Citations de Antoine de Saint-Exupéry

65 Citations

Mais vers les derniers jours je perdais la mémoire. J'étais reparti depuis longtemps déjà, lorsque la lumière se faisait en moi: j'avais chaque fois oublié quelque chose. La première fois, ce fut un gant, et c'était grave par ce froid! Je l'avais déposé devant moi et j'étais reparti sans le ramasser. Ce fut ensuite ma montre. Puis mon canif. Puis ma boussole. A chaque arrêt je m'appauvrissais...
« Ce qui sauve, c'est de faire un pas. Encore un pas. C'est toujours le même pas que l'on recommence... »


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 24/01/2022

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Il n'est point de paysage découvert du haut des montagnes si nul n'en a gravi la pente, car ce paysage n'est point spectacle mais domination.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 22/01/2021

 

La chenille meurt quand elle forme sa chrysalide. La plante meurt quand elle monte en graine. Quiconque mue connaît la tristesse et l'angoisse. Tout en lui se fait inutile.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 22/01/2021

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Je te l'ai déjà dit. Erreur de l'un, réussite de l'autre, ne t'inquiète point de ces divisions. Il n'est de fertile que la grande collaboration de l'un à travers l'autre. Et le geste manqué sert le geste qui réussit. Et le geste qui réussit montre le but qu'ils poursuivaient ensemble à celui-là qui a manqué le sien.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 22/01/2021

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Créer, c'est manquer peut-être ce pas dans la danse. C'est donner de travers ce coup de ciseau dans la pierre. Peu importe le destin du geste.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 22/01/2021

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Je n'aime pas les sédentaires du coeur. Ceux-là qui n'échangent rien ne deviennent rien. Et la vie n'aura point servi à les mûrir. Et le temps coule pour eux comme la poignée de sable et les perd.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 22/01/2021

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Nous découvrions que la vie n'a de sens que si on l'échange peu à peu. La mort du jardinier n'est rien qui lèse un arbre. Mais si tu menaces l'arbre, alors meurt deux fois le jardinier. Et il y avait parmi nous un vieux conteur qui connaissait les plus beaux contes du désert. Et qui les avait embellis. Et qui était seul à les connaître n'ayant point de fils. Et tandis que la terre commençait de glisser il tremblait pour de pauvres contes qui jamais plus ne seraient chantés par personne.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 22/01/2021

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Et tu l'as vu toi-même des constellations: celle-là est un cygne. Mais l'autre eût pu t'y montrer une femme couchée. Il vient trop tard. Nous ne nous évaderons jamais plus du cygne. Le cygne inventé nous a saisis.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 18/01/2021

 

Quand on habite le navire, on ne voit plus la mer. Ou, si l'on aperçoit la mer, elle n'est plus qu'ornement du navire. Tel est le pouvoir de l'esprit. La mer lui parut faite pour porter le navire.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 18/01/2021

 

Il est toujours possible de jeter bas le temple et d'en prélever les pierres pour un autre temple. Et l'autre n'est ni plus vrai, ni plus faux, ni plus juste, ni plus injuste. Et nul ne connaîtra le désastre, car la qualité du silence ne s'est pas inscrite dans le tas de pierres.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 18/01/2021

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Je sais trop bien qu'en assemblant des pierres c'est du silence que l'on crée. Lequel ne se lisait point dans les pierres.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 18/01/2021

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Ainsi ai-je longtemps médité sur le sens de la paix. Elle ne vient que des enfants nés, que des moissons faites, que de la maison enfin rangée. Elle vient de l'éternité où rentrent les choses accomplies. Paix des granges pleines, des brebis qui dorment, des linges plies, paix de la seule perfection, paix de ce qui devient cadeau à Dieu, une fois bien fait.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 18/01/2021

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J'interdis que l'on interroge, sachant qu'il n'est jamais de réponse qui désaltère. Celui qui interroge, ce qu'il cherche d'abord c'est l'abîme.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 18/01/2021

