Citations de Jean Racine

42 Citations

Acte IV, Scène 1


Je vais donc, puisqu'il faut que je me sacrifie,
Assurer à Pyrrhus le reste de ma vie;
Je vais, en recevant sa foi sur les autels,
L'engager à mon fils par des nœuds immortels.
Mais aussitôt ma main, à moi seule funeste,
D'une infidèle vie abrégera le reste,
Et sauvant ma vertu, rendra ce que je dois
À Pyrrhus, à mon fils, à mon époux, à moi.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 17/01/2021

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Acte III, Scène 8


Chère épouse, dit-il en essuyant mes larmes,
J'ignore quel succès le sort garde à mes armes;
Je te laisse mon fils pour gage de ma foi:
S'il me perd, je prétends qu'il me retrouve en toi.
Si d'un heureux hymen la mémoire t'est chère,
Montre au fils à quel point tu chérissais le père.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 17/01/2021

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Acte V, Scène 1


Devais-je, en lui faisant un récit trop sincère,
D'une indigne rougeur couvrir le front d'un père?
Vous seule avez percé ce mystère odieux.
Mon coeur pour s'épancher n'a que vous et les dieux.
Je n'ai pu vous cacher, jugez si je vous aime,
Tout ce que je voulais me cacher à moi-même.


Par: Jean Racine

Extrait de: Phèdre (1677)

Ajoutée par Savinien le 17/10/2020

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Acte IV, Scène 6


Ah! Douleur non encore éprouvée!
A quel nouveau tourment je me suis réservée!
Tout ce que j'ai souffert, mes craintes, mes transports,
La fureur de mes feux, l'horreur de mes remords,
Et d'un cruel refus l'insupportable injure,
N'était qu'un faible essai du tourment que j'endure.


Par: Jean Racine

Extrait de: Phèdre (1677)

Ajoutée par Savinien le 17/10/2020

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Acte III, Scène 3


Mourons: de tant d'horreurs qu'un trépas me délivre.
Est-ce un malheur si grand que de cesser de vivre?
La mort aux malheureux ne cause point d'effroi:
Je ne crains que le nom que je laisse après moi.


Par: Jean Racine

Extrait de: Phèdre (1677)

Ajoutée par Savinien le 17/10/2020

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Acte II, Scène 5


J'ai voulu te paraître odieuse, inhumaine;
Pour mieux te résister, j'ai recherché ta haine.
De quoi m'ont profité mes inutiles soins?
Tu me haïssais plus, je ne t'aimais pas moins;
Tes malheurs te prêtaient encor de nouveaux charmes.
J'ai langui, j'ai séché dans les feux, dans les larmes:
Il suffit de tes yeux pour t'en persuader,
Si tes yeux un moment pouvaient me regarder...


Par: Jean Racine

Extrait de: Phèdre (1677)

Ajoutée par Savinien le 17/10/2020

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Acte II, Scène 2


Moi qui, contre l'amour fièrement révolté,
Aux fers de ses captifs ai longtemps insulté;
Qui, des faibles mortels déplorant les naufrages,
Pensais toujours du bord contempler les orages;
Asservi maintenant sous la commune loi,
Par quel trouble me vois-je emporté loin de moi!
Un moment a vaincu mon audace imprudente:
Cette âme si superbe est enfin dépendante.
Depuis près de six mois, honteux, désespéré,
Portant partout le trait dont je suis déchiré,
Contre vous, contre moi, vainement je m'éprouve:
Présente, je vous fuis; absente, je vous trouve;
Dans le fond des forêts votre image me suit;
La lumière du jour, les ombres de la nuit,
Tout retrace à mes yeux les charmes que j'évite;
Tout vous livre à l'envi le rebelle Hippolyte.


Par: Jean Racine

Extrait de: Phèdre (1677)

Ajoutée par Savinien le 17/10/2020

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Acte II, Scène 8


Eh bien! De leur amour tu vois la violence,
Narcisse : elle a paru jusque dans son silence!
Elle aime mon rival, je ne puis l'ignorer;
Mais je mettrai ma joie à le désespérer.
Je me fais de sa peine une image charmante,
Et je l'ai vu douter du cœur de son amante.
Je la suis. Mon rival t'attend pour éclater:
Par de nouveaux soupçons, va, cours le tourmenter.
Et tandis qu'à mes yeux on le pleure, on l'adore,
Fais-lui payer bien cher un bonheur qu'il ignore.


