Citations de André Gide
40 Citations
L'appétit de savoir naît du doute. Cesse de croire et instruis-toi. L'on ne cherche jamais d'imposer qu'à défaut de preuves. Ne t'en laisse pas accroire. Ne te laisse pas imposer.
Par: André Gide
Extrait de: Les nouvelles nourritures terrestres (1935)
Ajoutée par Savinien le 13/01/2021
Quelle absurde conception du monde et de la vie parvient à causer les trois quarts de notre misère, et par attachement au passé se refuse à comprendre que la joie de demain n'est possible que si celle d'aujourd'hui cède la place, que chaque vague ne doit la beauté de sa courbe qu'au retrait de celle qui la précède, que chaque fleur se doit de faner pour son fruit, que celui-ci, s'il ne tombe et meurt, ne saurait assurer des floraisons nouvelles, de sorte que le printemps même prend appui sur le seuil de l'hiver.
Par: André Gide
Extrait de: Les nouvelles nourritures terrestres (1935)
Ajoutée par Savinien le 13/01/2021
Il m'a depuis longtemps paru que la joie était plus rare, plus difficile et plus belle que la tristesse. Et quand j'eus fait cette découverte, la plus importante sans doute qui se puisse faire durant cette vie, la joie devint pour moi non seulement (ce qu'elle était) un besoin naturel - mais bien encore une obligation morale. Il me parut que le meilleur et plus sûr moyen de répandre autour de soi le bonheur était d'en donner soi-même l'image, et je résolus d'être heureux.
Par: André Gide
Extrait de: Les nouvelles nourritures terrestres (1935)
Ajoutée par Savinien le 13/01/2021
Il y a sur terre de telles immensités de misère, de détresse, de gêne et d'horreur, que l'homme heureux n'y peut songer sans prendre honte de son bonheur.
Par: André Gide
Extrait de: Les nouvelles nourritures terrestres (1935)
Ajoutée par Savinien le 13/01/2021
Ou d'aller encore une fois, ô forêt pleine de mystère, - jusqu'à ce lieu que je connais, où, dans une eau morte et brunie, trempent et s'amollissent encore les feuilles des ans passés, les feuilles des printemps adorables.
C'est là que se reposent le mieux mes résolutions inutiles, et que se réduit à la fin, à peu de chose, ma pensée.
Par: André Gide
Extrait de: Paludes (1895)
Ajoutée par Savinien le 02/09/2014
Parfois, tant la splendeur de l'aurore était grande, nous avons cru pouvoir nous échapper au matin; nous avons voulu l'oublier; nous nous sommes glissés, comme des voleurs sous du chaume, non pour entrer, nous, mais pour sortir - subrepticement - et nous avons couru vers la plaine. Et le toit courait après nous. Il bondissait à la façon de cette cloche des légendes après ceux qui tentaient d'échapper au culte. Nous ne cessions d'en sentir le poids sur nos têtes. Nous en avions, pour le faire, porté déjà tous les matériaux; nous jaugions le poids de l'ensemble. Il courbait notre front, il voûtait nos épaules, - comme faisait à Sindbad tout le poids du Vieillard de la Mer. - On n'y prend pas garde d'abord; puis, c'est horrible; cela s'attache à nous par la seule vertu du poids. On ne s'en débarrasse pas. Il faut porter jusqu'à la fin toutes les idées qu'on soulève...
Par: André Gide
Extrait de: Paludes (1895)
Ajoutée par Savinien le 02/09/2014
Toutes les carrières sans profit pour soi sont horribles - celles qui ne rapportent que de l'argent -, et si peu qu'il faut recommencer sans cesse. Quelles stagnations! Au moment de la mort qu'auront-ils fait? Ils auront rempli leur place. - Je crois bien! Ils l'ont prise aussi petite qu'eux.
Par: André Gide
Extrait de: Paludes (1895)
Ajoutée par Savinien le 02/09/2014
Il y a des gens qui sont dehors tout de suite. La nature frappe à leur porte: elle ouvre sur l'immense plaine, où, sitôt qu'ils sont descendus, s'oublie et se perd leur demeure. Ils la retrouvent au soir, quand ils en ont besoin pour dormir; ils la retrouvent aisément. Ils pourraient, s'ils voulaient, s'endormir à la belle étoile, laisser leur maison tout un jour, - l'oublier même pour longtemps. - Si vous trouvez cela naturel, c'est que vous ne me comprenez pas bien. Etonnez-vous plus de ces choses... Je vous assure que, quant à nous, si nous envions ces habitants si libres, c'est parce que, chaque fois que nous avons bâti dans la peine quelque toit pour nous abriter, ce toit nous a suivis, s'est placé dès lors sur nos têtes; nous a préservés de la pluie, il est vrai, mais nous a caché le soleil.
