiration qu'inspirent naturellement les qualités que l'on n'a pas, et, entre les qualités que l'on n'a pas, celles dont on est le plus éloigné. De cette admiration on passe graduellement - au regret de ne les avoir pas, - au désir de les acquérir, - à la conviction de les posséder, - à la vanité de s'en parer.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Geneviève (1838)

Ajoutée par Savinien le 08/01/2018

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S'il est des gens réellement malheureux, il est juste également de dire que la plupart des hommes construisent laborieusement l'édifice de leur malheur, et bâtissent, comme on dit, des cachots en Espagne. La plupart des hommes font consister le bonheur dans ce qu'ils n'ont pas, sans autre raison que ceci, qu'ils ne l'ont pas, ou qu'un autre le possède. On a dit avec raison: « On regarde l'envers de sa vie et l'endroit de la vie des autres! »


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Les femmes (1853)

Ajoutée par Savinien le 27/03/2016

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Votre femme est une rose, disait-on à un poète aveugle. - Je m'en doutais aux épines, répondit-il.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Les femmes (1853)

Ajoutée par Savinien le 27/03/2016

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Entre la nouveauté et l'habitude, l'une attrait invincible, l'autre lien puissant, il y a à franchir un abîme dans lequel l'amour tombe et périt presque toujours.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Les femmes (1853)

Ajoutée par Savinien le 27/03/2016

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Une femme qui aime un homme d'esprit l'aime moins pour l'esprit qu'il a que pour l'esprit qu'on lui trouve.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Les femmes (1853)

Ajoutée par Savinien le 01/03/2016

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C'est une terrible position que celle d'un mari: - tout ce qu'il donne à sa femme, il doit le donner; tout ce qu'il possède est à elle plus qu'à lui, car le partage égal le ferait déclarer égoïste, et jamais il n'arrivera à passer pour généreux dans l'esprit de sa femme, - de même qu'on n'est pas vertueux pour ne pas voler.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Les femmes (1853)

Ajoutée par Savinien le 01/03/2016

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L'amour qu'on éprouve est tout en soi, la personne aimée n'est que le prétexte. Quelle que soit la beauté de la musique, elle laisse un sourd insensible. Boileau, après son affaire avec le dindon, fit la satire contre les femmes, et, ce qui est encore pis, une vingtaine de très mauvais vers en l'honneur de je ne sais quelle Sylvie. Je dis ce qui est encore pis, car on peut dire très bien du mal des femmes en les aimant beaucoup; mais c'est mauvais signe d'en dire si mal du bien.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Les femmes (1853)

Ajoutée par Savinien le 01/03/2016

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On ne prouve rien aux femmes; elles ne croient qu'avec le coeur; c'est donc la persuasion qu'il faut employer avec elles - ou plutôt, il faut leur plaire, car elles se laissent convaincre par celui qui raisonne et non par ses raisonnements. Accumulez en causant avec une femme les preuves les plus fortes, les plus irréfutables, - puis, quand vous en avez amassé et produit de quoi convaincre sans répliquer une assemblée de docteurs en théologie, cherchez encore, triplez, décuplez, centuplez vos preuves, après quoi la femme vous dira froidement: « Qu'est-ce que cela prouve? »


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Les femmes (1853)

Ajoutée par Savinien le 26/02/2016

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Nous commençons à mourir bien plus tôt qu'on ne se plaît à le croire. - Nous commençons à mourir à la première dent qui tombe, au premier cheveu qui blanchit. - Heureusement qu'on meurt assez longtemps. - Quelques-uns meurent progressivement en commençant par l'extérieur: la vie, assiégée par le néant lorsqu'elle est obligée d'abandonner les ouvrages avancés, se réfugie dans les murailles et ensuite dans la citadelle, c'est-à-dire dans le coeur. - D'autres, au contraires, meurent d'abord par le coeur, et promènent pendant trente ans un mort dans une peau vivante. Sachez reconnaître les vivants.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Les femmes (1853)