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L'arbre n'est point semence, puis tige, puis tronc flexible, puis bois mort. Il ne faut point le diviser pour le connaître. L'arbre, c'est cette puissance qui lentement épouse le ciel.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 18/01/2021

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L'essentiel de la caravane, tu le découvres quand elle se consume. Oublie le vain bruit des paroles et vois: si le précipice s'oppose à sa marche, elle contourne le précipice, si le roc se dresse, elle l'évite, si le sable est trop fin, elle cherche ailleurs un sable dur, mais toujours elle reprend la même direction. Si le sel d'une saline craque sous le poids de ses fardeaux, tu la vois qui s'agite, désembourbe ses bêtes, tâtonne pour trouver une assise solide, mais bientôt rentre en ordre, une fois de plus, dans sa direction primitive. Si une monture s'abat on fait halte, on ramasse les caisses brisées, on en charge une autre monture, on tire pour les amarrer bien sur le noeud de corde craquante, puis l'on reprend la même route. Parfois meurt celui-là qui servait de guide. On l'entoure. On l'enfouit dans le sable. On dispute. Puis on en pousse un autre au rang de conducteur et l'on met le cap une fois encore sur le même astre. La caravane se meut ainsi nécessairement dans une direction qui la domine, elle est pierre pesante sur une pente invisible.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 18/01/2021

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Il fut un âge aussi où j'eus pitié des morts. Croyant que celui-là que je sacrifiais dans son désert sombrait dans une solitude désespérée, n'ayant point encore entrevu qu'il n'est jamais de solitude pour ceux qui meurent.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Citadelle (1948)

Ajoutée par Savinien le 18/01/2021

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Etre homme, c'est précisément être responsable. C'est connaître la honte en face d'une misère qui ne semblait pas dépendre de soi. C'est être fier d'une victoire que les camarades ont remportée. C'est sentir, en posant sa pierre, que l'on contribue à bâtir le monde.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 16/01/2021

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Pareils à ces voleurs des villes fabuleuses, murés dans la chambre aux trésors dont ils ne sauront plus sortir. Parmi des pierreries glacées, ils errent, infiniment riches, mais condamnés.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Vol de nuit (1931)

Ajoutée par None sense le 12/01/2021

 

- Le désert est beau, ajouta-t-il...
Et c'était vrai. J'ai toujours aimé le désert. On s'assoit sur une dune de sable. On ne voit rien. On n'entend rien. Et cependant quelque chose rayonne en silence...
- Ce qui embellit le désert, dit le petit prince, c'est qu'il cache un puits quelque part...


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 14/08/2020

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Peut-être bien que cet homme est absurde. Cependant il est moins absurde que le roi, que le vaniteux, que le businessman et que le buveur. Au moins son travail a-t-il un sens. Quand il allume son réverbère, c'est comme s'il faisait naître une étoile de plus, ou une fleur. Quand il éteint son réverbère, ça endort la fleur ou l'étoile. C'est une occupation très jolie. C'est véritablement utile puisque c'est joli.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 14/08/2020

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Nous nous étions enfin rencontrés. On chemine longtemps côte à côte, enfermé dans son propre silence, ou bien l'on échange des mots qui ne transportent rien. Mais voici l'heure du danger. Alors on s'épaule l'un à l'autre. On découvre que l'on appartient à la même communauté. On s'élargit par la découverte d'autres consciences. On se regarde avec un grand sourire. On est semblable à ce prisonnier délivré qui s'émerveille de l'immensité de la mer.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 18/05/2020