Par: André Gide
Extrait de: Paludes (1895)
Ajoutée par Savinien le 01/09/2014
Nous n'usons pas notre mélancolie, à refaire chaque jour nos hiers nous n'usons pas nos maladies, nous n'y usons rien que nous-mêmes, et perdons chaque jour de la force. - Quelles prolongations du passé! - J'ai peur de la mort, chère Angèle. - Ne pourrons-nous jamais rien poser hors du temps - que nous ne soyons pas obligés de refaire. - Quelque oeuvre enfin qui n'ait plus besoin de nous pour durer. - Mais de tout ce que nous faisons, rien ne dure sitôt que nous ne l'entretenons plus. Et pourtant tous nos actes subsistent horriblement et pèsent. Ce qui pèse sur nous, c'est la nécessité de les refaire; il y a là quelque chose que je ne comprends plus bien.
Par: André Gide
Extrait de: Paludes (1895)
Ajoutée par Savinien le 28/08/2014
Il y a des choses que l'on recommence chaque jour, simplement parce qu'on n'a rien de mieux à faire; il n'y a là ni progrès, ni même entretien - mais on ne peut pourtant pas ne rien faire... C'est dans le temps le mouvement dans l'espace des fauves prisonniers ou celui des marées sur la plage.
Par: André Gide
Extrait de: Paludes (1895)
Ajoutée par Savinien le 26/08/2014
Mais non; il n'est nullement nécessaire d'être méchant pour blesser autrui. Et c'est bien là le plus tragique: que des êtres bons et qui s'aiment puissent s'endolorir et se navrer avec la meilleure volonté du monde.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par jlm le 21/10/2013
Le nombre de bêtises qu'une personne intelligente peut dire dans une journée n'est pas croyable. Et j'en dirais sans doute autant que les autres, si je ne me taisais plus souvent.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par jlm le 28/02/2013
Il y a quelque... romantisme à se désoler que les choses ne soient pas autrement qu'elles ne sont; c'est-à-dire qu'elles ne peuvent être. C'est sur le réel qu'il nous faut édifier notre sagesse, et non point sur l'imaginaire. Même la mort doit être admise par nous et nous devons nous élever jusqu'à la comprendre; jusqu'à comprendre que l'émerveillante beauté de ce monde vient de ceci précisément que rien n'y dure et que sans cesse ceci doit céder place et matière pour permettre à cela, qui n'a pas encore été, de se produire; le même, mais renouvelé, rajeuni; le même, et pourtant imperceptiblement plus voisin de cette perfection à laquelle il tend sans le savoir et dont se forme lentement le visage même de Dieu.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par jlm le 19/10/2013
Les lois et les censures compromettent la liberté de pensée bien moins que ne le fait la peur. Toute divergence d'opinion devient suspecte et seuls quelques très rares esprits ne se forcent pas à penser et juger « comme il faut ».
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par jlm le 21/05/2013
Celui qui agit comme tout le monde s'irrite nécessairement contre celui qui n'agit pas comme lui.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par jlm le 03/06/2013
Depuis trop longtemps je n'ose plus penser qu'à voix basse; et c'est une façon de mentir.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 09/05/2012
Toutes les opinions intéressées me sont suspectes. J'aime pouvoir penser librement et commence à craindre d'être refait dès qu'il me revient quelque avantage de l'opinion que je professe. C'est comme si j'acceptais un pot-de-vin.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 09/05/2012
Ce que l'on aurait pu faire se confond avec ce que l'on aurait dû faire, et l'emporte de beaucoup sur ce que l'on a fait. Appelons celà, pour plus de simplicité: des regrets.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 05/05/2012
Certains jours, la vie a si mauvais goût qu'on voudrait pouvoir la cracher.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 05/05/2012
Quel petit nombre d'heures, d'instants, chaque jour, sont vraiment occupés à vivre! Pour quelques triomphantes oasis, quels immenses déserts à traverser!
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 05/05/2012
Sans les poussières qu'il éclaire le rayon ne serait pas visible.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 05/05/2012
Ce n'est pas toujours en s'obstinant sur une difficulté et en s'y achoppant, qu'on en triomphe; mais bien parfois en travaillant celle d'à côté. Certains êtres et certaines choses demandent à être abordés de biais.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 05/05/2012
Hier soir un coucher de soleil ineffablement étrange et beau; ciel encombré de brumes roses, orangées; je l'admirai surtout, au passage du pont de Grenelle, reflété par la Seine chargée de chalands; tout fondait dans une harmonie chaude et tendre. [...] Pourtant, pensai-je, certains voyagent au loin pour ne rien rencontrer de plus beau. Mais l'homme, le plus souvent, ne reconnaît point la beauté qu'il ne l'achète, et c'est pourquoi l'offre de Dieu reste si souvent dédaignée.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 30/04/2012
Ne pas dédaigner les petites victoires; dès qu'il s'agit de la volonté, le beaucoup n'est que la patiente addition du peu.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 30/04/2012
Comme nous sommes ridicules! Déjà j'ai tant de mal à me prendre au sérieux, quand je suis seul... Chacun de nous m'apparaît ici comme dans la salle d'essayage d'un tailleur, entouré de glaces qui s'entre-reflètent, et quêtant dans l'esprit d'autrui son image multipliée. Malgré soi l'on prend posture; l'on se cambre; on voudrait tant pouvoir se voir de dos!