Ajoutée par Savinien le 26/02/2016

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Tout homme de bonne foi qui se voudra rappeler les diverses opinions qu'il a eues sur les femmes depuis son enfance jusqu'à sa vieillesse y trouvera un étrange chaos et verra qu'il n'est pas beaucoup plus avancé que le premier jour, et que, s'il pouvait recoudre une autre existence au bout de celle qui lui a été donnée à dépenser, il aurait encore à apprendre pendant tout le temps de cette seconde vie, et ne saurait rien quand elle prendrait fin à son tour.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Les femmes (1853)

Ajoutée par Savinien le 26/02/2016

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Le monde ne pardonne pas volontiers que l'on soit heureux et que l'on se passe de lui.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 06/08/2013

 

Il existe à l'usage des femmes tout un dictionnaire de sous-entendus. Celui qui n'entend pas et qui ne parle pas cette langue doit renoncer au commerce des femmes, - j'entends des vraies femmes, - il est condamné à celles qui appellent un chat un chat, et les sentiments par leur nom. Je ne sais rien d'aussi intéressant qu'une conversation dans cette langue, conversation où ce qui s'est dit n'a aucune valeur, où il ne s'est pas dit un mot de ce qui s'est entendu, et où on a, de part et d'autre, parfaitement entendu tout ce qui ne s'est pas dit.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 06/08/2013

 

L'amour, c'est ce que Dieu a créé le soir du septième jour, après tout le reste, pour donner le mouvement et la vie à son oeuvre.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 05/08/2013

 

S'il y a des hommes que les femmes n'aiment pas, il n'y en a guère dont elles n'aiment l'amour. - Jamais elles n'imaginent une vertu qui consiste à n'exister que pour un seul. - Non, la femme la plus héroïquement constante veut bien n'être qu'à un seul, mais elle voudrait que tous les autres en mourussent de chagrin.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 05/08/2013

 

A l'heure où l'on sonne à l'église la dernière prière, au loin silencieux, du sol on voit monter comme une vapeur grise, sortant de l'herbe et s'élevant aux cieux; c'est l'encens qu'exhale la terre, c'est la solennelle prière de la création entière au Créateur: chaque fleur, chaque plante y mêle son odeur, la campanule bleue en fleur dans nos prairies, l'alpen-rose, le pied dans la neige des monts, et le grand cactus rouge, hôte des Arabies, et les algues des mers dans leurs gouffres sans fonds, l'oiseau son dernier chant au bord de sa demeure, et l'homme des pensers qu'il ne sait qu'à cette heure.
Ce nuage divin, formé de tant d'amours, monte au trône de Dieu, dîme reconnaissante de ce que doit la terre à sa bonté puissante, s'étend... et c'est ainsi que finissent les jours.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Geneviève (1838)

Ajoutée par Savinien le 15/07/2013

 

Un jour, Mr Stoltz et elle restèrent seuls un quart d'heure, sans parler. Au bout de ce quart d'heure, tous deux comprirent la difficulté de la situation, et Mr Stoltz dit, comme s'il eût mis un quart d'heure à méditer cette pensée hardie: « Il fait bien mauvais temps aujourd'hui », qui signifie tout simplement: « Je vous aime, je vous désire, je vous adore. » On ne se dit: « Je vous aime » en propres termes, que quand on a épuisé toutes les autres manières de le dire; et il y en a tant, que l'on n'arrive quelquefois à dire le mot que lorsqu'on ne sent plus la chose et que le mot est devenu un mensonge.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Geneviève (1838)

Ajoutée par Savinien le 15/07/2013

 

Je n'ai jamais trouvé irréparable le temps qui s'en va, et il est toujours en ma puissance de revoir les jours passés. Nous disons que le temps passe, comme il semble que les arbres s'enfuient en déroute sur les deux rives d'un fleuve dont le courant nous entraîne. Le temps est immobile, et c'est l'homme qui passe; mais il peut, quand cela lui plaît, revenir sur ses pas et parcourir de nouveau la partie de la rive où il a trouvé les plus belles fleurs et les plus doux parfums. Il peut revenir encore entendre cet oiseau qui chantait dans l'aubépine en fleurs quand il a passé la première fois. Cette puissance magique est ce qu'on appelle le souvenir.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Clotilde (1839)