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Eau, tu n'as ni goût, ni couleur, ni arôme, on ne peut pas te définir, on te goûte, sans te connaître. Tu n'es pas nécessaire à la vie tu es la vie. Tu nous pénètres d'un plaisir qui ne s'explique point par les sens. Avec toi rentrent en nous tous les pouvoirs auxquels nous avions renoncé. Par ta grâce, s'ouvrent en nous toutes les sources taries de notre cœur.
Tu es la plus grande richesse qui soit au monde, et tu es aussi la plus délicate, toi si pure au ventre de la terre. On peut mourir sur une source d'eau magnésienne. On peut mourir à deux pas d'un lac d'eau salée. On peut mourir malgré deux litres de rosée qui retiennent en suspens quelques sels. Tu n'acceptes point de mélange, tu ne supportes point d'altération, tu es une ombrageuse divinité...
Mais tu répands en nous un bonheur infiniment simple.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 11/03/2020

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Mais je connais la solitude. Trois années de désert m'en ont bien enseigné le goût. On ne s'y effraie point d'une jeunesse qui s'use dans un paysage minéral, mais il y apparaît que, loin de soi, c'est le monde entier qui vieillit. Les arbres ont formé leurs fruits, les terres ont sorti leur blé, les femmes déjà sont belles. Mais la saison avance, il faudrait se hâter de rentrer... Mais la saison avance et l'on est retenu au loin... Et les biens de la terre glissent entre les doigts comme le sable fin des dunes.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 11/03/2020

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En descendant moteur au ralenti sur San Julian, Fabien se sentit las. Tout ce qui fait douce la vie des hommes grandissait vers lui: leurs maisons, leurs petits cafés, les arbres de leur promenade. Il était semblable à un conquérant, au soir de ses conquêtes, qui se penche sur les terres de l'empire, et découvre l'humble bonheur des hommes. Fabien avait besoin de déposer les armes, de ressentir sa lourdeur et ses courbatures, on est riche aussi de ses misères, et d'être ici un homme simple, qui regarde par la fenêtre une vision désormais immuable.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Vol de nuit (1931)

Ajoutée par Savinien le 06/01/2019

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Il s'aperçut qu'il avait peu à peu repoussé vers la vieillesse, pour « quand il aurait le temps » ce qui fait douce la vie des hommes. Comme si réellement on pouvait avoir le temps un jour, comme si l'on gagnait, à l'extrémité de la vie, cette paix bienheureuse que l'on imagine. Mais il n'y a pas de paix. Il n'y a peut-être pas de victoire.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Extrait de: Vol de nuit (1931)

Ajoutée par Savinien le 06/01/2019

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Quand nous marcherons dans la bonne direction, celle que nous avons prise dès l'origine, en nous éveillant de la glaise, alors seulement nous serons heureux. Alors nous pourrons vivre en paix, car ce qui donne un sens à la vie donne un sens à la mort.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 06/01/2019

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J'ai élevé des gazelles à Juby [...] Capturées jeunes, elles vivent cependant et broutent dans votre main. Elles se laissent caresser et plongent leur museau humide dans le creux de la paume. Et on les croit apprivoisées. On croit les avoir abritées du chagrin inconnu qui éteint sans bruit les gazelles, et leur fait la mort la plus tendre... Mais vient le jour où vous les retrouvez, pesant de leurs petites cornes contre l'enclos, dans la direction du désert. [...] Elles demeurent là, n'essayant même pas de lutter contre la barrière, mais pesant simplement contre elle, la nuque basse, de leurs petites cornes, jusqu'à en mourir. [...] Ce qu'elles cherchent, vous le savez, c'est l'étendue qui les accomplira. Elles veulent devenir gazelles et danser leur danse. A cent trente kilomètres à l'heure, elles veulent connaître la fuite rectiligne, coupée de brusques jaillissements, comme si, ça et là, des flammes s'échappaient du sable. Peu importent les chacals, si la vérité des gazelles est de goûter la peur qui les contraint seule à se surpasser, et tire d'elles les plus hautes voltiges! Qu'importe le lion si la vérité des gazelles est d'être ouvertes d'un coup de griffes dans le soleil. Vous les regardez et vous songez: les voila prises de nostalgie... La nostalgie, c'est le désir d'on ne sait quoi. Il existe, l'objet du désir, mais il n'est point de mots pour le dire.
Et à nous, que nous manque-t-il?


