Citations de Denis Diderot
52 Citations
Nos promenades, la petite bonne et moi, vont toujours leur train. Je me proposai dans la dernière de lui faire concevoir qu'il n'y avait aucune vertu qui n'eût deux récompenses: le plaisir de bien faire, et celui d'obtenir la bienveillance des autres; aucun vice qui n'eût deux châtiments: l'un au fond de notre coeur, un autre dans le sentiment d'aversion que nous ne manquons jamais d'inspirer aux autres.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 23/06/2020
Les meilleures gens en amitié sont quelquefois les plus sottes gens en amour. Le prince, qui est moraliste jusque par-dessus les oreilles, se sera avisé de lui donner quelques conseils sur leur bonheur à venir. Il y aura mis toute la douceur, tous les ménagements, tous les égards imaginables; et avec tout cela, on les aura mal pris, parce que les despotes en général n'aiment pas les conseils, et que les jolies femmes sont toutes despotes.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 23/06/2020
Quand on s'avise de mettre au creuset les actions les plus héroïques des hommes, on ne sait jamais comment elles en sortiront; tel s'estime beaucoup de ce qu'il a fait, qui en rabattrait beaucoup s'il s'occupait sérieusement à en démêler la raison.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 23/06/2020
Il me semble que, de toute éternité, la raison fut faite pour être foulée aux pieds par l'amour. Il me semble qu'on aime mal quand on connaît quelques devoirs. Je ne saurais m'empêcher de soupçonner les amants si sages de s'en imposer à eux mêmes; de croire qu'ils aiment comme au premier moment, parce qu'ils ont le langage du premier moment; je crois que, parce qu'ils disent comme autrefois, ils pensent sentir comme autrefois, et qu'il n'en est rien: parce qu'ils n'ont aucune raison de se plaindre réciproquement l'un de l'autre, ils se persuadent qu'ils sont les mêmes; qu'ils n'ont point changé l'un pour l'autre, parce qu'ils ne voient en eux aucun motif d'inconstance. Cette justice est dans la tête; elle n'est point dans le coeur. La tête dit ce qu'elle veut; le coeur sent comme il lui plaît. Rien n'est plus commun que de prendre sa tête pour son coeur.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 23/06/2020
Un des grands inconvénients de l'état de la société, c'est la multitude des occupations, et surtout la légèreté avec laquelle on prend des engagements qui disposent de tout le bonheur. On se marie, on prend un emploi, on a une femme, des enfants, avant que d'avoir le sens commun. Ah! Si c'était à recommencer! C'est un mot de repentir qu'on a perpétuellement à la bouche.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 23/06/2020
Je ne demande pas mieux que d'être heureux. Est-ce ma faute, si je ne le suis pas? Est-ce ma faute si je vois en tout des vices qui y sont et qui m'affligent; si toute la vie n'est qu'un mensonge, qu'un enchaînement d'espérances trompeuses? On sait cela trop tard: nous le disons à nos enfants qui n'en croient rien; ils ont des cheveux gris lorsqu'ils en sont convaincus.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 23/06/2020
Naître dans l'imbécillité, au milieu de la douleur et des cris; être le jouet de l'ignorance, de l'erreur, du besoin, des maladies, de la méchanceté et des passions; retourner pas à pas à l'imbécillité; du moment où l'on balbutie jusqu'au moment où l'on radote, vivre parmi des fripons et des charlatans de toute espèce; s'éteindre entre un homme qui vous tâte le pouls, et un autre qui vous trouble la tête; ne savoir d'où l'on vient, pourquoi l'on est venu, où l'on va: voilà ce qu'on appelle le présent le plus important de nos parents et de la nature, la vie.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 23/06/2020
Eh bien! Voilà donc le fond de l'âme d'un auteur; il veut plaire, même à ceux qu'il méprise; l'éloge de mille gens d'honneur, d'esprit et de goût ne le console pas de la critique d'un sot; il oublie la voix douce et flatteuse de ceux-ci, et le cri importun de celui-là retentit sans cesse à son oreille. On ne peut se résoudre à une injustice de tous les temps; on veut être excepté d'une loi, dure à la vérité, mais qui s'est exécutée depuis la création du monde sur tout ce qu'il y a eu de grands hommes: il faut que l'homme meure; il faut que l'homme supérieur soit persécuté.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 23/06/2020