Ajoutée par Savinien le 08/07/2013

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J'aime la nuit. A cette heure, l'homme qui veille possède à lui seul tout ce que, le jour, il lui faut partager avec tout le monde.
La lune est à lui avec ses bleuâtres clartés.
C'est pour lui seul que les acacias ouvrent leurs petites cassolettes blanches pleines de parfums.
A lui tout seul est cette belle voûte bleue du ciel avec ses étoiles d'or.
Et les chants mélancoliques du rossignol dans les chèvrefeuilles en fleurs.
Et, comme si ce n'était pas assez encore d'hériter ainsi, pendant plusieurs heures, de tous les gens qui dorment, le poète qui veille voit pour lui la nature se remplir de créations nouvelles.
Les peupliers deviennent une longue file de grands fantômes noirs.
Le vent, dans les feuilles, lui dit des choses plus belles que la poésie et la musique n'en peuvent exprimer.
Les ombres de ses journées lui apparaissent, et ses amours morts se réveillent et viennent peupler avec lui cette terre dont il est le roi - jusqu'au jour.
Les vers luisants s'allument dans l'herbe comme les étoiles dans le ciel.
Tout se pare et s'embellit.
La nature, qui se trouvait suffisante le jour pour tous les hommes réunis, revêt pour le poète seul de plus magnifiques atours. C'est que le monde entier, c'est la foule; le poète, c'est l'amant...


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Clotilde (1839)

Ajoutée par Savinien le 08/07/2013

 

La grandeur des grands hommes est faite plus d'à moitié de la petitesse des autres.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 24/06/2013

 

J'ai vu deux révolutions politiques à l'âge de quarante ans que j'ai aujourd'hui. J'en verrai au moins encore une, et il est probable que je dirai après la troisième ce que j'ai dû dire après les deux autres: « On n'attaque pas les abus pour les renverser, mais pour les conquérir. » Plus ça change, plus c'est la même chose.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 24/06/2013

 

J'avais dans un coin solitaire du jardin trois jacinthes que mon père avait plantées, et que la mort l'a empêché de voir fleurir. Chaque année, l'époque de leur floraison était pour moi une solennité, une fête funèbre et religieuse; c'était un mélancolique souvenir, qui renaissait et refleurissait tous les ans, et exhalait certaines pensées avec son parfum. Les oignons sont morts aussi, et rien ne vit plus que dans mon coeur.
Mais quel triste privilège a donc l'homme entre tous les êtres créés, de pouvoir ainsi, par le souvenir et la pensée, suivre ceux qu'il a aimés dans la tombe et s'y enfermer vivant avec les morts! Quel triste privilège! Et pourtant quel est celui de nous qui voudrait le perdre? Quel est celui qui voudrait oublier tout à fait?


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 24/06/2013

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La vie se partage en deux moitiés: l'une pleine d'espérances qui ne doivent pas se réaliser; l'autre, livrée aux regrets de bonheurs dont nous n'avons pas joui; car ce qui nous semblait si beau dans l'avenir, ce qui, lorsque nous l'avons atteint, ne nous a donné que désappointement et dégoût, reprend sa magie dans le passé. L'espérance et le souvenir ont le même charme et le même prestige: c'est l'éloignement.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 20/06/2013

 

On a beau apprendre tous les jours quelque chose, on finit par découvrir qu'on ne sait à peu près rien.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 20/06/2013

 

Etre libre, - mais j'entends tout à fait libre c'est-à-dire n'avoir ni à obéir ni à commander à personne, - et ne pas se laisser persuader par la vanité qu'il y a un des deux bouts de la chaîne où il y a plus de liberté qu'à l'autre bout.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 20/06/2013

 

Une des causes qui font surtout redouter la mort est un faux raisonnement: on pense, en présence de la maladie ou d'un danger quelconque, qu'il s'agit de mourir ou de ne pas mourir, - tandis qu'en réalité il s'agit de mourir aujourd'hui ou de mourir demain.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 19/06/2013

 