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 06/01/2019

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- Tu regarderas, la nuit, les étoiles. C'est trop petit chez moi pour que je te montre où se trouve la mienne. C'est mieux comme ça. Mon étoile, ça sera pour toi une des étoiles. Alors, toutes les étoiles, tu aimeras les regarder... Elles seront toutes tes amies. Et puis je vais te faire un cadeau... Il rit encore.
- Ah! Petit bonhomme, petit bonhomme j'aime entendre ce rire!
- Justement ce sera mon cadeau... Ce sera comme pour l'eau...
- Que veux-tu dire?
- Les gens ont des étoiles qui ne sont pas les mêmes. Pour les uns, qui voyagent, les étoiles sont des guides. Pour d'autres elles ne sont rien que de petites lumières. Pour d'autres, qui sont savants, elles sont des problèmes. Pour mon businessman elles étaient de l'or. Mais toutes ces étoiles-là se taisent. Toi, tu auras des étoiles comme personne n'en a...
- Que veux-tu dire?
- Quand tu regarderas le ciel, la nuit, puisque j'habiterai dans l'une d'elles, puisque je rirai dans l'une d'elles, alors ce sera pour toi comme si riaient toutes les étoiles. Tu auras, toi, des étoiles qui savent rire!


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 04/01/2016

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Un rapide illuminé, grondant comme le tonnerre, fit trembler la cabine d'aiguillage.
- Ils sont bien pressés, dit le petit prince. Que cherchent-ils?
- L'homme de la locomotive l'ignore lui-même, dit l'aiguilleur.
Et gronda, en sens inverse, un second rapide illuminé.
- Ils reviennent déjà? Demanda le petit prince...
- Ce ne sont pas les mêmes, dit l'aiguilleur. C'est un échange.
- Ils n'étaient pas contents, là où ils étaient?
- On n'est jamais content là où l'on est, dit l'aiguilleur.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 28/12/2015

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- Adieu, dit le renard. Voici mon secret. Il est très simple: on ne voit bien qu'avec le coeur. L'essentiel est invisible pour les yeux.
- L'essentiel est invisible pour les yeux, répéta le petit prince, afin de se souvenir.
- C'est le temps que tu as perdu pour ta rose qui fait ta rose si importante.
- C'est le temps que j'ai perdu pour ma rose... Fit le petit prince, afin de se souvenir.
- Les hommes ont oublié cette vérité, dit le renard. Mais tu ne dois pas l'oublier. Tu deviens responsable pour toujours de ce que tu as apprivoisé. Tu es responsable de ta rose...


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 28/12/2015

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- Il eût mieux valu revenir à la même heure, dit le renard. Si tu viens, par exemple, à quatre heures de l'après-midi, dès trois heures je commencerai d'être heureux. Plus l'heure avancera, plus je me sentirai heureux. A quatre heures, déjà, je m'agiterai et m'inquiéterai; je découvrirai le prix du bonheur!
Mais si tu viens n'importe quand, je ne saurai jamais à quelle heure m'habiller le coeur... Il faut des rites.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 28/12/2015

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Le renard se tut et regarda longtemps le petit prince:
- S'il te plaît... Apprivoise-moi! Dit-il.
- Je veux bien, répondit le petit prince, mais je n'ai pas beaucoup de temps. J'ai des amis à découvrir et beaucoup de choses à connaître.
- On ne connaît que les choses que l'on apprivoise, dit le renard. Les hommes n'ont plus le temps de rien connaître. Ils achètent des choses toutes faites chez les marchands. Mais comme il n'existe point de marchands d'amis, les hommes n'ont plus d'amis. Si tu veux un ami, apprivoise-moi!


