Citations de Les musardises, de Edmond Rostand

8 Citations

J'ai pris les souliers de satin
Que chaussent ses petits pieds roses...
Ils sont devenus mon butin,
Car je lui vole mille choses,

Et dans sa chambre, portes closes,
J'ai fait plus d'un vol clandestin...
J'ai pris les souliers de satin
Que chaussent ses petits pieds roses.

Avec un amour enfantin
Je les garnis de fleurs écloses...
Sur ma table, chaque matin,
Je remets des nouvelles roses
Dans chaque soulier de satin.


Par: Edmond Rostand

Ajoutée par Savinien le 19/05/2021

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Lettre


Je suis très loin de vous, très loin, ma chère Aimée.
Comme la vie est dure aux pauvres amoureux!...
Trouvez-vous pas qu'ensemble on était bien heureux?
Ah! La chambre bien close, et tiède, et parfumée!

Écrivez-moi souvent. Dites-moi s'il fait beau,
Si vous m'aimez toujours, si nul ne me dérobe
Votre coeur?... Contez-moi votre nouvelle robe
Et si vous avez mis votre joli chapeau.

C'est affreux de songer le soir, petite amie,
Que loin, si loin de moi, vous êtes endormie.
Et je pense aux frisons serrés de votre cou,

A votre bouche, à vos yeux clairs, à votre rire...
Adieu, mon cher trésor. Je voulais vous écrire
Ceci, tout simplement: je vous aime beaucoup.


Par: Edmond Rostand

Ajoutée par Savinien le 19/05/2021

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Dessous sa grande ombrelle rose
Elle est toute rose. On dirait
Un peu d'une très pâle rose
Qu'un soleil couchant rosirait.

Un rayon qui descend tout rose
A travers le rose satin
Avive joliment son teint...
Et sa main blanche qui se pose
Sur le long manche de bambou,
Les petits cheveux de son cou,
Sa nuque blonde, tout est rose,
Mais d'un rose, d'un rose fou!...


Par: Edmond Rostand

Ajoutée par Savinien le 19/05/2021

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Les glycines


Mon balcon s'orne de glycines
Dont les grappes couleur lilas
Retombent d'un air doux et las
Avec des grâces féminines.

Elles ont des airs de langueur,
Mes glycines, de nonchalance, -
Et quand la brise les balance
Dans le jour qui traîne en longueur,

Et tarde à mourir, et recule
Tant qu'il peut l'heure de sa fin, -
Elles ont un parfum très fin...
Comme l'odeur du crépuscule.


Par: Edmond Rostand

Ajoutée par Savinien le 19/05/2021

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La première


Or, c'est Dieu qui fit la première,
Qui façonna son corps si cher
Lui-même, dans de la lumière,
Et pétrit son exquise chair...

Il mit sur sa peau de l'aurore
Et des soirs d'été dans ses yeux, -
Puis il tissa pour elle encore
Le soleil en rayons soyeux...

De ses adroites mains divines,
Le bon Dieu sculptait, il dorait...
Et déjà le souffle odorait
Entre les lèvres purpurines.

Déjà l'oeil charmant s'entr'ouvrait
Comme s'entr'ouvre une pervenche, -
Et du talon fin à la hanche
La ligne onduleuse courait.

Embaumante comme une rose
Que bercent les vents attiédis,
Émerveillant le paradis
Dans un rayon de soleil rose,

Ève s'épanouit, semblant
Sous les branches, nue et pudique,
Quelque grand lys doux et tremblant,
Une floraison magnifique!...

Alors Dieu, souriant, lui dit:
« Tu feras le bonheur de l'homme. »
Or, c'est elle qui le perdit
En lui faisant croquer la pomme.

Des autres femmes cependant,
Hélas! Que faut-il qu'on espère?...
La première perdit Adam:
Et c'est Dieu qui fit la première!...


Par: Edmond Rostand

Ajoutée par Savinien le 19/05/2021

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Le tambourineur


A l'heure où l'invisible orchestre des cigales
N'exerce pas encore ses petites cymbales,
Quand l'horizon est rose et vert, de bon matin,
Par les sentiers pierreux de la blanche colline,
En jouant un vieil air lentement s'achemine
Le tambourineur, beau comme un pâtre latin.

Sous les pins parasols d'où pleuvent les aiguilles
Qui rendent les sentiers glissants, il fait des trilles
Sur le fin gaboulet, comme un merle siffleur.
Sa longue caisse aux flots de rubans verts ballante.
Il s'en va pour donner une aubade galante
A la belle qui l'a choisi pour cajoleur.


Par: Edmond Rostand

Ajoutée par Savinien le 26/09/2010

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Les songe-creux


Nous sommes de bien douces gens
Qui ne faisons mal à personne,
Contents de peu, point exigeants,
Heureux d'une rime qui sonne,
Heureux d'un beau vers entendu,
D'une ballade commencée,
D'une chimère caressée,
D'un penser finement rendu.
De bon sens peut-être indigents,
Détestant tout ce qui raisonne,
Nous sommes de bien douces gens
Qui ne faisons mal à personne!


Par: Edmond Rostand

Ajoutée par Savinien le 26/09/2010

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Le petit chat


C'est un petit chat noir effronté comme un page,
Je le laisse jouer sur ma table souvent,
Quelquefois il s'assied sans faire de tapage:
On dirait un joli presse-papiers vivant.

Rien de lui, pas un poil de sa toison ne bouge.
Longtemps il reste là, noir sur un feuillet blanc,
A ces matous, tirant leur langue de drap rouge,
Qu'on fait pour essuyer les plumes, ressemblant.


Par: Edmond Rostand

Ajoutée par Savinien le 25/09/2010

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