Il vient un âge où on ne peut plus être aimé, mais il n'en est pas où on ne puisse aimer - et c'est la moitié, plus que la moitié, du moins la meilleure moitié de l'amour que l'on conserve jusqu'à la fin.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 19/06/2013

 

Tout bonheur se compose pour au moins, la moitié de deux sensations tristes: - le souvenir de la privation dans le passé, la crainte de la perte dans l'avenir.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 19/06/2013

 

Femme, un peu de beauté, médiocrement d'esprit, et pas du tout de coeur, et tu seras heureuse si tu mets ton bonheur à gouverner les hommes.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 18/06/2013

 

Que d'heureux on pourrait faire avec tout le bonheur qui se perd et se gaspille dans le monde, par des gens qui en jouissent sans le sentir ni le comprendre?
Depuis que le monde existe, on fait des commentaires sur le bonheur, on le dissèque, on le discute, etc., et la vérité est que les gens les plus heureux sont ceux qui n'y ont jamais pensé, qui seraient fort embarrassés de dire ce que c'est que le bonheur, et qui en jouissent sans presque le connaître.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 18/06/2013

 

On ne peut s'empêcher de remarquer qu'on n'a jusqu'ici trouvé qu'un seul moyen de faire des hommes, et qu'on a inventé et invente tous les jours de nouvelles manières de les tuer.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 18/06/2013

 

J'ai beau me rappeler tous les voyages que j'ai lus, j'y vois toujours les grandes nouveautés que voici: les femmes se mettent des anneaux dans le nez, au lieu de se les mettre aux oreilles comme les nôtres; elles mettent sur leurs têtes des plumes de perroquet au lieu de plumes d'autruche. Elles sont un peu nues par en bas, ce qui paraît indécent aux Européennes, qui ne montrent à nu que la moitié supérieure du corps.
Les hommes sont fiers d'un grain ou de deux grains de girofle qu'on leur permet de porter pour leurs belles actions. Nous en rions comme des fous, nous autres Européens. Des clous de girofle! Bon Dieu! Se faire casser les bras et les jambes pour des clous de girofles. Réellement les sauvages sont bien drôles. A la bonne heure, nous, quand nous nous exposons au feu et au sabre, nous savons ce que nous faisons, nous qui sommes blancs, nous qui sommes éclairés et civilisés. Ah bien! Que l'on vienne nous offrir des clous de girofle, on serait bien reçu. Non, non, on nous permet de porter à une boutonnière de notre habit un petit morceau de ruban rouge; plus tard nous le nouons en rosette, mais tout le monde n'arrive pas là.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 17/06/2013

 

Que de belles fleurs au printemps de notre vie, et comme elles se sont fanées! Que de choses sont mortes en nous dont nous ne songeons pas à porter le deuil; loin de là nous prenons nos mutilations pour des retranchements utiles, nous nous enorgueillissons de nos pertes, nous appelons nos infirmités des vertus; l'estomac ne digère plus, nous nous disons sobres; notre sang est refroidi, nous nous disons revenus de l'amour, quand c'est l'amour qui s'en est allé de nous; nos cheveux, nos dents meurent, et nous ne pensons pas que nous devons mourir bientôt tout entiers. Nous nous agitons, nous nous tourmentons pour un avenir que tout nous raconte que nous ne verrons pas.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 17/06/2013

 

Ah! Je comprends maintenant cette joie promise à vos élus, et dont j'ai souri quelquefois ironiquement; cette joie ineffable de vous contempler face à face, je la comprends par les ravissements que me donne la contemplation des plus petits de vos ouvrages, de ceux que vous avez cachés sous l'herbe ou dans l'épaisseur des feuilles. Mon Dieu! Quand je me laisse aller à la contemplation de la nature, il me semble que vous n'êtes plus caché que par un voile presque transparent que le moindre souffle d'air peut lever. Mon Dieu que veulent les... gens qui vous demandent des miracles, et les autres... gens qui en racontent? Est-il un brin d'herbe qui ne soit un miracle bien au-dessus de toutes les mythologies de tous les temps et de toutes les nations. Mon Dieu! Le moindre des insectes ne me parle-t-il pas mieux de vous et de votre puissance, que ces avocats ridicules qui ont la hardiesse de vous défendre comme un accusé, et disent sur vous tant de sottises et d'absurdités.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 17/06/2013

