Citations de Gustave Flaubert

102 Citations

Un livre est une chose essentiellement organique, cela fait partie de nous-mêmes. Nous nous sommes arrachés du ventre un peu de tripes, que nous servons aux bourgeois. Les gouttes de notre coeur peuvent se voir dans les caractères de notre écriture. Mais une fois imprimé, bonsoir. Cela appartient à tout le monde! La foule nous passe sur le corps! C'est de la prostitution au plus haut degré et de la plus vile! Mais il est reçu que c'est très beau, et que prêter son cul pour dix francs est une infamie. Ainsi soit-il!


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 06/09/2020

Catégories:

Quand on a une douleur, on la porte avec soi partout. Les plaies ne se déposent pas comme les vêtements, et celles que nous aimons, celles qu'on gratte toujours et qu'on ravive ne guérissent jamais.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 06/09/2020

Catégories:

J'ai, dans ma jeunesse, démesurément aimé, aimé sans retour, profondément, silencieusement. Nuits passées à regarder la lune, projets d'enlèvement et de voyages en Italie, rêves de gloire pour elle, tortures du corps et de l'âme, spasmes à l'odeur d'une épaule, et pâleurs subites sous un regard, j'ai connu tout cela, et très bien connu. Chacun de nous a dans le coeur une chambre royale; je l'ai murée, mais elle n'est pas détruite.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 06/09/2020

Catégories:

La morale de Candide « il faut cultiver notre jardin » doit être celle des gens comme nous, de ceux qui n'ont pas trouvé. Trouve-t-on jamais d'ailleurs? Et quand on a trouvé, on cherche autre chose.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 06/09/2020

Catégories:

Je vous plains de la mort de votre amie. Ça n'est pas gai de perdre les gens qu'on aime. En ai-je déjà enseveli, moi! J'ai fait souvent la « veillée! » L'homme que j'ai le plus aimé m'est resté à demi dans les mains. Quand une fois on a baisé un cadavre au front, il vous en reste toujours sur les lèvres quelque chose, une amertume infinie, un arrière-goût de néant que rien n'efface. Il faut regarder les étoiles et dire: « J'irai peut-être ».


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 05/09/2020

Catégories:

La rage de vouloir conclure est une des manies les plus funestes et les plus stériles qui appartiennent à l'humanité. Chaque religion et chaque philosophie a prétendu avoir Dieu à elle, toiser l'infini et connaître la recette du bonheur. Quel orgueil et quel néant!


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 05/09/2020

Catégories:

Quelle humidité, quel vilain temps! Ne vous semble-t-il pas, quelquefois, que l'eau du ciel nous entre dans le coeur et y fait des larmes? C'est pour cela qu'il faut se créer un autre monde, en dehors de la nature: l'Idéal console du Réel.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 02/09/2020

Catégories:

La vie doit être une éducation incessante; il faut tout apprendre, depuis parler jusqu'à mourir.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 02/09/2020

Catégories:

Il faut toujours écrire, quand on en a envie. Nos contemporains (pas plus que nous-mêmes) ne savent ce qui restera de nos oeuvres. Voltaire ne se doutait pas que le plus immortel de ses ouvrages était Candide. Il n'y a jamais eu de grands hommes vivants. C'est la postérité qui les fait.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 02/09/2020

Catégories:

On m'a donné un chien, un lévrier. Je me promène avec lui en regardant les effets du soleil sur les feuilles qui jaunissent, en songeant à mes futurs livres et en ruminant le passé, car je suis maintenant un vieux. L'avenir pour moi n'a plus de rêves, et les jours d'autrefois commencent à osciller doucement dans une vapeur lumineuse. Sur ce fond-là quelques figures aimées se détachent, de chers fantômes me tendent les bras.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

Non, je ne crois pas le bonheur possible, mais bien la tranquillité. C'est pourquoi je m'écarte de ce qui m'irrite.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

Les gens qui vont aux exécutions capitales participent à l'action du bourreau.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

Dès que je ne tiens plus un livre ou que je ne rêve pas d'en écrire un, il me prend un ennui à crier. La vie ne me semble tolérable que si on l'escamote.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

Quelle belle chose que la Censure! Axiome: Tous les gouvernements exècrent la littérature: le pouvoir n'aime pas un autre pouvoir.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

Cette mort de ma vieille amie m'a navré. Mon coeur devient une nécropole où il reste pourtant de la place pour les vivants. Comme le vide s'élargit. Il me semble que la terre se dépeuple. C'est une raison pour tenir davantage à ceux qui restent, pour aimer encore plus ceux qu'on aime.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

Il faut être philosophe sur ces petites misères comme sur les grandes! La vie, d'ailleurs, ne se compose pas d'autres choses, à part de courts moments qu'on arrache au sort, par ci, par là.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

Voilà la vraie immoralité: l'ignorance et la bêtise! Le diable n'est pas autre chose. Il se nomme Légion.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

Tous ceux qui se regardent comme au-dessus du niveau humain dégringolent au-dessous.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