Par: Jean Racine

Extrait de: Britannicus (1669)

Ajoutée par Savinien le 22/03/2020

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Acte III, Scène 7


Il fallait me taire et vous sauver.
Combien de fois, hélas! Puisqu'il faut vous le dire,
Mon cœur de son désordre allait-il vous instruire?
De combien de soupirs interrompant le cours
Ai-je évité vos yeux que je cherchais toujours?
Quel tourment de se taire en voyant ce qu'on aime,
De l'entendre gémir, de l'affliger soi-même,
Lorsque par un regard on peut le consoler!
Mais quels pleurs ce regard aurait-il fait couler!


Par: Jean Racine

Extrait de: Britannicus (1669)

Ajoutée par Savinien le 22/03/2020

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Acte II, Scène 2


Quoi qu'il en soit, ravi d'une si belle vue,
J'ai voulu lui parler, et ma voix s'est perdue:
Immobile, saisi d'un long étonnement,
Je l'ai laissé passer dans son appartement.
J'ai passé dans le mien. C'est là que, solitaire,
De son image en vain j'ai voulu me distraire.
Trop présente à mes yeux je croyais lui parler,
J'aimais jusqu'à ses pleurs que je faisais couler.


Par: Jean Racine

Extrait de: Britannicus (1669)

Ajoutée par Savinien le 22/03/2020

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Acte V, Scène 1


Cet ouvrage, Madame, est un coup d'Agrippine:
Elle a cru que ma perte entraînait sa ruine.
Grâce aux préventions de son esprit jaloux,
Nos plus grands ennemis ont combattu pour nous.
Je m'en fie aux transports qu'elle m'a fait paraître;
Je m'en fie à Burrhus; j'en crois même son maître:
Je crois qu'à mon exemple impuissant à trahir,
Il hait à coeur ouvert, ou cesse de haïr.

Seigneur, ne jugez pas de son coeur par le vôtre:
Sur des pas différents vous marchez l'un et l'autre.
Je ne connais Néron et la cour que d'un jour,
Mais, si j'ose le dire, hélas! Dans cette cour
Combien tout ce qu'on dit est loin de ce qu'on pense!
Que la bouche et le coeur sont peu d'intelligence!
Avec combien de joie on y trahit sa foi!
Quel séjour étranger et pour vous et pour moi!


Par: Jean Racine

Extrait de: Britannicus (1669)

Ajoutée par Savinien le 22/03/2020

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Acte III, Scène 1


Allons, Seigneur, enlevons Hermione.
Au travers des périls un grand cœur se fait jour.
Que ne peut l'amitié conduite par l'amour?
Allons de tous vos Grecs encourager le zèle.
Nos vaisseaux sont tout prêts, et le vent nous appelle.
Je sais de ce palais tous les détours obscurs;
Vous voyez que la mer en vient battre les murs,
Et cette nuit, sans peine, une secrète voie
Jusqu'en votre vaisseau conduira votre proie.

J'abuse, cher ami, de ton trop d'amitié
Mais pardonne à des maux dont toi seul as pitié;
Excuse un malheureux qui perd tout ce qu'il aime,
Que tout le monde hait, et qui se hait lui-même.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte III, Scène 2


Non, Madame: il vous aime, et je n'en doute plus.
Vos yeux ne font-ils pas tout ce qu'ils veulent faire?
Et vous ne vouliez pas sans doute lui déplaire.

Mais que puis-je, Seigneur? On a promis ma foi.
Lui ravirai-je un bien qu'il ne tient pas de moi?
L'amour ne règle pas le sort d'une princesse:
La gloire d'obéir est tout ce qu'on nous laisse.
Cependant je partais, et vous avez pu voir
Combien je relâchais pour vous de mon devoir.