Les libertins sont bienvenus dans le monde, parce qu'ils sont inadvertants, gais, plaisants, dissipateurs, doux, complaisants, amis de tous les plaisirs; c'est qu'il est impossible qu'un homme se ruine sans en enrichir d'autres; c'est que nous aimons mieux des vices qui nous servent en nous amusant, que des vertus qui nous rabaissent en nous chagrinant; c'est qu'ils sont remplis d'indulgence pour leurs défauts, entre lesquels il y en a aussi que nous avons; c'est qu'ils ajoutent sans cesse à notre estime par le mépris que nous faisons d'eux; c'est qu'ils nous mettent à notre aise; c'est qu'ils nous consolent de notre vertu par le spectacle amusant du vice; c'est qu'ils nous entretiennent de ce que nous n'osons ni parler ni faire; c'est que nous sommes toujours un peu vicieux; c'est qu'ordinairement les libertins sont plus aimables que les autres, qu'ils ont plus d'esprit, plus de connaissance des hommes et du coeur humain; les femmes les aiment, parce qu'elles sont libertines. Je ne suis pas bien sûr que les femmes se déplaisent sincèrement avec ceux qui les font rougir.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 10/06/2020
Il n'y a pas un homme de bien sur mille scélérats, et l'homme de bien est presque toujours victime.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 10/06/2020
Les gens du monde n'ont point d'honneur: ils font trop d'affaires et de trop importantes; ils s'écartent d'abord un peu du droit chemin, puis encore un peu, et de petits écarts en petits écarts réitérés, bientôt ils se trouvent tout à fait égarés, et ce qu'ils ont fait avec succès devient l'unique règle de ce qu'ils ont à faire.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 10/06/2020
Pourquoi la louange embarrasse-t-elle? C'est qu'il est contre la justice qu'on se doit de la refuser, puisqu'on la mérite, et contre la modestie qu'on exige de l'accepter, puisqu'alors ce serait se réunir aux autres pour se préconiser. On est décontenancé, comme il faut toujours qu'on le soit, lorsqu'il faut répondre, et qu'on ne saurait dire ni oui ni non.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 10/06/2020
Je lis un poème italien burlesque, qui me fait alternativement pleurer de douleur et de plaisir; et puis, cela est écrit partout avec une facilité, une douceur, une délicatesse! Et des préambules à tourner la tête.
Il me prend quelquefois des envies de vous en traduire des morceaux, mais il n'y a pas moyen; toutes ces fleurs délicates là se fanent entre mes mains. Ces auteurs qui charment si puissamment nos ennuis, qui nous ravissent à nous-mêmes, à qui Nature a mis en main une baguette magique dont ils ne nous touchent pas plus tôt que nous oublions les maux de la vie, que les ténèbres sortent de notre âme, et que nous sommes réconciliés avec l'existence, sont à placer entre les bienfaiteurs du genre humain.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 10/06/2020
M. Schistre quitta sa mandore, et la vivacité de notre plaisir devint le sujet de la conversation. Nous les laissâmes dire tout ce qu'ils voulurent, et nous préférâmes jouir en silence du reste de notre émotion. Le moment de palpitation qui suit un grand plaisir est encore un moment fort doux: car le coeur palpite avant et après le plaisir.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 10/06/2020
J'aime ma Sophie; la tendresse que j'ai pour elle affaiblit à mes yeux tout autre intérêt. Je ne vois qu'un malheur possible dans la nature; mais ce malheur se multiplie et se présente à moi sous cent aspects. Passe-t-elle un jour sans m'écrire, qu'a-t-elle? Serait-elle malade? Et voilà les chimères qui voltigent autour de ma tête et qui me tourmentent. M'a-t-elle écrit, j'interpréterai mal un mot indifférent, et je suis aux champs. L'homme ne peut ni améliorer ni empirer son sort. Son bonheur et sa misère ont été circonscrits par un astre puissant. Plus d'objets, moins de sensibilité pour chacun. Un seul, tout se rassemble sur lui. C'est le trésor de l'avare.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 10/06/2020
Faire le bien, connaître le vrai, voilà ce qui distingue un homme d'un autre; le reste n'est rien. La durée de la vie est si courte, ses vrais besoins sont si étroits, et quand on s'en va, il importe si peu d'avoir été quelqu'un ou personne. Il ne faut à la fin qu'un mauvais morceau de toile et quatre planches de sapin...