 

L'architecture, dans sa plus grande magnificence, a inventé le chapiteau corinthien, qui n'est que l'imitation imparfaite de cinq ou six feuilles d'acanthe. D'où vient qu'on paie si cher l'imitation de ce qui ne coûte rien? C'est qu'on n'aime à posséder les choses que pour humilier ceux qui ne les possèdent pas; c'est ce qui fait le prix des diamants, et ce qui fait tant de tort au ciel; c'est le secret des plus honteux sentiments des hommes.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 13/06/2013

 

Cette maison que nous habitons a été bâtie pour un homme mort depuis longtemps, par des maçons qui sont morts. Ces arbres sous lesquels nous rêvons ont été plantés par des jardiniers qui sont morts. Les tableaux dont nous ornons nos logis ont été peints par des morts. Nos habits, nos souliers sont faits avec les poils ou la peau d'animaux qui sont morts. Le bateau sur lequel vous vous promenez entre les rives vertes, c'est un arbre mort qui en fournit les planches. Ce feu devant lequel vous causez est alimenté par des membres de cadavres d'arbres. Vos festins joyeux, vos repas de chaque jour, offrent à vos yeux et à votre appétit des cadavres d'animaux morts. Ce vin, dont vous vantez la vieillesse vous rappelle que celui qui l'a récolté, que celui qui a fait les tonneaux, que celui qui l'a mis en bouteille, et que tous ceux qui vivaient alors sont morts. Et le soir, quand vous allez au théâtre voir représenter Cinna ou Mithridate, ces personnages que vous regardez, ne sont-ce pas des morts que vous évoquez pour qu'ils viennent gambader devant vous et vous divertir.
Quand ces pensées me viennent, mon ami, il me prend une profonde horreur de tout tracas, de toute agitation; je ne songe qu'à vivre tranquille, sans souci du présent ni de l'avenir, et j'admire l'extravagance de tous ces hommes qui, n'ayant que deux heures à dormir, passent ces deux heures à faire et à retourner leur lit. Il me semble alors voir dans tous ces gens qui se coudoient et s'évertuent, pour atteindre je ne sais quoi, des fous furieux, et je suis de l'avis de ce philosophe qui prétendait avoir découvert la véritable raison pour laquelle dans toutes les grandes villes il y a un hôpital pour les insensés; c'est que, en y enfermant quelques pauvres diables sous le nom de fous, on fait croire aux étrangers que ceux qui sont hors de cet hôpital ne le sont pas.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 13/06/2013

 

C'est une singulière inquiétude de l'esprit que l'amour des voyages, et les voyageurs sont d'étranges gens qui s'en vont à de grandes distances, et à grands frais, pour voir des choses nouvelles, sans avoir pris la peine de regarder à leurs pieds ni sur leurs têtes, où il se passe tant de choses extraordinaires et aussi inconnues qu'on le puisse désirer. [...] Sous quelque partie du ciel qu'ils demeurent, de quelque façon qu'ils s'habillent ou ne s'habillent pas, les hommes vivent sur quatre ou cinq passions toujours les mêmes, qui ne varient pas dans le fond et très peu dans la forme. [...] Bizarre manie que celle qui fait que la plupart des hommes ferment les yeux sur tout ce qui les entoure, et ne les daignent ouvrir qu'a cinq cents lieues de leur pays.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 13/06/2013

 

Si vous êtes un peu déshabitué, mon ami, de mesurer l'importance des choses à la taille de ceux qui les font, vous m'avouerez qu'il n'y a aucune différence entre ces insectes qui vivent sous l'herbe et les hommes qui marchent dessus. Si la taille est d'une si grande importance, les chevaux, les boeufs, les chameaux et les éléphants sont bien au-dessus des hommes. Est-il, dans les fastes de la gloire militaire des hommes, une bataille qui se puisse raconter autrement que celle de ces fourmis que nous avons sous les yeux? Et quand on pense que le souverain créateur et le maître des hommes et des fourmis les voit de si haut, croyez-vous que les uns aient plus d'importance que les autres à ses yeux. Combien d'hommes souriraient en nous voyant regarder des fourmis, qui pensent que Dieu a sans cesse les regards sur eux et passe son éternité à se préoccuper de ce qu'ils pensent de lui.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 12/06/2013

