Citations de Raphaël, de Alphonse de Lamartine
10 Citations
Jamais cette effusion de mon âme ne tarissait ou ne se refroidissait. Si le firmament n'eût été qu'une page, et que Dieu m'eût dit de la remplir de mon amour, cette page n'aurait pas contenu tout ce que je sentais se dire en moi! Je ne m'arrêtais qu'après que les quatre feuilles étaient remplies, et il me semblait toujours n'avoir rien dit! C'est qu'en effet je n'avais rien dit, car qu'étaient ces quatre feuilles pour contenir l'infini?
Extrait de: Raphaël (1849)
Ajoutée par Savinien le 14/04/2023
Il y a deux mémoires: la mémoire des sens, qui s'use avec les sens et qui laisse perdre les choses périssables, et la mémoire de l'âme, pour qui le temps n'existe pas, qui revoit à la fois tous les points du passé et du présent de son existence, et qui a, comme l'âme elle-même, l'ubiquité, l'universalité et l'immortalité de l'esprit. Rassurez-vous, vous qui aimez, le temps n'a de puissance que sur les heures, aucune sur les sentiments.
Extrait de: Raphaël (1849)
Ajoutée par Savinien le 14/04/2023
Il n'y a ni aujourd'hui ni demain dans les retentissements puissants de la mémoire, il n'y a que toujours. Celui qui ne sent plus n'a jamais senti!
Extrait de: Raphaël (1849)
Ajoutée par Savinien le 14/04/2023
Oh! Qui n'a pas eu ainsi dans sa vie de ces bonheurs sans sécurité et sans lendemain, où la vie se concentre dans une heure qu'on voudrait rendre éternelle et qu'on sent échapper minute à minute, en écoutant le balancier de la pendule qui bat la seconde, en regardant l'aiguille qui dévore l'heure sur le cadran, en sentant la roue de la voiture dont chaque tour abrège l'espace, ou en écoutant le bruit d'une proue qui laisse le flot en arrière et qui vous approche du bord où il faudra descendre du ciel de vos rêves sur la grève dure et froide de la réalité!
Extrait de: Raphaël (1849)
Ajoutée par Savinien le 14/04/2023
Je ne sais pas qui a écrit cette musique; mais qui que ce soit, qu'il soit béni pour avoir exprimé, par quelques notes, cet infini de la tristesse humaine, dans le gémissement mélodieux d'une voix! Depuis ce jour, il ne m'a plus été possible d'entendre les premières mesures de cet air sans m'enfuir comme un homme poursuivi par une ombre, et quand je sens le besoin d'ouvrir mon coeur par une larme, je me chante intérieurement à moi-même le refrain plaintif, et je me sens prêt à pleurer, moi qui ne pleure plus!
Extrait de: Raphaël (1849)
Ajoutée par Savinien le 14/04/2023
Je n'étais pas pressé de la revoir, d'entendre sa voix, de me rapprocher d'elle, de m'entretenir en liberté avec celle qui était déjà toute ma pensée et toute ma vie. Je l'avais vue; je l'emportais partout avec moi: de près, de loin, absente, présente, je la possédais; tout le reste m'était indifférent. L'amour complet est patient, parce qu'il est absolu et qu'il sent qu'il durera autant que la vie. Je défiais l'univers de m'arracher cette image sans m'arracher mon coeur.
Extrait de: Raphaël (1849)
Ajoutée par Savinien le 14/04/2023
L'homme est tellement créé pour l'amour, qu'il ne se sent homme que du jour où il a la conscience d'aimer pleinement. Jusque-là il cherche, il s'inquiète, il s'agite, il erre dans ses pensées. De ce moment il s'arrête, il se repose, il est au fond de sa destinée.
Extrait de: Raphaël (1849)
Ajoutée par Savinien le 14/04/2023
Il y a de ces êtres qui rayonnent, qui éblouissent, qui entraînent tout dans leur sphère d'attraction sans y penser, sans le vouloir, sans le savoir même. On dirait que certaines natures ont un système, comme les astres, et qu'elles font graviter autour d'elles les regards, les âmes et les pensées de leurs satellites. La beauté physique ou morale est leur puissance, la fascination est leur chaîne, l'amour est leur émanation. On les suit à travers la terre et jusqu'au ciel, où elles se perdent jeunes; quand elles ont disparu, l'oeil reste comme aveugle d'éblouissement.
Extrait de: Raphaël (1849)
Ajoutée par Savinien le 14/04/2023
Sa présence devait m'être douce, car son âme et la mienne se comprenaient par leur désenchantement. Souffrir de même, c'est bien mieux que jouir de même. La douleur a bien d'autres étreintes que le bonheur pour resserrer deux coeurs.
Extrait de: Raphaël (1849)
Ajoutée par Savinien le 14/04/2023
« Raphaël, lui disais-je, pourquoi n'écris-tu pas ?
- Bah! Me disait-il, est-ce que le vent écrit ce qu'il chante dans ces feuilles sonores sur nos têtes? Est-ce que la mer écrit les gémissements de ses grèves? Rien n'est beau de ce qui est écrit. Ce qu'il y a de plus divin dans le coeur de l'homme n'en sort jamais. Entre ce qu'on sent et ce qu'on exprime, ajoutait-il avec tristesse, il y a la même distance qu'entre l'âme et les vingt-quatre lettres d'un alphabet, c'est-à-dire l'infini. »
Extrait de: Raphaël (1849)
Ajoutée par Savinien le 14/04/2023