Ah! Que vous saviez bien, cruelle... Mais, Madame,
Chacun peut à son choix disposer de son âme.
La vôtre était à vous. J'espérais; mais enfin
Vous l'avez pu donner sans me faire un larcin.
Je vous accuse aussi bien moins que la fortune.
Et pourquoi vous lasser d'une plainte importune?
Tel est votre devoir, je l'avoue; et le mien
Est de vous épargner un si triste entretien.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte III, Scène 7


Je sais de quels serments je romps pour vous les chaînes,
Combien je vais sur moi faire éclater de haines.
Je renvoie Hermione, et je mets sur son front,
Au lieu de ma couronne, un éternel affront.
Je vous conduis au temple où son hymen s'apprête,
Je vous ceins du bandeau préparé pour sa tête.
Mais ce n'est plus, Madame, une offre à dédaigner:
Je vous le dis, il faut ou périr ou régner.
Mon cœur, désespéré d'un an d'ingratitude,
Ne peut plus de son sort souffrir l'incertitude.
C'est craindre, menacer et gémir trop longtemps.
Je meurs si je vous perds, mais je meurs si j'attends.
Songez-y: je vous laisse, et je viendrai vous prendre
Pour vous mener au temple où ce fils doit m'attendre.
Et là vous me verrez, soumis ou furieux,
Vous couronner, Madame, ou le perdre à vos yeux.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte II, Scène 1


Si je le hais, Cléone! Il y va de ma gloire,
Après tant de bontés dont il perd la mémoire;
Lui qui me fut si cher, et qui m'a pu trahir,
Ah! Je l'ai trop aimé pour ne le point haïr!

Fuyez-le donc, Madame; et puisqu'on vous adore...

Ah! Laisse à ma fureur le temps de croître encore.
Contre mon ennemi laisse-moi m'assurer.
Cléone, avec horreur je m'en veux séparer.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte I, Scène 1


Hélas! Qui peut savoir le destin qui m'amène?
L'amour me fait ici chercher une inhumaine.
Mais qui sait ce qu'il doit ordonner de mon sort,
Et si je viens chercher ou la vie ou la mort?

Quoi? Votre âme à l'amour en esclave asservie
Se repose sur lui du soin de votre vie?
Par quel charme, oubliant tant de tourments soufferts,
Pouvez-vous consentir à rentrer dans ses fers?


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte II, Scène 2


Et vous le haïssez! Avouez-le, Madame,
L'amour n'est pas un feu qu'on renferme en une âme;
Tout nous trahit, la voix, le silence, les yeux,
Et les feux mal couverts n'en éclatent que mieux.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

Catégories:

Acte II, Scène 2


Eh bien! Régnez, cruel, contentez votre gloire:
Je ne dispute plus. J'attendais, pour vous croire,
Que cette même bouche, après mille serments
D'un amour qui devait unir tous nos moments,
Cette bouche, à mes yeux s'avouant infidèle,
M'ordonnât elle-même une absence éternelle.
Moi-même j'ai voulu vous entendre en ce lieu.
Je n'écoute plus rien, et pour jamais: adieu...
Pour jamais! Ah, Seigneur! Songez-vous en vous-même
Combien ce mot cruel est affreux quand on aime?


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte II, Scène 2


Bérénice me plut. Que ne fait point un cœur
Pour plaire à ce qu'il aime, et gagner son vainqueur!
Je prodiguai mon sang: tout fit place à mes armes;
Je revins triomphant. Mais le sang et les larmes
Ne me suffisaient pas pour mériter ses vœux:
J'entrepris le bonheur de mille malheureux;
On vit de toutes parts mes bontés se répandre,
Heureux, et plus heureux que tu ne peux comprendre,
Quand je pouvais paraître à ses yeux satisfaits
Chargé de mille coeurs conquis par mes bienfaits!
Je lui dois tout, Paulin. Récompense cruelle!
Tout ce que je lui dois va retomber sur elle.
Pour prix de tant de gloire et de tant de vertus,
Je lui dirai : « Partez, et ne me voyez plus. »


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte IV, Scène 5


Et c'est moi seul aussi qui pouvais me détruire.
Je pouvais vivre alors et me laisser séduire;
Mon cœur se gardait bien d'aller dans l'avenir
Chercher ce qui pouvait un jour nous désunir.
Je voulais qu'à mes voeux rien ne fût invincible,
Je n'examinais rien, j'espérais l'impossible.
Que sais-je? j'espérais de mourir à vos yeux,
Avant que d'en venir à ces cruels adieux.
Les obstacles semblaient renouveler ma flamme,
Tout l'empire parlait, mais la gloire, Madame,
Ne s'était point encore fait entendre à mon coeur
Du ton dont elle parle au coeur d'un empereur.
Je sais tous les tourments où ce dessein me livre,
Je sens bien que sans vous je ne saurais plus vivre,
Que mon cœur de moi-même est prêt à s'éloigner,
Mais il ne s'agit plus de vivre, il faut régner.