Parvenus à un certain âge, quelle volonté ne faut-il pas pour résister au torrent d'amertume qui nous entoure! C'est comme une dissolution intérieure: on sent que tout s'en va. Mais le soleil reparaît, l'âme se raffermit et l'existence continue.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

Le calme de la nature, en même temps qu'il apaise, humilie, ne trouvez-vous pas? Comme nous sommes faibles et agités vis-à-vis des choses, qui sont fortes et immuables! Plus je vais et plus je me convaincs de l'insignifiance de tout et de moi en particulier.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 28/08/2020

Catégories:

La reconnaissance non méritée gêne, c'est la récompense d'un sacrifice qui n'a pas eu lieu, on se trouve honteux et devoir quelque chose à l'obligé.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 24/08/2020

Catégories:

Quel calme! Oh! La nuit! Je la humais comme un parfum. La nuit, l'âme ouvre ses ailes et plane en paix. J'aime la nuit, tout mon être s'y dilate comme un violon tendu dont on relâche les chevilles.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 23/08/2020

Catégories:

Les arbres ne conservent point la trace des orages qui ont courbé leurs branches, ni les sables légers que le vent fait mouvoir celle des pas qui s'y sont imprimés ; il n'en est pas de même de l'âme et de la figure des hommes: tout y marque.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 23/08/2020

Catégories:

Au bout d'un certain temps, les ombres et les lumières se mêlent, tout prend même teinte, comme dans les vieux tableaux: les jours tristes se colorent des jours gais, les jours heureux s'alanguissent un peu de la mélancolie des autres. Voilà pourquoi on aime à revenir sur son passé. Il est triste et charmant cependant, c'est comme les airs qui font mal à entendre et qu'on est poussé à écouter toujours et le plus longtemps possible.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 23/08/2020

 

La fin de notre voyage approchait. Bientôt allait finir cette fantaisie vagabonde que nous menions depuis trois mois avec tant de douceur. Le retour aussi, comme le départ, a ses tristesses anticipées qui vous envoient par avance la fade exhalaison de la vie qu'on traîne.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 21/08/2020

Catégories:

Ainsi se passe une journée en voyage, il n'en faut pas plus pour la remplir: une rivière, des buissons, une belle tête d'enfant, des tombeaux; on savoure la couleur des herbes, on écoute le bruit des eaux, on contemple les visages, on se promène parmi les pierres, on s'accoude sur les tombes, et le lendemain on rencontre d'autres hommes, d'autres pays, d'autres débris; on établit des antithèses, on fait des rapprochements. C'est là le plaisir, il en vaut bien un autre.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 21/08/2020

Catégories:

L'histoire est, comme la mer, belle par ce qu'elle efface: le flot qui vient enlève sur le sable la trace du flot qui est venu, on se dit seulement qu'il y en a eu, qu'il y en aura encore; c'est là toute sa poésie et sa moralité peut-être?


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 21/08/2020

 

On ne se rencontre qu'en se heurtant et chacun, portant dans ses mains ses entrailles déchirées, accuse l'autre qui ramasse les siennes.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 21/08/2020

Catégories:

La bêtise est quelque chose d'inébranlable, rien ne l'attaque sans se briser contre elle. Elle est de la nature du granit, dure et résistante.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 21/08/2020

Catégories:

Le bonheur est un mensonge dont la recherche cause toutes les calamités de la vie. Mais il y a des paix sereines qui l'imitent et qui sont supérieures peut-être.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 21/08/2020

Catégories:

'auteur, dans son oeuvre, doit être comme Dieu dans l'univers, présent partout, et visible nulle part.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 21/08/2020

Catégories:

Le seul moyen de supporter l'existence, c'est de s'étourdir dans la littérature comme dans une orgie perpétuelle. Le vin de l'Art cause une longue ivresse et il est inépuisable. C'est de penser à soi qui rend malheureux.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 21/08/2020

Catégories:

Notre âme est une bête féroce; toujours affamée, il faut la gorger jusqu'à la gueule pour qu'elle ne se jette pas sur nous. Rien n'apaise plus qu'un long travail. L'érudition est chose rafraîchissante. Combien je regrette souvent de n'être pas un savant, et comme j'envie ces calmes existences passées à étudier des pattes de mouches, des étoiles ou des fleurs!


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Oh! Il y a des jours, comme hier par exemple, où l'on est triste, où l'on a le coeur tout gros de larmes, où l'on se hait, où l'on se mangerait de colère. Ce qu'il faut faire, c'est de ne pas penser au passé, de ne pas se dire: il doit encore faire là-bas un beau soleil, il y a 72 heures j'étais à tel endroit, je vois encore sur la grande route l'ombre de ma tête qui court après celle du cheval, et mille autres niaiseries semblables; c'est de regarder l'avenir, de s'allonger le cou pour voir l'horizon, de s'élancer en avant, de baisser la tête et d'avancer vite, sans écouter la voix plaintive des tendres souvenirs qui veulent vous rappeler à eux dans la vallée de l'éternelle angoisse. Il ne faut pas regarder le gouffre, car il y a au fond un charme inexprimable qui nous attire.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Sonde-toi bien: y a-t-il un sentiment que tu aies eu qui soit disparu? Non, tout reste, n'est-ce pas? Tout. Les momies que l'on a dans le coeur ne tombent jamais en poussière et, quand on penche la tête par le soupirail, on les voit en bas, qui vous regardent avec leurs yeux ouverts, immobiles.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Après ne pas vivre avec ceux qu'on aime, le plus grand supplice est de vivre avec ceux que l'on n'aime pas, c'est-à-dire avec plus des trois quarts du genre humain.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