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 20/12/2015

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- Tu es une drôle de bête, lui dit-il enfin, mince comme un doigt...
- Mais je suis plus puissant que le doigt d'un roi, dit le serpent.
Le petit prince eut un sourire:
- Tu n'es pas bien puissant... Tu n'as même pas de pattes... Tu ne peux même pas voyager...
- Je puis t'emporter plus loin qu'un navire, dit le serpent. Il s'enroula autour de la cheville du petit prince, comme un bracelet d'or:
- Celui que je touche, je le rends à la terre dont il est sorti, dit-il encore. Mais tu es pur et tu viens d'une étoile...
Le petit prince ne répondit rien.
- Tu me fais pitié, toi si faible, sur cette Terre de granit. Je puis t'aider un jour si tu regrettes trop ta planète. Je puis...
- Oh! J'ai très bien compris, fit le petit prince, mais pourquoi parles-tu toujours par énigmes?
- Je les résous toutes, dit le serpent.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 20/12/2015

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- Où sont les hommes? Reprit enfin le petit prince. On est un peu seul dans le désert...
- On est seul aussi chez les hommes, dit le serpent.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 20/12/2015

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Le petit prince s'assit sur une pierre et leva les yeux vers le ciel:
- Je me demande, dit-il, si les étoiles sont éclairées afin que chacun puisse un jour retrouver la sienne.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 19/12/2015

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Ainsi le petit prince, malgré la bonne volonté de son amour, avait vite douté d'elle. Il avait pris au sérieux des mots sans importance, et était devenu très malheureux. « J'aurais dû ne pas l'écouter, me confia-t-il un jour, il ne faut jamais écouter les fleurs. Il faut les regarder et les respirer. »


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 19/12/2015

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Si quelqu'un aime une fleur qui n'existe qu'à un exemplaire dans les millions et les millions d'étoiles, ça suffit pour qu'il soit heureux quand il les regarde. Il se dit: « Ma fleur est là quelque part... » Mais si le mouton mange la fleur, c'est pour lui comme si, brusquement, toutes les étoiles s'éteignaient!


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 19/12/2015

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Si je vous ai raconté ces détails sur l'astéroïde B612 et si je vous ai confié son numéro, c'est à cause des grandes personnes. Les grandes personnes aiment les chiffres. Quand vous leur parlez d'un nouvel ami, elles ne vous questionnent jamais sur l'essentiel. Elles ne vous disent jamais: « Quel est le son de sa voix? Quels sont les jeux qu'il préfère? Est-ce qu'il collectionne les papillons? » Elles vous demandent: « Quel âge a-t-il? Combien a-t-il de frères? Combien pèse-t-il? Combien gagne son père? » Alors seulement elles croient le connaître. Si vous dites aux grandes personnes: « J'ai vu une belle maison en briques roses, avec des géraniums aux fenêtres et des colombes sur le toit... » elles ne parviennent pas à s'imaginer cette maison. Il faut leur dire: « J'ai vu une maison de cent mille francs. » Alors elles s'écrient: « Comme c'est joli! »


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 18/12/2015

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- Mais si tu ne l'attaches pas, il ira n'importe où, et il se perdra...
Et mon ami eut un nouvel éclat de rire:
- Mais où veux-tu qu'il aille!
- N'importe où. Droit devant lui...
Alors le petit prince remarqua gravement:
- Ça ne fait rien, c'est tellement petit, chez moi!
Et, avec un peu de mélancolie, peut-être, il ajouta:
- Droit devant soi on ne peut pas aller bien loin...