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte V, Scène 4


Eh bien! Voilà l'espoir que tu m'avais rendu,
Et tu vois le triomphe où j'étais attendu!
Bérénice partait justement irritée!
Pour ne la plus revoir, Titus l'avait quittée!
Qu'ai-je donc fait, grands dieux? Quel cours infortuné
A ma funeste vie aviez-vous destiné?
Tous mes moments ne sont qu'un éternel passage
De la crainte à l'espoir, de l'espoir à la rage.
Et je respire encore ? Bérénice! Titus!
Dieux cruels! De mes pleurs vous ne vous rirez plus.


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte IV, Scène 4


Et lorsque Bérénice arriva sur tes pas,
Ce que Rome en jugeait ne l'entendis-tu pas?
Faut-il donc tant de fois te le faire redire?
Ah lâche! Fais l'amour, et renonce à l'empire;
Au bout de l'univers va, cours te confiner,
Et fais place à des coeurs plus dignes de régner.
Sont-ce là ces projets de grandeur et de gloire
Qui devaient dans les coeurs consacrer ma mémoire?
Depuis huit jours je règne, et jusques à ce jour
Qu'ai-je fait pour l'honneur? J'ai tout fait pour l'amour.
D'un temps si précieux quel compte puis-je rendre?
Où sont ces heureux jours que je faisais attendre?
Quels pleurs ai-je séchés? Dans quels yeux satisfaits
Ai-je déjà goûté le fruit de mes bienfaits?
L'univers a-t-il vu changer ses destinées?
Sais-je combien le ciel m'a compté de journées?
Et de ce peu de jours si longtemps attendus,
Ah malheureux! Combien j'en ai déjà perdus!


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte I, Scène 2


Eh bien, Antiochus, es-tu toujours le même?
Pourrai-je, sans trembler, lui dire : « Je vous aime? »
Mais quoi ? Déjà je tremble, et mon coeur agité
Craint autant ce moment que je l'ai souhaité.
Bérénice autrefois m'ôta toute espérance;
Elle m'imposa même un éternel silence.
Je me suis tu cinq ans, et jusques à ce jour,
D'un voile d'amitié j'ai couvert mon amour.


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Je ne t'ai point aimé, cruel? Qu'ai-je donc fait?
J'ai dédaigné pour toi les vœux de tous nos princes;
Je t'ai cherché moi-même au fond de tes provinces;
J'y suis encore, malgré tes infidélités,
Et malgré tous mes grecs honteux de mes bontés.
Je leur ai commandé de cacher mon injure;
J'attendais en secret le retour d'un parjure;
J'ai cru que tôt ou tard, à ton devoir rendu,
Tu me rapporterais un cœur qui m'était dû.
Je t'aimais inconstant, qu'aurais-je fait fidèle?
Et même en ce moment où ta bouche cruelle
Vient si tranquillement m'annoncer le trépas,
Ingrat, je doute encore si je ne t'aime pas.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 13/03/2020

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Acte V, Scène 5


Quoi? Pyrrhus, je te rencontre encore?
Trouverai-je partout un rival que j'abhorre?
Percé de tant de coups, comment t'es-tu sauvé?
Tiens, tiens, voilà le coup que je t'ai réservé.
Mais que vois-je? A mes yeux Hermione l'embrasse!
Elle vient l'arracher au coup qui le menace?
Dieux! Quels affreux regards elle jette sur moi!
Quels démons, quels serpents traîne-t-elle après soi?
Eh bien! Filles d'enfer, vos mains sont-elles prêtes?
Pour qui sont ces serpents qui sifflent sur vos têtes?
A qui destinez-vous l'appareil qui vous suit?
Venez-vous m'enlever dans l'éternelle nuit?
Venez, à vos fureurs Oreste s'abandonne.
Mais non, retirez-vous, laissez faire Hermione:
L'ingrate mieux que vous saura me déchirer;
Et je lui porte enfin mon coeur à dévorer.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 03/09/2014