La volonté individuelle de qui que ce soit n'a pas plus d'influence sur l'existence ou la destruction de la civilisation qu'elle n'en a sur la pousse des arbres ou la composition de l'atmosphère. Vous apporterez, ô grand homme, un peu de fumier ici, un peu de sang là. Mais la force humaine, une fois que vous serez passé, continuera de s'agiter sans vous. Elle roulera votre souvenir avec toutes ses autres feuilles mortes. Votre coin de culture disparaîtra sous l'herbe, votre peuple sous d'autres invasions, votre religion sous d'autres philosophies et toujours, toujours, hiver, printemps, été, automne, hiver, printemps, sans que les fleurs cessent de pousser et la sève de monter.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Le pauvre Edmond de Goncourt est en Champagne, chez ses parents. Il m'a promis de venir ici à la fin de ce mois. Je ne crois pas que l'espoir de revoir son frère dans un monde meilleur le console de l'avoir perdu dans celui-ci.
On se paye de mots dans cette question de l'immortalité, car la question est de savoir si le moi persiste. L'affirmative me paraît une outrecuidance de notre orgueil, une protestation de notre faiblesse contre l'ordre éternel. La mort n'a peut-être pas plus de secrets à nous révéler que la vie.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Je vais me mettre à travailler furieusement, à peine rentré; je l'espère du moins. La vie n'est tolérable qu'avec une marotte, un travail quelconque. Dès qu'on abandonne sa chimère, on meurt de tristesse. Il faut se cramponner dessus et souhaiter qu'elle nous emporte.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Ne nous lamentons sur rien; se plaindre de tout ce qui nous afflige ou nous irrite, c'est se plaindre de la constitution même de l'existence. Nous sommes faits pour la peindre, nous autres, et rien de plus. Soyons religieux. Moi, tout ce qui m'arrive de fâcheux, en grand ou en petit, fait que je me resserre de plus en plus à mon éternel souci. Je m'y cramponne à deux mains et je ferme les deux yeux. A force d'appeler la Grâce, elle vient. Dieu a pitié des simples et le soleil brille toujours pour les coeurs vigoureux qui se placent au-dessus des montagnes.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Certes, on peut vivre, et mourir même, sans s'être demandé une seule fois ce que c'est que la vie et que la mort; mais pour celui qui regarde les feuilles trembler au souffle du vent, les rivières serpenter dans les prés, la vie se tourmenter et tourbillonner dans les choses, les hommes vivre, faire le bien et le mal, la mer rouler ses flots et le ciel dérouler ses lumières, et qui se demande: pourquoi ces feuilles? Pourquoi l'eau coule-t-elle? Pourquoi la vie elle-même est-elle un torrent si terrible et qui va se perdre dans l'océan sans bornes de la mort? Pourquoi les hommes marchent-ils, travaillent-ils comme des fourmis? Pourquoi la tempête? Pourquoi le ciel si pur et la terre si infâme? Ces questions mènent à des ténèbres d'où l'on ne sort pas.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Tout ce que tu me dis sur l'oubli des absents ne m'étonne nullement. Tel est le commun des âmes. La banalité de la vie est à faire vomir de tristesse, quand on la considère de près. Les serments, les larmes, les désespoirs, tout cela coule comme une poignée de sable dans la main. Attendez, serrez un peu, il n'y aura tout à l'heure plus rien du tout. Et puis c'est si ennuyeux de jouer toujours le même rôle, et le public nous en tient si peu compte! Il est si lassant de porter toujours le même sentiment! On a besoin de changement, de distractions. C'est là le grand mal. Le coeur, comme l'estomac, veut des nourritures variées.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

C'est parce que je crois à l'évolution perpétuelle de l'humanité et à ses formes incessantes, que je hais tous les cadres où on veut la fourrer de vive force, toutes les formalités dont on la définit, tous les plans que l'on rêve pour elle. La démocratie n'est pas plus son dernier mot que l'esclavage ne l'a été, que la féodalité ne l'a été, que la monarchie ne l'a été. L'horizon perçu par les yeux humains n'est jamais le rivage, parce qu'au delà de cet horizon, il y en a un autre, et toujours! Ainsi chercher la meilleure des religions, ou le meilleur des gouvernements, me semble une folie niaise. Le meilleur, pour moi, c'est celui qui agonise, parce qu'il va faire place à un autre.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

L'amour est une plante de printemps qui parfume tout de son espoir, même les ruines où il s'accroche.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Ce que je redoute étant la passion, le mouvement, je crois, si le bonheur est quelque part, qu'il est dans la stagnation; les étangs n'ont pas de tempêtes.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Les grandes natures, qui sont les bonnes, sont avant tout prodigues et n'y regardent pas de si près à se dépenser. Il faut rire et pleurer, aimer, travailler, jouir et souffrir, enfin vibrer autant que possible dans toute son étendue. Voilà, je crois, le vrai humain.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

