Citations de Consolations et poésies diverses, de François de La Rochefoucauld

7 Citations

La vie et la mort


Qu'est-ce donc que la vie? Un siècle de misère.
L'homme crie en naissant et pleure avec sa mère;
Il croît, et mille maux l'assiègent tous les ans.
Plus tard on s'enrichit de la mort des parents;
On choisit une amie; on lui plait; on l'adore;
Elle est vite infidèle: on la regrette encore.
L'homme est ambitieux, il aspire aux honneurs;
Mais à peine on le voit atteindre les grandeurs,
Il tombe et loin du monde il va cacher ses veilles.
Il lui reste un ami: soudain à ses oreilles,
Il entend retentir ces vieux mots: « Il est mort. »
Voilà toute la vie et c'est là notre sort.


Par: François de La Rochefoucauld

Ajoutée par Savinien le 16/01/2011

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Epitaphe de Franklin


Ci-gît, comme un vieux livre, à reliure usée,
Sans ornements, sans titres, et brisée,
Le corps de l'imprimeur Franklin.
Tel est l'homme à sa fin.

Des vers il devient la pâture;
Mais jamais il ne périra.
Dans une édition belle, correcte et pure,
L'ouvrage reparaîtra.

Ah! Cette noble image
Sort du pinceau du bonhomme Franklin.
Ici l'allégorie a fait, dans son langage,
L'épitaphe du genre humain.


Par: François de La Rochefoucauld

Ajoutée par Savinien le 16/01/2011

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Eléonore


Dieu d'amour, vois Eléonore,
Fleur du printemps, rose de mai.
Telle est au lever de l'aurore,
La nymphe du bocage aimé.

Nous renaissons à sa parole;
Son oeil nous met à ses genoux;
Son souris enchante et console;
Son souffle est une âme pour nous.

La raison fléchit devant elle;
Elle nous fait tout notre esprit;
Loin d'elle le coeur est fidèle;
L'âme loin d'elle se flétrit.

C'est le poète qu'elle inspire,
Le philosophe qu'elle instruit,
Le solitaire qu'elle attire,
Et le sage qu'elle séduit.

Oui femme, ou fée enchanteresse,
Démon qui trouble, ange calmant,
Humble esclave, reine et maîtresse,
Et déesse de son amant.

Heureux qui cherche Eléonore,
Plus heureux qui l'approchera;
Demi-dieu celui qui l'adore,
Et dieu celui qu'elle aimera.


Par: François de La Rochefoucauld

Ajoutée par Savinien le 16/01/2011

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Les secrets


Les hommes, j'en conviens, cachent peu de secrets;
Ils ne gardent que ceux des autres;
Les femmes, déjouant bien mieux les indiscrets,
N'ont jamais trahi que les nôtres.

Mais on a bien raison,
Lorsqu'on prend leur défense:
« Un secret pèse trop », dit-on;
Pourquoi charger leur conscience?

Oui, je crois qu'en effet
Quelque chose les justifie:
Lorsqu'on livre un secret
Le sot est bien celui qui le confie.

Un vieux auteur l'a dit: « Confiez un secret
A la femme-modèle;
Elle y serait fidèle;
Mais sûr, elle en mourrait. »


Par: François de La Rochefoucauld

Ajoutée par Savinien le 16/01/2011

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Le tilleul


Qu'elle est douce la solitude,
Où croît la violette au pied du chèvrefeuille,
Qui de mon humble toit vient ombrager le seuil!
Et quelle douce quiétude,
Quand sans audace et sans effroi,
Je mets ma conscience entre le ciel et moi!

[...]

Que d'autres éprouvent l'envie
Et des richesses de la vie,
Et des succès du monde est des plaisirs humains:
Dans ma solitude que j'aime,
J'ai des amis avec moi-même;

Puis quelquefois, joignant les mains,
J'ai plus de charme, en mon humble prière,
A parler à mon Dieu qu'à parler à la terre;
Et je me dis sous mon tilleul:
Il est bon d'être seul.


Par: François de La Rochefoucauld

Ajoutée par Savinien le 15/01/2011

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En 1795


Mais avant de m'armer du fouet de la satire,
Moi, j'attends qu'un succès et m'anime et m'inspire,
Et qu'une oeuvre applaudie ait illustré mon nom.
Les vrais législateurs des états d'Apollon,
Avant d'offrir des lois à nos jeunes adeptes,
Ont su par leur exemple annoncer leurs préceptes.
Je veux avoir bien fait avant de critiquer,
Je veux avoir su rire avant de me moquer.


Par: François de La Rochefoucauld

Ajoutée par Savinien le 15/01/2011

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Le recueil des poésies qu'on a composées dans la vie pour soi, avec soi-même, avec soi seul, est peut-être le journal le plus vrai et le plus complet des sentiments les plus intimes et les plus profonds qu'on ait éprouvés. On se plait, en les relisant, à faire un retour sur le passé dont la conscience a souvent besoin; et ce n'est point par amour-propre qu'on les publie; c'est au contraire un acte de sincérité pour se montrer tel qu'on fut aux autres et à soi-même.


Par: François de La Rochefoucauld

Ajoutée par Savinien le 15/01/2011

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