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Année de parution : 1669
Joué sans interruption en public, le 5 février 1669.
On sait toutes les traverses que cet admirable ouvrage essuya. On en voit le détail dans la préface de l’auteur, au devant du Tartuffe. Les trois premiers actes avaient été représentés à Versailles, devant le roi, le 12 mai 1664. Ce n’était pas la première fois que Louis XIV, qui sentait le prix des ouvrages de Molière, avait voulu les voir avant qu’ils fussent achevés ; il fut fort content de ce commencement, et par conséquent la cour le fut aussi.
Il fut joué, le 29 novembre de la même année, au Raincy, devant le grand Condé. Dès lors les rivaux se réveillèrent ; les dévots commencèrent à faire du bruit ; les faux zélés (l’espèce d’hommes la plus dangereuse) crièrent contre Molière, et séduisirent même quelques gens de bien. Molière, voyant tant d’ennemis qui allaient attaquer sa personne encore plus que sa pièce, voulut laisser ces premières fureurs se calmer : il fut un an sans donner le Tartuffe ; il le lisait seulement dans quelques maisons choisies, où la superstition ne dominait pas.
Aujourd’hui, bien des gens regardent comme une leçon de morale cette même pièce qu’on trouvait autrefois si scandaleuse. On peut hardiment avancer que les discours de Cléante, dans lesquels la vertu vraie et éclairée est opposée à la dévotion imbécile d’Orgon, sont, à quelques expressions près, le plus fort et le plus élégant sermon que nous ayons en notre langue ; et c’est peut-être ce qui révolta davantage ceux qui parlaient moins bien dans la chaire que Molière au théâtre.