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Acte V, Scène 4


Que vois-je? Est-ce Hermione? Et que viens-je d'entendre?
Pour qui coule le sang que je viens de répandre?
Je suis, si je l'en crois, un traître, un assassin.
Est-ce Pyrrhus qui meurt? Et suis-je Oreste enfin?
Quoi? J'étouffe en mon coeur la raison qui m'éclaire,
J'assassine à regret un roi que je révère,
Je viole en un jour les droits des souverains,
Ceux des ambassadeurs, et tous ceux des humains,
Ceux même des autels où ma fureur l'assiège:
Je deviens parricide, assassin, sacrilège.
Pour qui? Pour une ingrate à qui je le promets,
Qui même, s'il ne meurt, ne me verra jamais,
Dont j'épouse la rage! Et quand je l'ai servie,
Elle me redemande et son sang et sa vie!
Elle l'aime! Et je suis un monstre furieux!
Je la vois pour jamais s'éloigner de mes yeux!
Et l'ingrate en fuyant me laisse pour salaire
Tous les noms odieux que j'ai pris pour lui plaire!


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 03/09/2014

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Acte IV, Scène 5


Achevez votre hymen, j'y consens; mais du moins
Ne forcez pas mes yeux d'en être les témoins.
Pour la dernière fois je vous parle peut-être.
Différez-le d'un jour, demain, vous serez maître...
Vous ne répondez point? Perfide, je le vois:
Tu comptes les moments que tu perds avec moi!
Ton coeur, impatient de revoir ta Troyenne,
Ne souffre qu'à regret qu'un autre t'entretienne.
Tu lui parles du coeur, tu la cherches des yeux.
Je ne te retiens plus, sauve-toi de ces lieux,
Va lui jurer la foi que tu m'avais jurée,
Va profaner des dieux la majesté sacrée.
Ces dieux, ces justes dieux n'auront pas oublié
Que les mêmes serments avec moi t'ont lié.
Porte au pied des autels ce coeur qui m'abandonne,
Va, cours; mais crains encore d'y trouver Hermione.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 01/09/2014

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Acte IV, Scène 5


Je vous reçus en reine, et jusques à ce jour
J'ai cru que mes serments me tiendraient lieu d'amour.
Mais cet amour l'emporte, et par un coup funeste,
Andromaque m'arrache un coeur qu'elle déteste.
L'un par l'autre entraînés, nous courons à l'autel
Nous jurer malgré nous un amour immortel.
Après cela, Madame, éclatez contre un traître,
Qui l'est avec douleur, et qui pourtant veut l'être.
Pour moi, loin de contraindre un si juste courroux,
Il me soulagera peut-être autant que vous.
Donnez-moi tous les noms destinés aux parjures:
Je crains votre silence, et non pas vos injures;
Et mon coeur, soulevant mille secrets témoins,
M'en dira d'autant plus que vous m'en direz moins.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 01/09/2014

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Acte IV, Scène 4


Que je me perde ou non, je songe à me venger.
Je ne sais même encor, quoi qu'il m'ait pu promettre,
Sur d'autres que sur moi si je dois m'en remettre:
Pyrrhus n'est pas coupable à ses yeux comme aux miens,
Et je tiendrais mes coups bien plus sûrs que les siens.
Quel plaisir de venger moi-même mon injure,
De retirer mon bras teint du sang du parjure,
Et pour rendre sa peine et mes plaisirs plus grands,
De cacher ma rivale à ses regards mourants!
Ah! Si du moins Oreste, en punissant son crime,
Lui laissait le regret de mourir ma victime!
Va le trouver: dis-lui qu'il apprenne à l'ingrat
Qu'on l'immole à ma haine, et non pas à l'état.
Chère Cléone, cours: ma vengeance est perdue
S'il ignore en mourant que c'est moi qui le tue.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 28/08/2014

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Acte IV, Scène 3


Ah! C'en est trop, Seigneur.
Tant de raisonnements offensent ma colère.
J'ai voulu vous donner les moyens de me plaire,
Rendre Oreste content; mais enfin je vois bien
Qu'il veut toujours se plaindre, et ne mériter rien.
Partez: allez ailleurs vanter votre constance,
Et me laissez ici le soin de ma vengeance.
De mes lâches bontés mon courage est confus,
Et c'est trop en un jour essuyer de refus.
Je m'en vais seule au temple où leur hymen s'apprête,
Où vous n'osez aller mériter ma conquête.
Là, de mon ennemi je saurai m'approcher,
Je percerai le coeur que je n'ai pu toucher,
Et mes sanglantes mains, sur moi-même tournées,
Aussitôt, malgré lui, joindront nos destinées;
Et tout ingrat qu'il est, il me sera plus doux
De mourir avec lui que de vivre avec vous.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 28/08/2014

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Acte III, Scène 1


Voilà donc le succès qu'aura votre ambassade:
Oreste ravisseur!