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 18/12/2015

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J'ai ainsi eu, au cours de ma vie, des tas de contacts avec des tas de gens sérieux. J'ai beaucoup vécu chez les grandes personnes. Je les ai vues de très près. Ça n'a pas trop amélioré mon opinion.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 18/12/2015

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Quand nous prendrons conscience de notre rôle, même le plus effacé, alors seulement nous serons heureux. Alors seulement nous pourrons vivre en paix et mourir en paix, car ce qui donne un sens à la vie donne un sens à la mort.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 25/03/2011

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Nous voulons être délivrés. Celui qui donne un coup de pioche veut connaître un sens à son coup de pioche. Et le coup de pioche du bagnard, qui humilie le bagnard, n'est point le même que le coup de pioche du prospecteur, qui grandit le prospecteur. Le bagne ne réside point là où des coups de pioche sont donnés. Il n'est pas d'horreur matérielle. Le bagne réside là où des coups de pioche sont donnés qui n'ont point de sens, qui ne relient pas celui qui les donne à la communauté des hommes.
Et nous voulons nous évader du bagne.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 21/03/2011

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On peut ranger les hommes en hommes de droite et en hommes de gauche, en bossus et en non bossus, en fascistes et en démocrates, et ces distinctions sont inattaquables. Mais la vérité, vous le savez, c'est ce qui simplifie le monde et non ce qui crée le chaos. La vérité, c'est le langage qui dégage l'universel. Newton n'a point « découvert » une loi longtemps dissimulée à la façon d'une solution de rébus, Newton a effectué une opération créatrice. Il a fondé un langage d'homme qui pût exprimer à la fois la chute de la pomme dans un pré ou l'ascension du soleil. La vérité, ce n'est point ce qui se démontre, c'est ce qui simplifie.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 21/03/2011

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L'expérience nous montre qu'aimer ce n'est point nous regarder l'un l'autre mais regarder ensemble dans la même direction.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 21/03/2011

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Je ne découvre plus rien en moi, sinon une grande sécheresse de coeur. Je vais tomber et ne connais point le désespoir. Je n'ai même pas de peine. Je le regrette: le chagrin me semblerait doux comme l'eau. On a pitié de soi et l'on se plaint comme un ami. Mais je n'ai plus d'ami au monde.
Quand on me retrouvera, les yeux brûlés, on imaginera que j'ai beaucoup appelé et beaucoup souffert. Mais les élans, mais les regrets, mais les tendres souffrances, ce sont encore des richesses. Et moi je n'ai plus de richesses. Les fraîches jeunes filles, au soir de leur premier amour, connaissent le chagrin et pleurent. Le chagrin est lié aux frémissements de la vie. Et moi je n'ai plus de chagrin...


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 21/03/2011

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Je ne regrette rien. J'ai joué, j'ai perdu. C'est dans l'ordre de mon métier. Mais, tout de même, je l'ai respiré, le vent de la mer.
Ceux qui l'ont goûté une fois n'oublient pas cette nourriture. N'est-ce pas, mes camarades? Et il ne s'agit pas de vivre dangereusement. Cette formule est prétentieuse. Les toréadors ne me plaisent guère. Ce n'est pas le danger que j'aime. Je sais ce que j'aime. C'est la vie.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 21/03/2011

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Je ne comprends plus ces populations des trains de banlieue, ces hommes qui se croient des hommes, et qui cependant sont réduits, par une pression qu'ils ne sentent pas, comme les fourmis, à l'usage qui en est fait. De quoi remplissent-ils, quand ils sont libres, leurs absurdes petits dimanches?


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 19/03/2011

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Adieu, vous que j'aimais. Ce n'est point ma faute si le corps humain ne peut résister trois jours sans boire. Je ne me croyais pas prisonnier ainsi des fontaines. Je ne soupçonnais pas une aussi courte autonomie. On croit que l'homme peut s'en aller droit devant soi. On croit que l'homme est libre... On ne voit pas la corde qui le rattache au puits, qui le rattache, comme un cordon ombilical, au ventre de la terre. S'il fait un pas de plus, il meurt.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 19/03/2011

