Citations de C'était bien, de Jean d' Ormesson

12 Citations

Ne vous laissez pas abuser. Souvenez-vous de vous méfier. Et même de l'évidence: elle passe son temps à changer. Ne mettez trop haut ni les gens ni les choses. Ne les mettez pas trop bas. Non, ne les mettez pas trop bas. Montez. Renoncez à la haine: elle fait plus de mal à ceux qui l'éprouvent qu'à ceux qui en sont l'objet. Ne cherchez pas à être sage à tout prix. La folie aussi est une sagesse. Et la sagesse, une folie. Fuyez les préceptes et les donneurs de leçons. Jetez ce livre. Faites ce que vous voulez. Et ce que vous pouvez. Pleurez quand il le faut. Riez.
J'ai beaucoup ri. J'ai ri du monde et des autres et de moi. Rien n'est très important. Tout est tragique. Tout ce que nous aimons mourra. Et je mourrai moi aussi. La vie est belle.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par Savinien le 18/10/2013

 

Il y a quelque chose de pire que de mourir: c'est de ne pas mourir. J'ai tant aimé la vie que j'accepte la mort comme son accomplissement. Le charme de la vie, sa grâce, son bonheur viennent de sa précarité. Il lui suffirait de durer un peu trop pour devenir lassante et peut-être atroce. Les dieux, pensaient les anciens, en guise sans doute de consolation, aiment ceux qui meurent jeunes. Si un génie, bienveillant ou malin, me proposait de prolonger ou de recommencer mon parcours dans le système implacable de l'espace et du temps, je déclinerais son offre. Nous vivons déjà bien plus longtemps que nos grands-parents. Une fois suffit. La messe est dite et la farce est jouée. Dieu sait si le voyage m'a plu. Je ne le referais pas volontiers. Merci beaucoup. Merci pour le séjour et merci pour le retour.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par Savinien le 18/10/2013

 

Rien ne nous est plus proche que le temps. Pour chacun d'entre nous, le temps est aussi proche que la vie, aussi proche que le monde, aussi proche que nous-mêmes. Il est au plus intime de ce que je suis et de ce que vous êtes. Nous pouvons, avec de plus en plus de facilité, nous déplacer dans l'espace. Nous sommes rivés au temps et à notre temps. L'espace est la forme de notre puissance. Le temps est la forme de notre impuissance. Nous sommes les maîtres de l'espace. Le temps est notre maître.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par Savinien le 15/10/2013

 

Nous sommes la proie depuis toujours de deux tentations symétriques et funestes: l'angélisme et le désespoir. Au-delà d'un optimisme et d'un pessimisme également sans fondement, la vie a toujours été et sera toujours une souffrance - et elle est un miracle: elle est une fête en larmes.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par Savinien le 15/10/2013

 

Beaucoup se plaignent du présent: l'avenir est au moins aussi rongé de doutes que le présent. Qu'est-ce qui reste? Pas grand-chose. Malgré la science ou à cause d'elle, malgré le progrès ou à cause de lui, nous sommes guettés par une absence d'espoir. Par trop de choses qui se réduisent à rien. Par un néant surpeuplé. On peut s'y faire. On a du mal. Regardez autour de vous.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par Savinien le 15/10/2013

 

Le monde change, bien sûr, mais un de ses traits ne varie pas: tant qu'il y aura des hommes, ils aspireront à autre chose. Autre chose que ce qu'ils ont déjà, autre chose que la vie de chaque jour, autre chose que la vie tout court. Ils ne vivent, chacun le sait et l'éprouve, que de rêves et d'espoir. Ils n'ont pas fini de rêver.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par Savinien le 14/10/2013

 

A mesure que se gonfle, dans l'océan de ce que nous ne savons pas, la sphère de ce que nous savons, le nombre de points de contact entre savoir et ignorance croît proportionnellement. Le savoir avance de plus en plus vite vers une question ultime qui recule plus vite encore. C'est une course éblouissante et perdue d'avance, une guerre toute faite de victoires qui s'achève en défaite et en aveu d'impuissance. Le ver de l'échec est dans le fruit du savoir. La science ne cerne jamais qu'une illusion de réponse. Elle démonte tous les « comment? » qui s'emboîtent en abîme. Elle échoue devant le « pourquoi? » qui parviendrait seul à mettre fin au manège.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par Savinien le 14/10/2013

 

Peut-être Bach et Mozart composaient-ils des cantates et des airs d'opéra pour exprimer leur joie. Peut-être les peintres peignent-ils parce que le monde est beau. Je crois que les écrivains écrivent parce qu'ils éprouvent du chagrin. Je crois qu'il y a des livres parce qu'il y a du mal dans le monde et dans le coeur des hommes. Personne n'écrirait s'il n'y avait pas d'histoire. Et le moteur de l'histoire, c'est le mal.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par Savinien le 14/10/2013

 

Ma vie a fini par se confondre avec les livres que j'ai écrits. Il y a eu quelques amours qui ont compté plus que tout. Il y a eu, sur terre et sur mer, sur la neige, dans l'imagination et en songe, un tourbillon de plaisirs. Il y a eu les livres. Et puis, rien. Aime et fais ce que tu veux. Ecris des mots: c'est tout.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par Savinien le 12/10/2013

 

Qu'ai-je aimé dans cette vie que j'aurai tant aimée? C'est une question que chacun de nous, à moins de se résigner à passer pour un veau, doit bien finir par se poser. Il y a dans toute existence au moins deux interrogations auxquelles se mêle un peu d'angoisse. L'une au début: « que faire? » Elle m'a tourmenté jusqu'aux larmes. L'autre à la fin: « qu'ai-je donc fait? »


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par Savinien le 12/10/2013

 

Malgré ce que soutiennent les riches, l'argent suffit à faire le bonheur des pauvres; malgré ce que s'imaginent les pauvres, l'argent ne suffit pas à faire le bonheur des riches.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par jlm le 13/05/2013

 

De toutes les questions posées par la race meurtrière des biographes et des journalistes en quête, hélas toujours vaine, d'une originalité impossible, il en est une qui revient avec une régularité de métronome: « Qu'aviez-vous envie de faire plus tard quand vous étiez enfant? » Ce que je voulais faire? Je m'en souviens très clairement, avec une troublante précision. C'était: rien. J'avais envie de vivre et qu'on me fichât la paix.


Par: Jean d' Ormesson

Ajoutée par jlm le 03/01/2013