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 10/06/2020
Avec vous, je sens, j'aime, j'écoute, je regarde, je caresse, j'ai une sorte d'existence que je préfère à toute autre. Si vous me serrez dans vos bras, je jouis d'un bonheur au delà duquel je n'en conçois point. Il y a quatre ans que vous me parûtes belle; aujourd'hui je vous trouve plus belle encore; c'est la magie de la constance, la plus difficile et la plus rare de nos vertus.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 10/06/2020
Il y a plus loin de notre état d'innocence actuelle à une première faute que d'une première faute à une seconde, et que de celle-ci à une troisième.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 10/06/2020
Une bonne action, qui n'est connue que du ciel et de nous, n'en est-elle pas encore plus belle? J'aime à croire, pour l'honneur de l'humanité, que la terre en a couvert et en couvrira une infinité avec ceux qui les ont faites. J'aime la philosophie qui relève l'humanité. La dégrader, c'est encourager les hommes au vice. Quand j'ai comparé les hommes à l'espace immense qui est sur leur tête et sous leurs pieds, j'en ai fait des fourmis qui se tracassent sur une taupinière. Il me semble que leurs vices et leurs vertus, se rapetissant en même proportion, se réduisent à rien.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 05/06/2020
On n'entend rien aux amants! Ils semblent n'être pas faits pour être toujours ensemble, ni pour être séparés; toujours ensemble, on dit qu'ils s'useraient; séparés, ils souffrent trop.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 05/06/2020
Me voilà à Guémont, c'est de là que je vous écris avec la plume du curé tout ce qui me passe par la tête. Demain à Joinville, de bonne heure; à Saint Dizier, à dîner; de Saint Dizier à Isle, s'il se peut, dans le même jour, ou samedi dans la matinée, si c'est aujourd'hui jeudi, comme je crois; car je ne sais jamais bien le jour que je vis. Je vous aime tous les jours, et je ne distingue que celui où je me crois plus aimé.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 05/06/2020
Deux choses nous annoncent notre sort à venir et nous font rêver: les ruines anciennes, et la courte durée de ceux qui ont commencé de vivre en même temps que nous. Nous les cherchons, et, ne les retrouvant plus, nous nous replions sur nous: c'est ce sentiment secret qui nous rend leur présence si chère: par leur existence ils nous rassurent sur la nôtre.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 05/06/2020
Que vos regards étaient tendres hier! Combien ils le sont depuis quelque temps! Ah! Sophie, vous ne m'aimiez pas assez, si vous m'aimez aujourd'hui davantage...
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 05/06/2020
N'avez vous pas remarqué quelquefois à la campagne le silence subit des oiseaux, s'il arrive que dans un temps serein un nuage vienne à s'arrêter sur un endroit qu'ils faisaient retentir de leur ramage? Un habit de deuil dans la société, c'est le nuage qui cause en passant le silence momentané des oiseaux. Il passe et le chant recommence.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 05/06/2020
J'ai passé la nuit à lire sa tragédie, dont j'ai fait un extrait pour Grimm. J'irai ce soir à la comédie nouvelle, et c'est encore pour lui que j'irai. Les trois belles âmes que la vôtre, la sienne, et la mienne! S'il m'en manquait une des deux, qui est-ce qui remplirait ce vide terrible? Vivez tous deux si, vous ne voulez pas que je sois un jour la voix qui crie dans le désert.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 05/06/2020
Ce serait un phénomène bien étrange qu'un homme, pensant et disant toujours mal, se conduisît toujours bien. Le dérangement de la tête influe sur le coeur, et le dérangement du coeur sur la tête. Faisons en sorte, mon amie, que votre vie soit sans mensonge; plus je vous estimerai, plus vous me serez chère; plus je vous montrerai de vertus, plus vous m'aimerez. Combien je redouterais le vice quand je n'aurais pour juge que ma Sophie!
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 05/06/2020
Les autres nous devançaient à grands pas, et nous les suivions lentement, le baron de Gleichen et moi. Je me trouvais bien à côté de cet homme; c'est que nous éprouvions au dedans de nous un sentiment commun et secret. C'est une chose incroyable comme les âmes sensibles s'entendent presque sans parler.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 05/06/2020
Voilà le train de la vie; l'un court à travers les ronces sans se piquer; l'autre a beau regarder où il met le pied, il trouve des ronces dans le plus beau chemin, et arrive au gîte écorché tout vif.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 26/03/2020
Si mon ouvrage est bon, il vous fera plaisir; s'il est mauvais, il ne fera point de mal. Point de livre plus innocent qu'un mauvais livre.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 26/03/2020
N'est-ce pas le diable! Du matin au soir ils disent du mal de la vie, et ils ne peuvent se résoudre à la quitter! Serait-ce que la vie présente n'est pas, à tout prendre, une si mauvaise chose, ou qu'ils en craignent une pire à venir?
