Citations de Mémoires et voyages, de Astolphe de Custine

8 Citations

Qu'on ne me parle plus de nature morte, on sent ici que la Divinité est partout, et que les pierres sont pénétrées comme nous-mêmes d'une puissance créatrice! Quand on me dit que les rochers sont insensibles, je crois entendre un enfant soutenir que l'aiguille d'une montre ne marche pas parce qu'il ne la voit pas se mouvoir.


Par: Astolphe de Custine

Ajoutée par Savinien le 08/01/2018

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Je souffre de ne pouvoir vous donner qu'une faible idée de ces beaux lieux: les descriptions sont de si mauvaises copies de la nature! Elles ne se font lire que lorsqu'elles ne sont pas vraies; les écrivains ne disent jamais leur secret; je suis persuadé qu'ils nous plaisent surtout par leurs mensonges. Dieu est le seul auteur qui ait su se passer de fiction; à la vérité, il y supplée par le mystère. Comment retrouver dans un récit le bruit des torrents, le mouvement, les formes, la variété des arbres, la couleur des montagnes, leur odeur? Quelle suite de paroles peut rendre la première impression d'une contrée toute en désordre, lorsqu'elle frappe à la fois l'imagination par plusieurs beautés de genres différents? C'est la vie de la nature que rien ne peut imiter, et qui charme, qui transporte les âmes capables de la sentir. Les chefs-d'oeuvre de l'esprit ne sauraient s'emparer de tous les sens à la fois comme le moindre des ouvrages du Créateur! Que l'homme est peu de chose: un ruisseau, un arbre, une prairie peuvent plus sur lui que lui-même!


Par: Astolphe de Custine

Ajoutée par Savinien le 08/01/2018

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Je vais beaucoup dans le monde, je suis initié malgré moi à mille petits mystères que je n'avais nulle envie de pénétrer; et tant d'intérêts à ménager, tant de mensonges à écouter avec cet air de dupe, première condition de la politesse sociale, fatiguent mon esprit sans l'occuper. Je reproche au monde son insipidité bien plus que sa perversité. Il me semble que la société vaudrait quelque chose si elle pouvait m'inspirer un intérêt vif; et je la condamne sur l'ennui qu'elle me cause, plus que sur la corruption dont on l'accuse.


Par: Astolphe de Custine

Ajoutée par Savinien le 02/10/2014

 

Bientôt je reconnus l'air des montagnards: l'horreur du lieu ajoutait à l'effet de ces accents plaintifs et prolongés, dont les chevriers des Alpes se plaisent à saluer la nuit et la solitude; ces chants ou plutôt ces cris modulés sont d'une profonde tristesse, comme tous les airs nationaux; c'est que ces mélodies sont inspirées par la nature, et que la nature réveille dans le coeur de l'homme des désirs qu'elle ne peut jamais satisfaire. Nous n'habitons la terre que pour apprendre à désirer ce qu'on n'y trouve pas! L'inquiétude de notre âme est une souffrance, mais ne nous en plaignons pas; tous nos droits à l'immortalité sont là, et cette inexplicable douleur est notre plus beau titre de noblesse.


Par: Astolphe de Custine

Ajoutée par Savinien le 02/10/2014

 

Ce récit de mes exploits, tout abrégé qu'il est, vous paraît peut-être déjà bien long. Je vous ferai grâce des crevasses cachées sous la neige, et qu'il fallait sonder avec précaution, des pierres qui s'éboulaient sous mes pieds, et roulaient avec fracas jusqu'au fond des précipices; enfin de mille autres difficultés dont le récit ne serait intéressant que pour moi; Nous autres, voyageurs, nous nous croyons trop souvent payés de nos fatigues, en partageant avec nos amis l'ennui que nous avons été leur chercher bien loin.


Par: Astolphe de Custine

Ajoutée par Savinien le 02/10/2014

 

La vie est un ennuyeux mystère. N'a-t-il pas fallu de l'adresse au sort pour nous paraître à la fois mystérieux et ennuyeux?


Par: Astolphe de Custine

Ajoutée par Savinien le 04/09/2014

 

Je n'ai jamais pu voir le dégoût de l'existence fortement exprimé, sans me sentir tenté d'aller tout de suite exposer la mienne. Rien n'élève l'homme comme le dédain du plus grand don qu'il ait reçu!


Par: Astolphe de Custine

Ajoutée par Savinien le 04/09/2014

 

Quand les ténèbres du soir se répandent sur ces paysages désolés, le coeur de l'homme s'ouvre à la tristesse, et la poésie la plus mélancolique devient l'expression naturelle de ses sentiments intimes. Le deuil de la nature semble appeler du fond de son âme les pensées douloureuses; il s'établit entre lui et le désert une vague harmonie qui peut inspirer le poète, mais qui décourage l'homme vulgaire.


Par: Astolphe de Custine

Ajoutée par Savinien le 04/09/2014