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Nous sommes condamnés et encore une fois cette certitude ne me frustre pas de mon plaisir. Cette demi-orange que je serre dans la main m'apporte une des plus grandes joies de ma vie... Je m'allonge sur le dos, je suce mon fruit, je compte les étoiles filantes. Me voici, pour une minute, infiniment heureux. Et je me dis encore: « Le monde dans l'ordre duquel nous vivons, on ne peut pas le deviner si l'on n'y est pas enfermé soi-même. » Je comprends aujourd'hui seulement la cigarette et le verre de rhum du condamné. Je ne concevais pas qu'il acceptât cette misère. Et cependant il y prend beaucoup de plaisir. On imagine cet homme courageux s'il sourit. Mais il sourit de boire son rhum. On ne sait pas qu'il a changé de perspective et qu'il a fait, de cette dernière heure, une vie humaine.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 19/03/2011

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Et je reste là à rêver et il me semble que l'on s'adapte à tout. L'idée qu'il mourra peut-être trente ans plus tard ne gâte pas les joies d'un homme. Trente ans, trois jours... C'est une question de perspective.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 19/03/2011

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Cap Juby, Cisneros, Puerto-Cansado, la Saguet-El-Hamra, Dora, Smarra, il n'est plus de mystère. Les horizons vers lesquels nous avons couru se sont éteints l'un après l'autre, comme ces insectes qui perdent leurs couleurs une fois pris au piège des mains tièdes. Mais celui qui les poursuivait n'était pas le jouet d'une illusion. Nous ne nous trompions pas, quand nous courions ces découvertes. Le Sultan des Milles et une Nuits non plus, qui poursuivait une matière si subtile, que ses belles captives, une à une, s'éteignaient à l'aube dans ses bras, ayant perdu, à peine touchées, l'or de leurs ailes. Nous nous sommes nourris de la magie des sables, d'autres peut-être y creuseront leurs puits de pétrole, et s'enrichiront de leurs marchandises. Mais ils seront venus trop tard. Car les palmeraies interdites, ou la poudre vierge des coquillages, nous ont livré leur part la plus précieuse: elles n'offraient qu'une heure de ferveur, et c'est nous qui l'avons vécue.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 19/03/2011

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Je me souviens des jeux de mon enfance, du parc sombre et doré que nous avions peuplé de dieux, du royaume sans limites que nous tirions de ce kilomètre carré jamais entièrement connu, jamais entièrement fouillé. Nous formions une civilisation close, où les pas avaient un goût, où les choses avaient un sens qui n'étaient permis dans aucune autre. Que reste-t-il lorsque, devenu homme, on vit sous d'autres lois, du parc plein d'ombre de l'enfance, magique, glacé, brûlant, dont maintenant, lorsque l'on y revient, on longe avec une sorte de désespoir, de l'extérieur, le petit mur de pierres grises, s'étonnant de trouver fermée dans une enceinte aussi étroite, une province dont on avait fait son infini, et comprenant que dans cet infini on ne rentrera jamais plus, car c'est dans le jeu, et non dans le parc, qu'il faudrait rentrer.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 17/03/2011

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J'allais chaque jour, sous les tentes, prendre le thé. Allongé là, pieds nus, sur le tapis de haute laine qui est le luxe du nomade, et sur lequel il fonde pour quelques heures sa demeure, je goûtais le voyage du jour. Dans le désert, on sent l'écoulement du temps. Sous la brûlure du soleil, on est en marche vers le soir, vers ce vent frais qui baignera les membres et lavera toute sueur. Sous la brûlure du soleil, bêtes et hommes, aussi sûrement que vers la mort, avancent vers ce grand abreuvoir. Ainsi l'oisiveté n'est jamais vaine. Et toute journée paraît belle comme ces routes qui vont à la mer.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 17/03/2011

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Il vaut mieux taire certains miracles. Il vaut même mieux n'y pas trop songer, sinon l'on ne comprend plus rien. Sinon, l'on doute de Dieu...


