Citations de Souvenirs de la maison des morts, de Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski

5 Citations

En Russie, les gens qui montrent le plus de compassion pour les forçats sont bien certainement les médecins; ils ne font jamais entre les détenus les distinctions dont sont coupables les autres personnes en rapport direct avec ceux-ci. Seul, peut-être, le peuple lutte de compassion avec les docteurs, car il ne reproche jamais au criminel le délit qu'il a commis, quel qu'il soit; il le lui pardonne en faveur de la peine subie. Ce n'est pas en vain que le peuple, dans toute la Russie, appelle le crime un malheur et le criminel un malheureux.


Par: Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski

Ajoutée par Savinien le 06/03/2012

 

J'appris encore à connaître une souffrance qui peut-être est la plus aiguë, la plus douloureuse qu'on puisse ressentir dans une maison de détention, à part la privation de liberté: je veux parler de la cohabitation forcée. La cohabitation est plus ou moins forcée partout et toujours, mais nulle part elle n'est aussi horrible que dans une prison; il y a là des hommes avec lesquels personne ne voudrait vivre. Je suis certain que chaque condamné, - inconsciemment peut-être, - en a souffert.


Par: Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski

Ajoutée par Savinien le 06/03/2012

 

Les travaux ne me parurent pas très-pénibles; il me semblait que ce n'était pas la vraie fatigue du bagne. Je ne devinai que longtemps après pourquoi ce travail était dur et excessif; c'était moins par sa difficulté que parce qu'il était forcé, contraint, obligatoire, et qu'on ne l'accomplissait que par crainte du bâton. Le paysan travaille certainement beaucoup plus que le forçat, car pendant l'été il peine nuit et jour; mais c'est dans son propre intérêt qu'il se fatigue, son but est raisonnable, aussi endure-t-il moins que le condamné qui exécute un travail forcé dont il ne retire aucun profit. Il m'est venu un jour à l'idée que si l'on voulait réduire un homme à néant, le punir atrocement, l'écraser tellement que le meurtrier le plus endurci tremblerait lui-même devant ce châtiment et s'effrayerait d'avance, il suffirait de donner à son travail un caractère de complète inutilité, voire même d'absurdité.


Par: Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski

Ajoutée par Savinien le 06/03/2012

 

Souvent un homme qui supporte pendant plusieurs années les châtiments les plus cruels, se révolte pour une bagatelle, pour un rien. On pourrait même dire que c'est un fou... C'est du reste ce que l'on fait.


Par: Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski

Ajoutée par Savinien le 06/03/2012

 

Dans une seule chambre on parquait plus de trente hommes. C'était surtout en hiver qu'on nous enfermait de bonne heure; il fallait attendre quatre heures au moins avant que tout le monde fût endormi, aussi était-ce un tumulte, un vacarme de rires, de jurons, de chaînes qui sonnaient, une vapeur infecte, une fumée épaisse, un brouhaha de têtes rasées, de fronts stigmatisés, d'habits en lambeaux, tout cela encanaillé, dégoûtant; oui, l'homme est un animal vivace! On pourrait le définir: un être qui s'habitue à tout, et ce serait peut-être là la meilleure définition qu'on en ait donnée.


Par: Fiodor Mikhaïlovitch Dostoïevski

Ajoutée par Savinien le 06/03/2012