J'en veux à ceci: l'aspiration au bonheur par les faits, par l'action. Je hais cette recherche [de] béatitude terrestre. Elle me semble une manie médiocre et dangereuse. Vivent l'amour, l'argent, le vin, la famille, la joie et le sentiment! Prenons de tout cela le plus que nous pourrons, mais n'y croyons point. Soyons persuadés que le bonheur est un mythe inventé par le diable pour nous désespérer. Ce sont les peuples persuadés d'un paradis qui ont des imaginations tristes. Dans l'antiquité, où l'on n'espérait (et encore !) que des Champs-Élysées fort plats, la vie était aimable.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Je vais, pendant quelques années peut-être, vivre dans un sujet splendide et loin du monde moderne dont j'ai plein le dos. Ce que j'entreprends est insensé et n'aura aucun succès dans le public. N'importe! Il faut écrire pour soi, avant tout. C'est la seule chance de faire beau.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Il y a toujours, après la mort de quelqu'un, comme une stupéfaction qui se dégage, tant il est difficile de comprendre cette survenue du néant et de se résigner à y croire.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Moi, je sais mieux aimer! Je suis ta servante et ta concubine! Tu es mon roi, mon idole! Tu es bon! Tu es beau! Tu es intelligent! Tu es fort!
Il s'était tant de fois entendu dire ces choses, qu'elles n'avaient pour lui rien d'original. Emma ressemblait à toutes les maîtresses; et le charme de la nouveauté, peu à peu tombant comme un vêtement, laissait voir à nu l'éternelle monotonie de la passion, qui a toujours les mêmes formes et le même langage.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

A la ville, avec le bruit des rues, le bourdonnement des théâtres et les clartés du bal, elles avaient des existences où le coeur se dilate, où les sens s'épanouissent. Mais elle, sa vie était froide comme un grenier dont la lucarne est au nord, et l'ennui, araignée silencieuse, filait sa toile dans l'ombre à tous les coins de son coeur.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

N'avaient-ils rien autre chose à se dire? Leurs yeux pourtant étaient pleins d'une causerie plus sérieuse; et, tandis qu'ils s'efforçaient à trouver des phrases banales, ils sentaient une même langueur les envahir tous les deux; c'était comme un murmure de l'âme, profond, continu, qui dominait celui des voix. Surpris d'étonnement à cette suavité nouvelle, ils ne songeaient pas à s'en raconter la sensation ou à en découvrir la cause. Les bonheurs futurs, comme les rivages des tropiques, projettent sur l'immensité qui les précède leurs mollesses natales, une brise parfumée, et l'on s'assoupit dans cet enivrement sans même s'inquiéter de l'horizon que l'on n'aperçoit pas.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Vous me demandez des consolations; ne vous ai-je pas assez rabâché les mêmes choses. Travaillez excessivement à un travail dur et long. Tout amuse quand on y met de la persévérance: l'homme qui apprendrait par coeur un dictionnaire finirait par y trouver du plaisir; et puis voyagez, quittez tout, imitez les oiseaux. C'est une des tristesses de la civilisation que d'habiter dans des maisons. Je crois que nous sommes faits pour nous endormir sur le dos en regardant les étoiles.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Voilà la quatrième fois que je vais me retrouver à Marseille et, cette fois-ci, je serai seul, absolument seul. Le cercle s'est rétréci. Les réflexions que je faisais en 1849, lorsque je me suis embarqué pour l'Égypte, je vais les refaire dans quelques jours en foulant les mêmes pavés. Notre vie tourne ainsi continuellement dans la même série de misères, comme un écureuil dans une cage, et nous haletons à chaque degré. N'importe; il ne faut pas rétrécir sa vie, ni son coeur non plus. Acceptons tout! Absorbons tout!


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Un râle métallique se traîna dans les airs et quatre coups se firent entendre à la cloche du couvent. Quatre heures! Et il lui semblait qu'elle était là, sur ce banc, depuis l'éternité. Mais un infini de passions peut tenir dans une minute, comme une foule dans un petit espace.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Tu es bon, excellent, plein de générosité et bon compagnon. Sois-le toujours; on a beau dire, un coeur est une richesse qui ne se vend pas, qui ne s'achète, mais qui se donne.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/08/2020

Catégories:

Pourquoi le coeur de l'homme est-il si grand, et la vie si petite? Il y a des jours où l'amour des anges même ne lui suffirait pas, et il se fatigue en une heure de toutes les caresses de la terre.


Par: Gustave Flaubert

Extrait de: Novembre (1842)

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

Que de fois j'ai contemplé, dans les chapelles des cathédrales, ces longues statues de pierre couchées sur les tombeaux! Leur calme est si profond que la vie ici-bas n'offre rien de pareil; ils ont, sur leur lèvre froide, comme un sourire monté du fond du tombeau, on dirait qu'ils dorment, qu'ils savourent la mort. N'avoir plus besoin de pleurer, ne plus sentir de ces défaillances où il semble que tout se rompt, comme des échafaudages pourris, c'est là le bonheur au-dessus de tous les bonheurs, la joie sans lendemain, le rêve sans éveil.