Et qu'importe, Pylade?
Quand nos états vengés jouiront de mes soins,
L'ingrate de mes pleurs jouira-t-elle moins?
Et que me servira que la Grèce m'admire,
Tandis que je serai la fable de l'Épire?
Que veux-tu? Mais, s'il faut ne te rien déguiser,
Mon innocence enfin commence à me peser.
Je ne sais de tout temps quelle injuste puissance
Laisse le crime en paix, et poursuit l'innocence.
De quelque part sur moi que je tourne les yeux,
Je ne vois que malheurs qui condamnent les dieux.
Méritons leur courroux, justifions leur haine,
Et que le fruit du crime en précède la peine.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 26/08/2014

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Acte III, Scène 1


Jamais il ne fut plus aimé.
Pensez-vous, quand Pyrrhus vous l'aurait accordée,
Qu'un prétexte tout prêt ne l'eût pas retardée?
M'en croirez-vous? Lassé de ses trompeurs attraits,
Au lieu de l'enlever, fuyez-la pour jamais.
Quoi? Votre amour se veut charger d'une furie
Qui vous détestera, qui toute votre vie,
Regrettant un hymen tout prêt à s'achever,
Voudra...

C'est pour cela que je veux l'enlever.
Tout lui rirait, Pylade; et moi, pour mon partage,
Je n'emporterais donc qu'une inutile rage?
J'irais loin d'elle encor tâcher de l'oublier?
Non, non, à mes tourments, je veux l'associer.
C'est trop gémir tout seul. Je suis las qu'on me plaigne.
Je prétends qu'à mon tour l'inhumaine me craigne,
Et que ses yeux cruels, à pleurer condamnés,
Me rendent tous les noms que je leur ai donnés.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 26/08/2014

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Acte II, Scène 2


Tel est de mon amour l'aveuglement funeste,
Vous le savez, Madame, et le destin d'Oreste
Est de venir sans cesse adorer vos attraits,
Et de jurer toujours qu'il n'y viendra jamais.
Je sais que vos regards vont rouvrir mes blessures,
Que tous mes pas vers vous sont autant de parjures:
Je le sais, j'en rougis; mais j'atteste les dieux,
Témoins de la fureur de mes derniers adieux,
Que j'ai couru partout où ma perte certaine
Dégageait mes serments et finissait ma peine.
J'ai mendié la mort chez des peuples cruels
Qui n'apaisaient leurs dieux que du sang des mortels:
Ils m'ont fermé leur temple; et ces peuples barbares
De mon sang prodigué sont devenus avares.
Enfin je viens à vous, et je me vois réduit
A chercher dans vos yeux une mort qui me fuit,
Mon désespoir n'attend que leur indifférence:
Ils n'ont qu'à m'interdire un reste d'espérance,
Ils n'ont, pour avancer cette mort où je cours,
Qu'à me dire une fois ce qu'ils m'ont dit toujours.
Voilà, depuis un an, le seul soin qui m'anime.
Madame, c'est à vous de prendre une victime
Que les Scythes auraient dérobée à vos coups
Si j'en avais trouvé d'aussi cruels que vous.


Par: Jean Racine

Extrait de: Andromaque (1667)

Ajoutée par Savinien le 21/08/2014

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Acte II, Scène 5


Délivre l'univers d'un monstre qui t'irrite.
La veuve de Thésée ose aimer Hippolyte!
Crois-moi, ce monstre affreux ne doit point t'échapper;
Voilà mon coeur: c'est là que ta main doit frapper.
Impatient déjà d'expier son offense,
Au-devant de ton bras je le sens qui s'avance.
Frappe: ou si tu le crois indigne de tes coups,
Si ta haine m'envie un supplice si doux,
Ou si d'un sang trop vil ta main serait trempée,
Au défaut de ton bras, prête-moi ton épée.