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 17/03/2011

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Ce n'est pas la distance qui mesure l'éloignement. Le mur d'un jardin de chez nous peut enfermer plus de secrets que le mur de Chine, et l'âme d'une petite fille est mieux protégée par le silence que ne le sont, par l'épaisseur des sables, les oasis sahariennes.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 17/03/2011

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On oublie que la vie est un luxe, et qu'il n'est nulle part de terre bien profonde sous le pas des hommes.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 17/03/2011

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Dans quel mince décor se joue ce vaste jeu des haines, des amitiés, des joies humaines! D'où les hommes tirent-ils ce goût d'éternité, hasardés comme ils sont sur une lave encore tiède et déjà menacés par les sables futurs, menacés par les neiges? Leurs civilisations ne sont que fragiles dorures: un volcan les efface, une mer nouvelle, un vent de sable.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 16/03/2011

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Il semble que la perfection soit atteinte non quand il n'y a plus rien à ajouter, mais quand il n'y a plus rien à retrancher. Au terme de son évolution, la machine se dissimule.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 16/03/2011

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Dans l'exaltation de nos progrès, nous avons fait servir les hommes à l'établissement des voies ferrées, à l'érection des usines, au forage de puits de pétrole. Nous avions un peu oublié que nous dressions ces constructions pour servir les hommes. Notre morale fut, pendant la durée de la conquête, une morale de soldats. Mais il nous faut, maintenant, coloniser. Il nous faut rendre vivante cette maison neuve qui n'a point encore de visage. La vérité, pour l'un, fut de bâtir, elle est, pour l'autre, d'habiter.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 16/03/2011

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Nous sommes tous de jeunes barbares que nos jouets neufs émerveillent encore. Nos courses d'avions n'ont point d'autre sens. Celui-là monte plus haut, court plus vite. Nous oublions pourquoi nous le faisons courir. La course, provisoirement, l'emporte sur son objet. Et il en est toujours de même.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 16/03/2011

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Une fois pris dans l'événement, les hommes ne s'en effraient plus. Seul l'inconnu épouvante les hommes. Mais, pour quiconque l'affronte, il n'est déjà plus l'inconnu.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 16/03/2011

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Il est une qualité qui n'a point de nom. Peut-être est-ce la « gravité », mais le mot ne satisfait pas. Car cette qualité peut s'accompagner de la gaieté la plus souriante. C'est la qualité même du charpentier qui s'installe d'égal à égal en face de sa pièce de bois, la palpe, la mesure et, loin de la traiter à la légère, rassemble à son propos toutes ses vertus.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 13/03/2011

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Telle est la morale que Mermoz et d'autres nous ont enseignée. La grandeur d'un métier est peut-être, avant tout, d'unir des hommes: il n'est qu'un luxe véritable, et c'est celui des relations humaines.
En travaillant pour les seuls biens matériels, nous bâtissons nous-mêmes notre prison. Nous nous enfermons solitaires, avec notre monnaie de cendre qui ne procure rien qui vaille de vivre.
Si je cherche dans mes souvenirs ceux qui m'ont laissé un goût durable, si je fais le bilan des heures qui ont compté, à coup sûr je retrouve celles que nulle fortune ne m'eût procurées. On n'achète pas l'amitié d'un Mermoz, d'un compagnon que les épreuves vécues ensemble ont lié à nous pour toujours.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 13/03/2011

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Rien, jamais, en effet, ne remplacera le compagnon perdu. On ne se crée point de vieux camarades. Rien ne vaut le trésor de tant de souvenirs communs, de tant de mauvaises heures vécues ensemble, de tant de brouilles, de réconciliations, de mouvements du coeur. On ne reconstruit pas ces amitiés-là. Il est vain, si l'on plante un chêne, d'espérer s'abriter bientôt sous son feuillage.
Ainsi va la vie. Nous nous sommes enrichis d'abord, nous avons planté pendant des années, mais viennent les années où le temps défait ce travail et déboise. Les camarades, un à un, nous retirent leur ombre. Et à nos deuils se mêle désormais le regret secret de vieillir.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 13/03/2011

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L'homme se découvre quand il se mesure avec l'obstacle.


Par: Antoine de Saint-Exupéry

Ajoutée par Savinien le 13/03/2011

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