Par: Gustave Flaubert

Extrait de: Novembre (1842)

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

Le coeur de l'homme est inépuisable pour la tristesse: un ou deux bonheurs le remplissent, toutes les misères de l'humanité peuvent s'y donner rendez-vous et vivre comme des hôtes.


Par: Gustave Flaubert

Extrait de: Novembre (1842)

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

Rappelons-nous nos beaux jours, les jours où nous étions gais, où nous étions plusieurs, où le soleil brillait, où les oiseaux cachés chantaient après la pluie, les jours où nous nous étions promenés dans le jardin; le sable des allées était mouillé, les corolles des roses étaient tombées dans les plates-bandes, l'air embaumait. Pourquoi n'avons-nous pas assez senti notre bonheur quand il nous a passé par les mains?


Par: Gustave Flaubert

Extrait de: Novembre (1842)

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

Malheur à qui n'a pas désiré des colères de tragédie, à qui ne sait pas par coeur des strophes amoureuses pour se les répéter au clair de lune! Il est beau de vivre ainsi dans la beauté éternelle, de se draper avec les rois, d'avoir les passions à leur expression la plus haute, d'aimer les amours que le génie à rendus immortels.


Par: Gustave Flaubert

Extrait de: Novembre (1842)

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

J'ai savouré longuement ma vie perdue; je me suis dit avec joie que ma jeunesse était passée, car c'est une joie de sentir le froid vous venir au coeur, et de pouvoir dire, le tâtant de la main comme un foyer qui fume encore: il ne brûle plus.


Par: Gustave Flaubert

Extrait de: Novembre (1842)

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

J'aime l'automne, cette triste saison va bien aux souvenirs. Quand les arbres n'ont plus de feuilles, quand le ciel conserve encore au crépuscule la teinte rousse qui dore l'herbe fanée, il est doux de regarder s'éteindre tout ce qui naguère encore brûlait en vous.


Par: Gustave Flaubert

Extrait de: Novembre (1842)

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

De tout ce qui va suivre personne n'a rien su, et ceux qui me voyaient chaque jour, pas plus que les autres; ils étaient, par rapport à moi, comme le lit sur lequel je dors et qui ne sait rien de mes songes. Et d'ailleurs, le coeur de l'homme n'est-il pas une énorme solitude où nul ne pénètre? Les passions qui y viennent sont comme les voyageurs dans le désert du Sahara, elles y meurent étouffées, et leurs cris ne sont point entendus au-delà.


Par: Gustave Flaubert

Extrait de: Novembre (1842)

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

L'incapacité des gens de pensée aux affaires n'est qu'un excès de capacité. Dans les grands vases, une goutte d'eau n'est rien et elle emplit les petites bouteilles.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

Vous vous révoltez contre l'injustice du monde, contre sa bassesse, sa tyrannie et toutes les turpitudes et fétidités de l'existence. Mais les connaissez-vous bien? Avez-vous tout étudié? Etes-vous Dieu? Qui vous dit que votre jugement humain soit infaillible? Que votre sentiment ne vous abuse pas? Comment pouvons-nous, avec nos sens bornés et notre intelligence finie, arriver à la connaissance absolue du vrai et du bien? Saisirons-nous jamais l'absolu? Il faut, si l'on veut vivre, renoncer à avoir une idée nette de quoi que ce soit. L'humanité est ainsi, il ne s'agit pas de la changer, mais de la connaître.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

Il ne faut jamais penser au bonheur; cela attire le diable, car c'est lui qui a inventé cette idée-là pour faire enrager le genre humain. La conception du paradis est au fond plus infernale que celle de l'enfer. L'hypothèse d'une félicité parfaite est plus désespérante que celle d'un tourment sans relâche, puisque nous sommes destinés à n'y jamais atteindre. Heureusement qu'on ne peut guère se l'imaginer; c'est là ce qui console. L'impossibilité où l'on est de goûter au nectar fait trouver bon le chambertin.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 19/08/2020

Catégories:

Une plaisanterie est ce qu'il y a de plus puissant, de plus terrible. Elle est irrésistible. Il n'y a point de tribunal pour en rappeler ni la raison ni le sentiment. Une chose en dérision est une chose morte. Un homme qui rit est plus fort qu'un autre qui a une épée.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 19/05/2020

Catégories:

Nous ne sommes pas indignés de deux jeunes chiens qui se battent, de deux enfants qui se frappent, d'une araignée qui mange une mouche. Nous tuons un insecte sans y penser. Montez sur une tour assez haut pour que le bruit se perde, pour que les hommes soient petits. Si vous voyez de là un homme en tuer un autre vous n'en seriez guère ému, moins ému à coup sûr que si le sang rejaillissait sur vous. Imaginez une tour plus haute et une indifférence plus grande - un géant qui regarde des myrmidons, un grain de sable au pied d'une pyramide et imaginez les myrmidons qui s'égorgent et le grain de poussière qui se soulève, qu'est-ce que tout cela peut faire au géant et à la pyramide? Maintenant vous pouvez comparer la nature, Dieu, l'intelligence infinie en un mot enfin à cet homme qui a cent pieds, à cette pyramide qui en a cent mille. Pensez d'après cela à la misère de nos crimes et de nos vertus, de nos grandeurs et de nos bassesses.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 19/05/2020