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 26/03/2020
On revient tôt ou tard d'un plaisir qu'on ne prend que sur le faîte d'un toit, au péril à chaque mouvement de se rompre le cou.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 26/03/2020
Toutes vos nouvelles en vers ou en prose sont des contes d'amour; presque tous vos poèmes, élégies, églogues, idylles; chansons, épîtres, comédies, tragédies, opéras, sont des contes d'amour. Presque toutes vos peintures et vos sculptures ne sont que des contes d'amour. Vous êtes aux contes d'amour pour toute nourriture depuis que vous existez, et vous ne vous en lassez point. L'on vous tient à ce régime et l'on vous y tiendra longtemps encore, hommes et femmes, grands et petits enfants, sans que vous vous en lassiez. En vérité, cela est merveilleux.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 26/03/2020
Jacques ne connaissait ni le nom de vice, ni le nom de vertu; il prétendait qu'on était heureusement ou malheureusement né. Quand il entendait prononcer les mots récompenses ou châtiments, il haussait les épaules. Selon lui la récompense était l'encouragement des bons ; le châtiment, l'effroi des méchants.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 26/03/2020
- Mon maître, on ne sait de quoi se réjouir, ni de quoi s'affliger dans la vie. Le bien amène le mal, le mal amène le bien. Nous marchons dans la nuit au-dessous de ce qui est écrit là-haut, également insensés dans nos souhaits, dans notre joie et dans notre affliction. Quand je pleure, je trouve souvent que je suis un sot.
- Et quand tu ris?
- Je trouve encore que je suis un sot; cependant, je ne puis m'empêcher de pleurer ni de rire: et c'est ce qui me fait enrager.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 25/03/2020
Chacun apprécie l'injure et le bienfait à sa manière; et peut-être n'en portons-nous pas le même jugement dans deux instants de notre vie.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 25/03/2020
Si l'on ne dit presque rien dans ce monde, qui soit entendu comme on le dit, il y a bien pis, c'est qu'on n'y fait presque rien qui soit jugé comme on l'a fait.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 25/03/2020
Je n'aime pas à parler des vivants, parce qu'on est de temps en temps exposé à rougir du bien et du mal qu'on en a dit; du bien qu'ils gâtent, du mal qu'ils réparent.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 25/03/2020
Soumettons-nous à l'ordre universel lorsque nous perdons nos amis, comme nous nous y soumettrons lorsqu'il lui plaira de disposer de nous; acceptons l'arrêt du sort qui les condamne, sans désespoir, comme nous l'accepterons sans résistance lorsqu'il se prononcera contre nous. Les devoirs de la sépulture ne sont pas les derniers devoirs des amis.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 25/03/2020
Pleurez sans contrainte, parce que vous pouvez pleurer sans honte; sa mort vous affranchit des bienséances scrupuleuses qui vous gênaient pendant sa vie. Vous n'avez pas les mêmes raisons de dissimuler votre peine que celles que vous aviez de dissimuler votre bonheur; on ne pensera pas à tirer de vos larmes les conséquences qu'on eût tirées de votre joie. On pardonne au malheur.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 25/03/2020
Jacques, après avoir payé à son capitaine le tribut d'éloges, de regrets et de larmes qu'il lui devait, fit excuse à son maître, remonta sur son cheval, et ils allaient en silence. - Mais, pour Dieu, lecteur, me dites-vous, où allaient-ils?... Mais, pour Dieu, lecteur, vous répondrai-je, est-ce qu'on sait où l'on va? Et vous, où allez-vous?
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 25/03/2020
Ils continuèrent leur route, allant toujours sans savoir où ils allaient, quoiqu'ils sussent à peu près où ils voulaient aller; trompant l'ennui et la fatigue par le silence et le bavardage, comme c'est l'usage de ceux qui marchent, et quelquefois de ceux qui sont assis.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 25/03/2020
Vous concevez, lecteur, jusqu'où je pourrais pousser cette conversation sur un sujet dont on a tant parlé, tant écrit depuis deux mille ans, sans en être d'un pas plus avancé. Si vous me savez peu de gré de ce que je vous dis, sachez m'en beaucoup de ce que je ne vous dis pas.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Jacques le fataliste et son maître (1778)
Ajoutée par Savinien le 25/03/2020
On n'a recours aux invectives que quand on manque de preuves. Entre deux controversistes, il y a cent à parier contre une que celui qui aura tort, se fâchera. « Tu prends ton tonnerre, au lieu de répondre, dit Ménippe à Jupiter; tu as donc tort. »
Par: Denis Diderot
Extrait de: Pensées philosophiques (1746)
Ajoutée par Savinien le 09/04/2013
Celui qui confesse librement qu'il ne sait pas ce qu'il ignore, me dispose à croire ce dont il entreprend de me rendre raison.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Pensées sur l'interprétation de la nature (1753)
Ajoutée par Savinien le 24/07/2012
L'ignorance est moins éloignée de la vérité que le préjugé.
