Citations de Marceline Desbordes-Valmore

15 Citations

Et toi, dors-tu quand la nuit est si belle,
Quand l'eau me cherche et me fuit comme toi!
Quand je te donne un coeur longtemps rebelle?
Dors-tu, ma vie! Ou rêves-tu de moi?

Démêles-tu, dans mon âme confuse,
Les doux secrets qui brûlent entre nous?
Ces longs secrets dont l'amour nous accuse,
Viens-tu les rompre en songe à mes genoux?

As-tu livré ta voix tendre et hardie
Aux fraîches voix qui font trembler les fleurs?
Non! C'est du soir la vague mélodie:
Ton souffle encor n'a pas séché mes pleurs!

Garde toujours ce douloureux empire
Sur notre amour qui cherche à nous trahir;
Mais garde aussi son mal dont je soupire;
Ce mal est doux, bien qu'il fasse mourir!


Par: Marceline Desbordes-Valmore

Extrait de: Les pleurs (1833)

Ajoutée par Savinien le 12/12/2013

 

La lune des fleurs


Douce lune des fleurs, j'ai perdu ma couronne!
Je ne sais quel orage a passé sur ces bords.
Des chants de l'espérance il éteint les accords,
Et dans la nuit qui m'environne,
Douce lune des fleurs, j'ai perdu ma couronne.

Jette-moi tes présents, lune mystérieuse,
De mon front qui pâlit ranime les couleurs;
J'ai perdu ma couronne et j'ai trouvé des pleurs;
Loin de la foule curieuse,
Jette-moi tes présents, lune mystérieuse.

Entrouvre d'un rayon les noires violettes,
Douces comme les yeux du séduisant amour.
Tes humides baisers hâteront leur retour.
Pour cacher mes larmes muettes,
Entrouvre d'un rayon les noires violettes!


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 12/12/2013

 

Qu'en avez-vous fait?


Vous aviez mon coeur,
Moi, j'avais le vôtre:
Un coeur pour un coeur;
Bonheur pour bonheur!

Le vôtre est rendu,
Je n'en ai plus d'autre,
Le vôtre est rendu,
Le mien est perdu!

La feuille et la fleur
Et le fruit lui-même,
La feuille et la fleur,
L'encens, la couleur:

Qu'en avez-vous fait,
Mon maître suprême?
Qu'en avez-vous fait,
De ce doux bienfait?

Comme un pauvre enfant
Quitté par sa mère,
Comme un pauvre enfant
Que rien ne défend,

Vous me laissez là,
Dans ma vie amère;
Vous me laissez là,
Et Dieu voit celà!


Par: Marceline Desbordes-Valmore

Ajoutée par Savinien le 15/05/2013

 

Les séparés


N'écris pas. Je suis triste, et je voudrais m'éteindre.
Les beaux étés sans toi, c'est la nuit sans flambeau.
J'ai refermé mes bras qui ne peuvent t'atteindre,
Et frapper à mon coeur, c'est frapper au tombeau.
N'écris pas!

N'écris pas. N'apprenons qu'à mourir à nous-mêmes.
Ne demande qu'à Dieu... Qu'à toi, si je t'aimais!
Au fond de ton absence écouter que tu m'aimes,
C'est entendre le ciel sans y monter jamais.
N'écris pas!

N'écris pas. Je te crains; j'ai peur de ma mémoire;
Elle a gardé ta voix qui m'appelle souvent.
Ne montre pas l'eau vive à qui ne peut la boire.
Une chère écriture est un portrait vivant.
N'écris pas!

N'écris pas ces doux mots que je n'ose plus lire:
Il semble que ta voix les répand sur mon coeur;
Que je les vois brûler à travers ton sourire;
Il semble qu'un baiser les empreint sur mon coeur.
N'écris pas!


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 01/04/2012

 

La jeune fille et le ramier


Les rumeurs du jardin disent qu'il va pleuvoir;
Tout tressaille, averti de la prochaine ondée:
Et toi qui ne lis plus, sur ton livre accoudée,
Plains-tu l'absent aimé qui ne pourra te voir?

Là-bas, pliant son aile et mouillé sous l'ombrage,
Banni de l'horizon qu'il n'atteint que des yeux,
Appelant sa compagne et regardant les cieux,
Un ramier, comme toi, soupire de l'orage.

Laissez pleuvoir, ô coeurs solitaires et doux!
Sous l'orage qui passe il renaît tant de choses.
Le soleil sans la pluie ouvrirait-il les roses?
Amants, vous attendez, de quoi vous plaignez-vous?


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 20/09/2010

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L'églantine


Églantine! Humble fleur, comme moi solitaire,
Ne crains pas que sur toi j'ose étendre ma main.
Sans en être arrachée orne un moment la terre,
Et comme un doux rayon console mon chemin.
Quand les tièdes zéphyrs s'endorment sous l'ombrage,
Quand le jour fatigué ferme ses yeux brûlants,
Quand l'ombre se répand et brunit le feuillage,
Par ton souffle, vers toi, guide mes pas tremblants.