Catégories:

Le secret pour être heureux c'est de savoir jouir, jouir à table, jouir au lit, jouir d'être debout, d'être assis - jouir du plus pâle rayon de soleil, du plus mince paysage, c'est-à-dire aimer tout de sorte que pour être heureux il faut déjà l'être - pas de pain sans levain.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 19/05/2020

Catégories:

L'homme le plus vertueux a dans le coeur des choses épouvantables.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 19/05/2020

Catégories:

O si j'aimais, si j'étais aimé. Comme je serais heureux, les belles nuits, les belles heures. Il y en a pourtant qui vivent de cette vie-là! Pourquoi pas moi. O mon Dieu, je ne veux pas d'autres délices. J'ai le coeur plein de sons sonores et de mélodies plus douces que celles du ciel, le doigt d'une femme les ferait chanter, les ferait vibrer - se confondre dans un baiser, dans un regard - eh quoi n'aurais-je jamais rien de tout cela? Je sens pourtant mon coeur bien plus grand que ma tête. O comme j'aimerais, venez donc, venez donc, âme mystérieuse soeur de la mienne, je baiserai la trace de vos pas, tu marcheras sur moi et j'embrasserai tes pieds en pleurant.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 19/05/2020

Catégories:

La seule chose qui distingue l'homme des animaux c'est manger sans faim boire sans soif; libre arbitre.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 19/05/2020

Catégories:

Ainsi leur rencontre avait eu l'importance d'une aventure. Ils s'étaient, tout de suite, accrochés par des fibres secrètes. D'ailleurs, comment expliquer les sympathies? Pourquoi telle particularité, telle imperfection indifférente ou odieuse dans celui-ci enchante-t-elle dans celui-là? Ce qu'on appelle le coup de foudre est vrai pour toutes les passions.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 22/03/2020

Catégories:

D'abord, ils marchèrent le long des quenouilles, sans parler. Il était encore ému de sa déclamation; - et elle éprouvait au fond de l'âme comme une surprise, un charme qui venait de la littérature. L'art, en de certaines occasions, ébranle les esprits médiocres; - et des mondes peuvent être révélés par ses interprètes les plus lourds.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 22/03/2020

Catégories:

En rentrant chez eux, ils trouvèrent au bas de l'escalier, sous la madone, Marcel à genoux, et qui priait avec ferveur. La tête renversée, les yeux demi-clos, et dilatant son bec-de-lièvre, il avait l'air d'un fakir en extase.
- Quelle brute! Dit Bouvard.
- Pourquoi? Il assiste peut-être à des choses que tu lui jalouserais, si tu pouvais les voir. N'y a-t-il pas deux mondes tout à fait distincts? L'objet d'un raisonnement a moins de valeur que la manière de raisonner. Qu'importe la croyance! Le principal est de croire.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 22/03/2020

Catégories:

Il faudrait comprendre le sens des mots. Ce qu'on appelle la combativité implique le dédain de la mort. S'il fait des homicides, il peut de même produire des sauvetages. L'acquisivité englobe le tact des filous et l'ardeur des commerçants. L'irrévérence est parallèle à l'esprit de critique, la ruse à la circonspection. Toujours un instinct se dédouble en deux parties, une mauvaise, une bonne. On détruira la seconde en cultivant la première. Et par cette méthode, un enfant audacieux, loin d'être un bandit deviendra un général. Le lâche n'aura seulement que de la prudence, l'avare de l'économie, le prodigue de la générosité.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 22/03/2020

Catégories:

Et maintenant si rieur sur tout, si amèrement persuadé du grotesque de l'existence, je sens encore que l'amour, cet amour comme je l'ai rêvé au collège sans l'avoir, et que j'ai ressenti plus tard, qui m'a tant fait pleurer et dont j'ai tant ri, combien je crois encore que ce serait tout à la fois la plus sublime des choses, ou la plus bouffonne des bêtises! Deux êtres jetés sur la terre par un hasard, quelque chose, et qui se rencontrent, s'aiment, parce que l'un est femme et l'autre homme! Les voilà haletants l'un pour l'autre, se promenant ensemble la nuit et se mouillant à la rosée, regardant le clair de lune et le trouvant diaphane, admirant les étoiles et disant sur tous les tons: je t'aime, tu m'aimes, il m'aime, nous nous aimons, et répétant cela avec des soupirs, des baisers; et puis ils rentrent, poussés tous les deux par une ardeur sans pareille car ces deux âmes ont leurs organes violemment échauffés, et les voilà bientôt grotesquement accouplés, avec des rugissements et des soupirs, soucieux l'un et l'autre pour reproduire un imbécile de plus sur la terre, un malheureux qui les imitera! Contemplez-les, plus bêtes en ce moment que les chiens et les mouches, s'évanouissant, et cachant soigneusement aux yeux des hommes leur jouissance solitaire, pensant peut-être que le bonheur est un crime et la volupté une honte.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 06/01/2019

Catégories:

Je n'envie pas les autres, car chacun se plaint du fardeau dont la fatalité l'accable; les uns le jettent avant l'existence finie, d'autres le portent jusqu'au bout. Et moi, le porterai-je?