Par: Denis Diderot
Ajoutée par Savinien le 24/07/2012
Sur le portrait qu'on me fait de l'être suprême, sur son penchant à la colère, sur la rigueur de ses vengeances, sur certaines comparaisons qui nous expriment en nombres le rapport de ceux qu'il laisse périr, à ceux à qui il daigne tendre la main, l'âme la plus droite serait tentée de souhaiter qu'il n'existât pas. L'on serait assez tranquille en ce monde, si l'on était bien assuré que l'on a rien à craindre dans l'autre: la pensée qu'il n'y a point de Dieu n'a jamais effrayé personne; mais bien celle qu'il y en a un, tel que celui qu'on me peint.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Pensées philosophiques (1746)
Ajoutée par Savinien le 22/07/2012
Les signes extérieurs de la puissance qui nous affectent si vivement, n'en imposent point aux aveugles. Le nôtre comparut devant le magistrat comme devant son semblable. Les menaces ne l'intimidèrent point. « Que me ferez-vous? Dit-il à M. Hérault. - Je vous jetterai dans un cul de basse-fosse, lui répondit le magistrat. - Eh! Monsieur, lui répliqua l'aveugle, il y a vingt-cinq ans que j'y suis. » Quelle réponse, madame! Et quel texte pour un homme qui aime autant à moraliser que moi! Nous sortons de la vie comme d'un spectacle enchanteur; l'aveugle en sort ainsi que d'un cachot: si nous avons à vivre plus de plaisir que lui, convenez qu'il a bien moins de regret à mourir.
Par: Denis Diderot
Ajoutée par Savinien le 28/12/2011
Les grands services sont comme de grosses pièces d'or ou d'argent qu'on a rarement occasion d'employer; mais les petites attentions sont une monnaie courante qu'on a toujours à la main.
Par: Denis Diderot
Ajoutée par Savinien le 28/12/2011
Présenter la vérité à de certaines gens, c'est, disait ingénieusement un de nos amis, un jour que je m'entretenais avec lui sous ces ombrages, introduire un rayon de lumière dans un nid de hiboux; il ne sert qu'à blesser leurs yeux et à exciter leurs cris. Si les hommes n'étaient ignorants que pour n'avoir rien appris, peut-être les instruirait-on; mais leur aveuglement est systématique. Ariste, vous n'avez pas seulement affaire à des gens qui ne savent rien, mais à des gens qui ne veulent rien savoir. On peut détromper celui dont l'erreur est involontaire; mais par quel endroit attaquer celui qui est en garde contre le sens commun?
Par: Denis Diderot
Extrait de: La promenade du sceptique ou les allées (1747)
Ajoutée par Savinien le 28/12/2011
Il est neuf heures, je vous écris que je vous aime. Je veux du moins vous l'écrire; mais je ne sais si la plume se prête à mon désir. Ne viendrez-vous point pour que je vous le dise et que je m'enfuie? Adieu, ma Sophie, bonsoir; votre coeur ne vous dit donc pas que je suis ici? Voilà la première fois que j'écris dans les ténèbres: cette situation devrait m'inspirer des choses bien tendres. Je n'en éprouve qu'une: je ne saurais sortir d'ici. L'espoir de vous voir un moment m'y retient, et j'y continue de vous parler, sans savoir si j'y forme des caractères. Partout où il n'y aura rien, lisez que je vous aime.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Lettres à Melle Volland (1759)
Ajoutée par Savinien le 31/08/2011
L'incrédulité est quelquefois le vice d'un sot, et la crédulité le défaut d'un homme d'esprit. L'homme d'esprit voit loin dans l'immensité des possibles; le sot ne voit guère de possible que ce qui est. C'est là peut-être ce qui rend l'un pusillanime, et l'autre téméraire.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Pensées philosophiques (1746)
Ajoutée par Savinien le 17/12/2010
Sur le portrait qu'on me fait de l'Être suprême, sur son penchant à la colère, sur la rigueur de ses vengeances, sur certaines comparaisons qui nous expriment en nombre le rapport de ceux qu'il laisse périr à ceux à qui il daigne tendre la main, l'âme la plus droite serait tentée de souhaiter qu'il n'existât pas. L'on serait assez tranquille en ce monde, si l'on était assez bien assuré que l'on n'a rien à craindre dans l'autre: la pensée qu'il n'y a point de Dieu n'a jamais effrayé personne, mais bien celle qu'il y en a un tel que celui qu'on me peint.
Par: Denis Diderot
Extrait de: Pensées philosophiques (1746)
Ajoutée par Savinien le 17/12/2010