Mais ton front, humecté par le froid crépuscule,
Se penche tristement pour éviter ses pleurs;
Tes parfums sont enclos dans leur blanche cellule,
Et le soir a changé ta forme et tes couleurs.
Rose, console-toi! Le jour qui va paraître,
Rouvrira ton calice à ses feux ranimé ;
Ta mourante auréole, il la fera renaître,
Et ton front reprendra son éclat embaumé.

Fleur au monde étrangère, ainsi que toi, dans l'ombre
Je me cache et je cède à l'abandon du jour;
Mais un rayon d'espoir enchante ma nuit sombre:
Il vient de l'autre rive... et j'attends son retour.


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 20/09/2010

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Les roses de Saadi


J'ai voulu ce matin te rapporter des roses;
Mais j'en avais tant pris dans mes ceintures closes
Que les noeuds trop serrés n'ont pu les contenir.

Les noeuds ont éclaté. les roses envolées
Dans le vent, à la mer s'en sont toutes allées.
Elles ont suivi l'eau pour ne plus revenir.

La vague en a paru rouge et comme enflammée.
Ce soir, ma robe encore en est toute embaumée...
Respires-en sur moi l'odorant souvenir.


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 19/09/2010

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Une halte sur le Simplon


Rien n'est bon que d'aimer, rien n'est doux que de croire,
Que d'entendre la nuit, solitaire en sa gloire,
Accorder sur les monts ses sublimes concerts,
Pour les épandre aux cieux, qui ne sont pas déserts!


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 19/09/2010

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Une halte sur le Simplon


Viens ranimer ton souffle au bruit calmant de l'eau,
Au cri d'une cigale à travers le bouleau.
Viens voir la vigne antique à l'air seule attachée,
Le sein toujours gonflé d'une grappe cachée,
Étendant follement ses longs bras vers ses soeurs,
Bacchantes sans repos appelant les danseurs,
Viens où les joncs et l'onde où le roseau se mire,
Poussent, en se heurtant, de frais éclats de rire:
Viens: tu les sentiras, par leurs frissons charmants,
De l'attente qui brûle amollir les tourments.


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 19/09/2010

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Une halte sur le Simplon


Ce soir-là tout aimait, tout s'empressait de vivre;
Tout faisait les honneurs des chemins doux à suivre:
L'océan de la nuit se balançait dans l'air;
Pas un souffle inclément, enfin! Pas un éclair
N'agitait des aiglons les aires toutes pleines,
Et les fleurs se parlaient: le bruit de leurs haleines,
Dans l'herbe, ressemblait à des baisers d'enfants
Qui s'embrassent entre eux, rieurs et triomphants.
Là, j'avais dit aux miens, j'avais dit à moi-même:
« Dieu nous a voués aux départs, Dieu nous aime;
Il enlace nos jours et les mains dans les mains,
Nous refait de l'espoir aux douteux lendemains. »


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 19/09/2010

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Sol natal


C'est alors qu'elle donne une voix à ses larmes,
Puisant dans ses regrets d'inépuisables charmes;
C'est alors qu'elle écoute et qu'elle entend son nom,
Sortir d'un coeur qui s'ouvre et qui ne dit plus: non!
Elle chante: un grillon dans l'immense harmonie,
Jette un cri dont s'émeut la sagesse infinie;
Puis, montant à genoux la cime de son sort,
Elle s'en va chanter, souffrir, aimer encore!


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 19/09/2010

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Sol natal


N'est-il pas de ces jours où l'on ne sait que croire;
Où tout se lève amer au fond de la mémoire;
Où tout fait remonter les limons amassés,
Sous la surface unie où nos ans sont passés?


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 19/09/2010

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Dors-tu?


Et toi! Dors-tu quand la nuit est si belle,
Quand l'eau me cherche et me fuit comme toi;
Quand je te donne un coeur longtemps rebelle?
Dors-tu, ma vie! Ou rêves-tu de moi?

Démêles-tu, dans ton âme confuse,
Les doux secrets qui brûlent entre nous?
Ces longs secrets dont l'amour nous accuse,
Viens-tu les rompre en songe à mes genoux?

As-tu livré ta voix tendre et hardie
Aux fraîches voix qui font trembler les fleurs?
Non! C'est du soir la vague mélodie;
Ton souffle encore n'a pas séché mes pleurs!

Garde toujours ce douloureux empire
Sur notre amour qui cherche à nous trahir:
Mais garde aussi son mal dont je soupire;
Son mal est doux, bien qu'il fasse mourir!


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 19/09/2010

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L'impatience


Toi, tu ne viens jamais! Qu'importe que je meure?
Les minutes en vain volent autour de l'heure;
Et l'heure, en les comptant, fait tomber sans retour
Les mois, les ans, la vie! Et sans toi, sans amour!


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 19/09/2010

Catégories:

L'impatience


O Dieu! Si tu venais! Viens, je veux te parler;
J'ai des secrets encore, j'en ai mille à t'apprendre:
Et les tiens, tous les tiens, viens me les révéler,
Viens m'en flatter, viens me les rendre!
Je dirai: te voilà! Je dirai... Mon bonheur
Inventera des mots que ma tristesse ignore:
Ne crains pas que j'en trouve un seul pour la douleur;
Mais ceux qui te plaisaient, je les sais tous encore.


Par: Marceline Desbordes-Valmore

 

Ajoutée par Savinien le 19/09/2010

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