Par: Jean Racine

Extrait de: Phèdre (1677)

Ajoutée par Savinien le 12/08/2014

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Acte II, Scène 5


Ah, cruel, tu m'as trop entendue!
Je t'en ai dit assez pour te tirer d'erreur.
Eh bien! Connais donc Phèdre et toute sa fureur:
J'aime! Ne pense pas qu'au moment que je t'aime,
Innocente à mes yeux, je m'approuve moi-même;
Ni que du fol amour qui trouble ma raison
Ma lâche complaisance ait nourri le poison;
Objet infortuné des vengeances célestes,
Je m'abhorre encore plus que tu ne me détestes.


Par: Jean Racine

Extrait de: Phèdre (1677)

Ajoutée par Savinien le 12/08/2014

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Acte III, Scène 4


He bien, Titus, que viens-tu faire?
Bérénice t'attend. Où viens-tu, téméraire?
Tes adieux sont-ils prêts? T'es-tu bien consulté?
Ton coeur te promet-il assez de cruauté?
Car enfin au combat, qui pour toi se prépare,
C'est peu d'être constant, il faut être barbare.
Soutiendrai-je tes yeux, dont la douce langueur
Sais si bien découvrir les chemins de mon coeur?
Quand je verrai ces yeux armés de tous leurs charmes,
Attachés sur les miens, m'accabler de leurs larmes,
Me souviendrai-je alors de mon triste devoir?
Pourrai-je dire enfin, je ne veux plus vous voir?
Je viens percer un coeur que j'adore, qui m'aime.
Et pourquoi le percer? Qui l'ordonne? Moi-même.


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 07/08/2014

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Acte III, Scène 2


Et qui peut mieux que vous consoler sa disgrâce?
Sa fortune, Seigneur, va prendre une autre face.
Titus la quitte.

Hélas! De ce grand changement,
Il ne me viendra que le nouveau tourment
D'apprendre par ses pleurs à quel point elle l'aime.
Je la verrai gémir, je la plaindrai moi-même.
Pour fruit de tant d'amour, j'aurai le triste emploi
De recueillir des pleurs qui ne sont pas pour moi.


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 07/08/2014

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Acte I, Scène 4


Que vous dirais-je enfin? Je fuis des yeux distraits,
Qui me voyant toujours ne me voyaient jamais.
Adieu. Je vais, le coeur trop plein de votre image,
Attendre, en vous aimant, la mort pour mon partage.
Surtout ne craignez point qu'une aveugle douleur
Remplisse l'univers du bruit de mon malheur:
Madame: le seul bruit d'une mort que j'implore
Vous fera souvenir que je vivais encore.


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 06/08/2014

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Acte I, Scène 4


Mon sort est accompli. Votre gloire s'apprête.
Assez d'autres, sans moi, témoins de cette fête,
A vos heureux transports viendront joindre les leurs;
Pour moi, qui ne pourrait y mêler que des pleurs,
D'un inutile amour trop constante victime,
Heureux dans mes malheurs, d'en avoir pu, sans crime,
Conter toute l'histoire aux yeux qui les ont faits,
Je pars plus amoureux que je ne fus jamais.


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 06/08/2014

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Acte I, Scène 4


Votre bouche à la mienne ordonna de se taire.
Je disputais longtemps, je fis parler mes yeux.
Mes pleurs et mes soupirs vous suivaient en tous lieux.
Enfin votre rigueur emporta la balance:
Vous sûtes m'imposer l'exil ou le silence,
Il fallut le promettre, et même le jurer.
Mais puisqu'en ce moment j'ose me déclarer,
Lorsque vous m'arrachiez cette injuste promesses,
Mon coeur faisait serment de vous aimer sans cesse.


Par: Jean Racine

Extrait de: Bérénice (1670)

Ajoutée par Savinien le 06/08/2014

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Acte II, Scène 2


Excité d'un désir curieux,
Cette nuit je l'ai vue arriver en ces lieux,
Triste, levant au ciel ses yeux mouillés de larmes,
Qui brillaient au travers des flambeaux et des armes,
Belle, sans ornements, dans le simple appareil
D'une beauté qu'on vient d'arracher au sommeil.


Par: Jean Racine

Extrait de: Britannicus (1669)

Ajoutée par Savinien le 19/09/2011

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Acte I, Scène 1


Ma foi! Sur l'avenir, bien fou qui se fiera:
Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera.


Par: Jean Racine

Ajoutée par Savinien le 19/09/2011

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