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 29/04/2012
Il n'y a pas de différence essentielle entre l'honnête homme et le gredin. Et que l'honnête homme puisse devenir un gredin voilà le terrible et le vrai. Dans la voie du « péché » il n'y a que le premier pas qui coûte.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 29/04/2012
Le nombre des choses qu'il n'y a pas lieu de dire augmente pour moi chaque jour.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 29/04/2012
Les trois quarts de la vie se passent à préparer le bonheur; mais il ne faut pas croire que pour cela le dernier quart se passe à en jouir. On a trop pris l'habitude de ce genre de préparations, et, quand on a fini de préparer pour soi, on prépare pour les autres; de sorte que le moment propice est remisé par-delà la mort. Voilà pourquoi l'on a tant besoin de croire à une vie éternelle. Une grande sagesse serait de comprendre que le vrai bonheur se passe de préparations; ou du moins il n'en veut qu'une intime.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 29/04/2012
La vérité est de Dieu; l'idée est de l'homme. Certains confondent idées et vérités.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 29/04/2012
Les choses les plus belles sont celles que souffle la folie et qu'écrit la raison. Il faut demeurer entre les deux, tout près de la folie quand on rêve, tout près de la raison quand on écrit.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 28/04/2012
Nous ne perdrons aucune de nos inquiétudes. Leur cause est en nous, non au-dehors. Notre esprit est ainsi fait que tout l'ébranle, et ce n'est qu'en la solitude qu'il trouve un peu de quiétude. Alors c'est Dieu qui l'inquiète.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 28/04/2012
« Ne jugez point. » Tout jugement porte en soi le témoignage de notre faiblesse.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 28/04/2012
Un esprit incapable de révolte et d'indignation est un esprit sans valeur... Il faut prendre son parti de bien des choses mais pas facilement.
Par: André Gide
Extrait de: Journal (Gide)
Ajoutée par Savinien le 27/09/2011
Plus de sources jaillissent de la terre que nous n'avons de soifs pour les boire.
Par: André Gide
Extrait de: Les nourritures terrestres (1897)
Ajoutée par Savinien le 27/09/2011
Il y a des matins où l'on se lève avant l'aube, plein de torpeur. O gris matin d'automne! Où l'âme s'éveille non reposée, si lasse et d'une si brûlante veillée, qu'elle souhaite dormir encore et suppute le goût de la mort.
Par: André Gide
Extrait de: Les nourritures terrestres (1897)
Ajoutée par Savinien le 27/09/2011
Ne me dites pas trop que je dois aux événements mon bonheur; évidemment ils me furent propices, mais je ne me suis pas servi d'eux. Ne croyez pas que mon bonheur soit fait à l'aide de richesses; mon coeur sans nulle attache sur la terre est resté pauvre, et je mourrai facilement. Mon bonheur est fait de ferveur. A travers indistinctement toute chose, j'ai éperdument adoré.
Par: André Gide
Extrait de: Les nourritures terrestres (1897)
Ajoutée par Savinien le 26/09/2011
Le malheur de chacun vient de ce que c'est toujours chacun qui regarde et qu'il subordonne à lui ce qu'il voit. Ce n'est pas pour nous, c'est pour elle que chaque chose est importante. Que ton oeil soit la chose regardée.
Par: André Gide
Extrait de: Les nourritures terrestres (1897)
Ajoutée par Savinien le 26/09/2011
Le sage est celui qui s'étonne de tout.
Par: André Gide
Extrait de: Les nourritures terrestres (1897)
Ajoutée par Savinien le 26/09/2011
Regarde le soir comme si le jour y devait mourir; et le matin comme si toute chose y naissait.
Par: André Gide
Extrait de: Les nourritures terrestres (1897)
Ajoutée par Savinien le 26/09/2011
Nos actes s'attachent à nous comme sa lueur au phosphore. Ils nous consument, il est vrai, mais ils nous font notre splendeur.
Par: André Gide
Extrait de: Les nourritures terrestres (1897)
Ajoutée par Savinien le 26/09/2011