 

Quand je cherche à me rappeler tous les bonheurs de ma vie, je reconnais qu'il n'y en a guère que j'aie prévus et atteints à la course.
Les bonheurs sont comme le gibier: quand on les vise de trop loin, on les manque.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 12/06/2013

 

Le pauvre a, dans toute ville un peu habitée, une bibliothèque publique, et conséquemment à lui, de quinze à vingt mille volumes: qu'il devienne riche, il achètera une bibliothèque et des livres à lui seul; par exemple il n'en aura que quatre ou cinq cents; mais que de joie et d'orgueil il en ressentira!
Vous êtes pauvre, la mer est à vous avec ses bruits solennels, les grandes voix de ses vents, l'aspect de ses imposantes colères et de ses calmes plus imposants encore; elle est à vous, mais elle est aussi aux autres; plus tard, quand à force de travail, d'ennuis, peut-être de bassesse, vous serez devenu plus ou moins riche, vous ferez construire un petit bassin de marbre dans votre jardin, ou du moins vous vous empresserez d'acheter et d'avoir chez vous un bocal avec deux poissons rouges.
Il y a des moments où je me demande si par hasard notre esprit ne serait pas ainsi tourné que nous appelions pauvreté ce qui est splendeur et richesse, et opulence ce qui est misère et dénuement.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 12/06/2013

 

Quelle étrange chose que la propriété dont les hommes sont si envieux! Quand je n'avais rien à moi, j'avais les forêts et les prairies, et la mer et le ciel avec les étoiles; depuis que j'ai acheté cette vieille maison et ce jardin, je n'ai plus que cette maison et ce jardin.
La propriété est un contrat par lequel vous renoncez à tout ce qui n'est pas renfermé entre quatre certaines murailles.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par Savinien le 11/06/2013

 

« Il pense bien; il a raison; c'est un homme de bon sens, » sont des formules destinées à exprimer, sous prétexte d'autrui, son admiration pour soi-même, « il pense bien, il a raison, c'est un homme de bon sens, » n'ayant jamais voulu dire que « il pense comme moi ».


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par jlm le 26/02/2013

 

On aime à tempérer l'admiration qu'on croit ne pouvoir refuser à un homme par quelque chose d'horrible ou de ridicule qu'on sait de lui, ce qui rétablit l'équilibre; et, tout en nous le montrant supérieur par un côté, nous rend cette supériorité d'un autre côté. Il n'est pas un seul homme, si élevé qu'il soit au-dessus des autres, que nous ne nous croyions supérieur à lui en quelque point.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: Les guêpes (1839)

Ajoutée par jlm le 18/03/2013

 

La femme que l'on obtient ressemble quelquefois si peu à celle qu'on a désirée, que ce serait une infidélité faite à la première que de continuer à aimer la seconde.


Par: Alphonse Karr

Extrait de: En fumant (1862)

Ajoutée par jlm le 12/11/2012

 

Je disais un jour à une femme qui se plaignait d'un infidèle: « La plus charmante femme du monde finit toujours par s'apercevoir que la première venue a un avantage sur elle, c'est d'être une autre. »


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par jlm le 02/04/2013

 

On recommande souvent de respecter le malheur; - Et le bonheur donc! C'est lui qui est rare, c'est lui qui est fragile, c'est lui qui a besoin d'être respecté.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par jlm le 13/11/2013

 

On appelle volontiers meilleur ce qu'on n'a pas. L'homme a adroitement placé son bonheur dans des choses impossibles et son malheur dans des choses inévitables.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par jlm le 12/11/2012

 

L'opposé de la débauche, ce n'est pas la pruderie, ce n'est pas l'austérité, ce n'est pas l'abstinence: c'est l'amour.


Par: Alphonse Karr

Ajoutée par jlm le 05/08/2013