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 25/05/2017

Catégories:

Enfant, j'ai rêvé l'amour; jeune homme la gloire; homme, la tombe, ce dernier amour de ceux qui n'en ont plus.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 25/05/2017

Catégories:

Je vous conterai plus tard toutes les phases de cette vie morne et méditative passée au coin du feu les bras croisés, avec un éternel bâillement d'ennui, seul pendant tout un jour, et tournant de temps en temps mes regards sur la neige des toits voisins, sur le soleil couchant avec ses jets de pâle lumière sur le pavé de ma chambre, ou sur une tête de mort jaune, édentée et grimaçant sans cesse sur ma cheminée, symbole de la vie et comme elle froide et railleuse. Plus tard, vous lirez peut-être toutes les angoisses de ce coeur si battu, si navré d'amertume. Vous saurez les aventures de cette vie si paisible et si banale, si remplie de sentiments, si vide de faits. Et vous me direz ensuite si tout n'est pas une dérision et une moquerie, si tout ce qu'on chante dans les écoles, tout ce qu'on délaie dans les livres, tout ce qui se voit, se sent, se parle, si tout ce qui existe... Je n'achève pas tant j'ai d'amertume à le dire. Eh! Bien, si tout cela enfin n'est pas de la pitié, de la fumée, du néant!


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 25/05/2017

Catégories:

Peuples, où sont vos noms effacés par le sable qu'a soulevé la tempête, tempête qu'en ont effacé tant d'autres? Rois, où sont vos couronnes emportées par l'haleine de la mort? Venez aussi, hommes de la terre; dites-moi où sont vos passions, vos vertus passées comme vos pleurs, vos palais, vos gloires et vos cendres! Et vous, femmes, où sont vos coeurs plein d'amour, vos coeurs pourris aussi avant la dentelle de vos vêtements? Et quand vous serez tous là, vous me direz ensuite ce que c'est que la mort, ce que vous pensez depuis tant de siècles, endormis sous le monde qui palpite sur vos têtes, comme une victime qui tressaille encore à son agonie. Vous me direz chacun où sont parties vos âmes, et si elles viennent parfois visiter la boue qui les a contenues.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 13/02/2017

Catégories:

A moi, le monde! A moi, la mort et la vie, les empereurs et les peuples, les empires et les nations! Peuples, soulevez vos linceuls; empires, soulevez vos ruines; empereurs, soulevez vos cercueils embaumés et pourris, venez nous dire ce que c'est que la vie, ce que vaut un peuple, ce que vaut une couronne, combien il faut de vers et de siècles pour manger l'un, combien il faut de minutes pour broyer l'autre.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 13/02/2017

Catégories:

Oui, la tyrannie pèse sur les peuples et je sens qu'il est beau de les en affranchir; je sens mon coeur se soulever d'aise au mot liberté comme celui d'un enfant bat de terreur au mot fantôme, et ni l'un ni l'autre ne sont vrais. Encore une illusion détruite, encore une fleur fanée.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 13/02/2017

Catégories:

Du nord au sud, de l'est à l'ouest, partout où vous irez, vous ne pouvez faire un pas sans que la tyrannie, l'injustice, l'avarice, la cupidité ne vous repoussent avec égoïsme; partout, vous dis-je, vous trouverez des hommes qui vous diront: retire-toi de devant mon soleil; retire-toi, tu marches sur le sable que j'ai étalé sur la terre; retire-toi, tu tu marches sur mon bien; retire-toi, tu aspires l'air qui m'appartient. Oh! Oui, l'homme est un voyageur qui a soif; il demande de l'eau pour boire, on la lui refuse, et il meurt.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 06/02/2017

Catégories:

Souvent je me suis demandé pourquoi je vivais, ce que j'étais venu faire au monde, et je n'ai trouvé là dedans qu'un abîme derrière moi, un abîme devant; à droite, à gauche, en haut, en bas, partout des ténèbres.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 06/02/2017

Catégories:

La vanité, selon moi, est le fond de toutes les actions des hommes. Quand j'avais parlé, agi, fait n'importe quel acte de ma vie, et que j'analysais mes paroles ou mes actions, je trouvais toujours cette vieille folle nichée dans mon coeur ou dans mon esprit. Bien des hommes sont comme moi, peu ont la même franchise.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 06/02/2017

Catégories:

La vie est une chose tellement hideuse que le seul moyen de la supporter, c'est de l'éviter. Et on l'évite en vivant dans l'Art, dans la recherche incessante du Vrai rendu par le Beau. Lisez les grands maîtres en tâchant de saisir leur procédé, de vous rapprocher de leur âme, et vous sortirez de cette étude avec des éblouissements qui vous rendront joyeuse. Vous serez comme Moïse en descendant du Sinaï. Il avait des rayons autour de la face, pour avoir contemplé Dieu.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 29/10/2014

 

Ce qui m'a gardé de la débauche, ce n'est pas la vertu, mais l'ironie. La bêtise du vice me fait encore plus rire de pitié que la turpitude ne me dégoûte.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 29/10/2014

 

Madame Bovary n'a rien de vrai. C'est une histoire totalement inventée; je n'y ai rien mis ni de mes sentiments ni de mon existence. L'illusion (s'il y en a une) vient au contraire de l'impersonnalité de l'oeuvre. C'est un de mes principes, qu'il ne faut pas s'écrire. L'artiste doit être dans son oeuvre comme Dieu dans la création, invisible et tout-puissant; qu'on le sente partout, mais qu'on ne le voie pas.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 29/10/2014

 

Je vais donc reprendre ma pauvre vie si plate et tranquille, où les phrases sont des aventures et où je ne recueille d'autres fleurs que des métaphores. J'écrirai comme par le passé, pour le seul plaisir d'écrire, pour moi seul, sans aucune arrière-pensée d'argent ou de tapage. Apollon, sans doute, m'en tiendra compte, et j'arriverai peut-être un jour à produire une belle chose! Car tout cède, n'est-ce pas, à la continuité d'un sentiment énergique. Chaque rêve finit par trouver sa forme; il y a des ondes pour toutes les soifs, de l'amour pour tous les coeurs. Et puis rien ne fait mieux passer la vie que la préoccupation incessante d'une idée, qu'un idéal, comme disent les grisettes... Folie pour folie, prenons les plus nobles. Puisque nous ne pouvons décrocher le soleil, il faut boucher toutes nos fenêtres et allumer des lustres dans notre chambre.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 27/10/2014

 

Rien ne dure ici-bas; et c'est une raison pour qu'il fasse beau demain s'il a plu aujourd'hui.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 27/10/2014

 

Je t'envie de regretter quelque chose dans ton passé. Quant à moi (c'est qu'apparemment je n'ai jamais été ni heureux ni malheureux), j'ignore ce sentiment là. Et d'abord j'en serais honteux. C'est reconnaître qu'il y a quelque chose de bon dans la vie, je ne rendrai jamais cet hommage à la condition humaine.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 27/10/2014

 

Les coeurs des femmes sont comme ces petits meubles à secrets, pleins de tiroirs emboîtés les uns dans les autres; on se donne du mal, on se casse les ongles, et on trouve au fond quelque fleur desséchée, des brins de poussière - ou le vide!


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/05/2013

 

Au milieu des confidences les plus intimes, il y a toujours des restrictions, par fausse honte, délicatesse, pitié. On découvre chez l'autre ou dans soi-même des précipices ou des fanges qui empêchent de poursuivre; on sent, d'ailleurs, que l'on ne serait pas compris; il est difficile d'exprimer exactement quoi que ce soit; aussi les unions complètes sont rares.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/05/2013

 

L'action, pour certains hommes, est d'autant plus impraticable que le désir est plus fort. La méfiance d'eux-mêmes les embarrasse, la crainte de déplaire les épouvante; d'ailleurs, les affections profondes ressemblent aux honnêtes femmes: elles ont peur d'être découvertes, et passent dans la vie les yeux baissés.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 20/05/2013

 

Pour vivre, je ne dis pas heureux (ce but est une illusion funeste), mais tranquille, il faut se créer en dehors de l'existence visible, commune et générale à tous, une autre exigence interne et inaccessible à ce qui rentre dans le domaine du contingent, comme disent les philosophes. Heureux les gens qui ont passé leurs jours à piquer des insectes sur des feuilles de liège ou à contempler avec une loupe les médailles rouillées des empereurs romains! Quand il se mêle à cela un peu de poésie ou d'entrain, on doit remercier le ciel de vous avoir fait ainsi naître.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par jlm le 03/08/2013

 

Le bonheur est un mensonge dont la recherche cause toutes les calamités de la vie, mais il y a des paix sereines qui l'imitent, et qui sont supérieures peut-être.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par jlm le 04/06/2013

 

Dans l'adolescence on aime les autres femmes parce qu'elles ressemblent plus ou moins à la première; plus tard on les aime parce qu'elles diffèrent entre elles.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 15/05/2011

Catégories:

Il y a des outrages qui vous vengent de tous les triomphes, des sifflets qui sont plus doux pour l'orgueil que des bravos.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 15/05/2011

Catégories:

La censure, quelle qu'elle soit, me paraît une monstruosité, une chose pire que l'homicide; l'attentat contre la pensée est un crime de lèse-âme. La mort de Socrate pèse encore sur le genre humain.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 15/05/2011

Catégories:

Le souvenir est l'espérance renversée. On regarde le fond du puits comme on a regardé le sommet de la tour.


Par: Gustave Flaubert

Ajoutée par Savinien le 15/05/2011

Catégories: